Dans le cadre du festival Actoral à Marseille, l’ex Sonic Youth se produisait au côté de la poète Eileen Myles et du saxophoniste Daunik Lazro. Une soirée reprise – mais sans le saxophoniste – à Paris à la Maison de la poésie.
« Is everybody in ? » Thurston Moore connaît ses classiques. D’où cette référence à Jim Morrisson, chanteur des Doors, en ouverture d’une soirée consacrée à la poésie dans le cadre du festival Actoral. Surtout connu en tant que cofondateur du défunt Sonic Youth, Thurston Moore, à l’instar d’un Jim Morrisson, d’une Pati Smith ou d’un Richard Hell, est aussi poète et ne déteste pas dire ses textes à voix haute comme on a pu s’en rendre compte dans le cadre d’une soirée spéciale en association avec le festival montpelliérain Sonorités. Au programme, outre Thurston Moore, la New-yorkaise Eileen Myles et le saxophoniste baryton Daunik Lazro. Debout face au micro, des feuilles de papiers dans ses mains, Moore donne l’impression de livrer en toute décontraction des fragments de lui-même comme s’il déroulait devant nous, mais aussi devant lui, des moments de sa vie. Il y a une qualité particulière dans la façon dont un poète articule ce qui été écrit à l’origine dans l’intimité. Moore privilégie une certaine simplicité. Il respire ses mots avec une aisance très laid back, créant une forme de proximité comme s’il partageait une expérience éminemment personnelle avec le public. En comparaison, la prestation d’Eileen Myles est plus tendue, emportée, avec cependant une touche d’humour. Elle évoque au passage ses racines irlandaises, prétexte à l’introduction d’un poème où le mot « dog » semble en concurrence avec son anagramme « God ». Après la musique des mots, la prestation de Daunik Lazro fait entendre un autre souffle, articulé cette fois sur la respiration continue. Il y a dans la musique de Lazro quelque chose d’un bouillonnement épuré, une réduction à l’essentiel comme filtré par les circonvolutions de l’instrument avec lequel dans le feu de sa concentration, il semble former un tout fusionnel. Au détour d’une mélodie, l’ombre géante d’Albert Ayler affleure comme par magie. Du grand art. Puis, tous trois se réunissent. Thurston Moore joue à plat de sa guitare avec divers objets. Eileen Myles envoie avec un plaisir évident des mots qui sont comme des messages à attraper au vol. Le tout ponctué de courts rifs de saxophone qui vont en s’amplifiant. Un moment de grâce qui pourrait ne jamais finir. Thurston Moore et Eileen Myles, le 14 octobre à 20h à la Maison de la Poésie, Paris (75). www.maisondelapoesie.com 01 44 54 53 00
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}