Plongée au cœur de l’illusion optique avec l’expo « Perspective Playground » au Palais de Tokyo, organisée par Olympus en partenariat avec les Inrocks autour du thème de la photo dans tous ses états. Une expo en HD dont vous êtes le héros.
Le parcours initiatique : voilà sans doute le registre sous lequel placer « Perspective Playground », l’expo immersive orchestrée par Olympus au Palais de Tokyo à Paris. Là, dès l’entrée, une fois équipé de l’appareil photo mis à sa disposition au comptoir, le visiteur fera l’expérience d’une série d’installations immersives, où chacune se suit mais ne se ressemble pas.
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L’entrée en matière se fait dès le hall d’entrée : placée quelque peu en retrait, presque imperceptible et dotée de cette qualité furtive qui la fait échapper à l’oeil non affûté, une sculpture spectrale d’Erik Olofson est suspendue au plafond. « White Noise », c’est son nom, est une structure au découpage ultra-précis, qui se déploie dans l’espace de manière à se confondre avec lui. Du fait de sa surface réfléchissante en inox poli, l’œuvre offre une multitude de perspectives qui reflètent l’environnement extérieur. Ainsi, la forme, composée aussi bien de creux que de pleins, engage un dialogue constant avec son cadre. Au spectateur d’en saisir les multiples facettes changeantes au moyen de son appareil photo, ou au contraire, de se laisser aller au caractère éphémère des apparences transitoires.
La seconde partie du parcours nous mène en contre-bas, dans l’étage réservé à l’exposition. Un panneau accueille le visiteur : « Entrer dans l’installation à vos risques et péril« . Nous voilà prévenus. L’installation en question, c’est « Insideout » de Leigh Sachwitz, artiste berlinoise et également la commissaire de l’exposition. Son principe ? Une double plongée en apnée dans un univers généré par ordinateur, aussi sensoriel qu’abstrait. Plus précisément, le dispositif se compose d’une maison en verre placée au sein d’une pièce plongée dans le noir. Sur les parois de la maison et aux murs de la pièce, des projections abstraites en noir et blanc, rayons lumineux ou mappages numériques, viennent suggérer différentes ambiances. Celles-ci changent au gré des basses puissantes de l’environnement sonore, confié au musicien Andi Toma du groupe de musique électronique expérimentale Mouse on Mars. Sans ménagement, on passe alors du calme saturnien aux bourrasques orageuses, du domestique au tumultueux.
Continuons. Le visiteur débouche ensuite sur une salle ouverte où cohabitent plusieurs installations immersives disposées en enfilade. Au centre, le « Magic Kaleidoscope » du collectif espagnol A2arquitectos est sans conteste celui fait crépiter le plus les flashs. De quoi s’agit-il ? Comme le suggère le titre, un kaléidoscope a été reconstitué de manière à pouvoir y pénétrer. Recouverte de miroirs colorés, une structure tubulaire facettée diffracte en mille reflets l’image de quiconque s’y aventure : de quoi ravir les amateurs de selfie, mais aussi les photographes plus aguerris, puisqu’il est possible, pour chaque œuvre, de se référer au cartel indiquant le réglage photographique optimal pour chaque oeuvre – que ce soit le mode rafale lorsqu’il s’agit de capter des phénomènes transitoires comme ici, ou alors le temps d’exposition long, pour les installations à basse luminosité.
D’ailleurs, si les ressources artistiques et créatives de la technologie de pointe constituent le fil rouge de l’exposition, Into the eye de Martin Butler, une œuvre dans laquelle nous sommes invités à pénétrer, rappelle également par son dispositif la chambre noire des débuts de la photographie, tout en se chargeant de connotations surréalistes. Basée sur des effets d’illusion d’optique, l’œuvre semble distordre les échelles de grandeur : en présentant un côté plus grand que l’autre, ou encore en jouant sur des jeux de contrastes de couleur pour créer le relief de manière artificielle. Inspiré de la « Chambre des Ames » construite par l’ophtalmologiste américain Adelbert Ames Jr en 1946, le résultat obtenu, si l’on s’y photographie, rejouera également l’une des séries iconiques de la photographie classique, à savoir la série documentaire de Diane Arbus consacrée aux géants dans les années 1970 – et l’on pense tout particulièrement au fameux cliché « A Jewish giant at home with his parents, in the Bronx, NY ». En photographie, l’illusion et le doute sont les deux faces d’une même réalité.
Enfin, le périple sensoriel se clôt avec « Hallucinogen », l’œuvre bien nommée du street-artiste Maser. Jouant sur les ressources optiques de stries noires et blanches parallèles, auxquelles il ajoute des touches de couleur vives, l’artiste constitue un panorama renversant qui réactualise l’héritage de grands noms du courant que l’histoire de l’art désigne par le terme d’art optico-cinétique. Né au milieu du siècle dernier, ce courant connut son heure de gloire dans les années 70-80, notamment avec le succès public d’artistes comme Bridget Riley ou Georges Vasarely. Dans le sillage de l’exposition « Dynamo » au Grand Palais en 2013, qui en dressait l’historique, « Perspective Playground » en propose la relecture ultra-technologique et toujours immersive, où le maître mot est laissé au visiteur. Celui-ci est le véritable sujet de tous ces dispositifs, qu’il est appelé à activer de sa présence et à capturer au travers de son objectif. Attention, c’est reversant.
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