Théâtre, danse, poésie, musique : le spectacle vivant brille de tous ses feux au Festival d’Avignon. Présentée en plein air, de nuit, la nouvelle création de la chorégraphe franco-suisse Maud Blandel, “L’Œil nu”, apparaît l’une des pièces les plus étincelantes vues durant la première moitié de l’édition 2023.
Du in au off, en intérieur ou en extérieur, à midi ou à minuit, le théâtre semble surgir partout et tout le temps durant le Festival d’Avignon. Du côté du off, on peut par exemple découvrir avec bonheur Loin des hommes, la nouvelle pièce de l’auteur, metteur en scène et acteur réunionnais Vincent Fontano, accueillie au théâtre du Train Bleu. Dans un dispositif scénique minimaliste, sans décor, elle donne à entendre un homme – joué par Fontano, impeccable – puis une femme – incarnée par Véronique Sacri, d’une justesse magnétique.
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Parlant avant tout d’amour, ou plus exactement du besoin d’amour, ces deux personnages autour de la quarantaine, dont les chemins se croisent brièvement au détour d’une nuit, se livrent à cœur ouvert, comme si (le reste de) leur vie en dépendait. Exprimées à travers un texte superbe, leurs voix – auxquelles se mêle la subtile création atmosphérique du compositeur Jako Maron – résonnent avec une intensité vibrante et remuent profondément.
Constellation chorégraphique
Moins représentée que le théâtre et moins visible de prime abord, la danse occupe pourtant une place importante dans l’offre pléthorique d’Avignon. Cette 77e édition s’avère d’ailleurs très gratifiante au niveau chorégraphique. Programmée dans le festival in et par ailleurs intégrée à la (très stimulante) Sélection suisse en Avignon, la splendide nouvelle création de Maud Blandel, L’Œil nu, nous a fait particulièrement forte impression.
Mettant en parallèle le phénomène d’explosion d’une étoile avec le souvenir d’un événement traumatique (le suicide par arme à feu de son père lorsqu’elle était enfant), la chorégraphe franco-suisse propulse sur scène une constellation mouvementée qui emporte cinq danseuses et un danseur. Pareilles aux circonvolutions infinies de la mémoire, les amples spirales de la danse entrent intimement en résonance avec les soubresauts sophistiqués de la composition sonore, à la fois cartoonesque et cauchemardesque, scandée par des détonations obsédantes. Le cloître du cimetière de la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon offre ici à la pièce un cadre optimal, à la fois majestueux et spectral – sous les étoiles exactement.
Aurore libératrice
Avec Outrenoir (présenté à la Scierie, dans le off), François Veyrunes invite, quant à lui, dans l’orbite lumineuse de Pierre Soulages, à vivre une palpitante exploration chorégraphique tendue, entre espace du dedans et espace du dehors, vers une aurore libératrice. Remarquables, les cinq interprètes transmettent une danse aussi fluide que suggestive, aux nuances multiples. Oscillant entre baroque et électronique, jusqu’à la techno la plus martiale, l’envoûtant univers sonore, conçu par François Veyrunes, apporte encore plus de relief(s) à l’ensemble.
Loin des hommes, jusqu’au 26 juillet au Théâtre du Train Bleu, Avignon.
L’œil nu, du 1er au 4 septembre au Festival La Bâtie, Genève ; du 16 au 18 novembre au CND, Pantin.
Festival d’Avignon, jusqu’au 25 juillet.
Avignon Off, jusqu’au 29 juillet.
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