Visible au loin grâce à sa tour biseautée, la Fondation Luma dévoile au public un environnement total mêlant architecture, art, design et jardins.
Depuis plusieurs années déjà, Arles voit s’élever dans les airs un monolithe réfléchissant. D’abord, ce fut la base que l’on vit surgir hors du sol, massive et biscornue. De l’architecte Frank Gehry, tenant d’une architecture déconstructiviste, on connaissait les bâtiments signatures : ses musées et ses fondations, de la déclinaison des musées Guggenheim – New York, Bilbao, Abu Dhabi – jusqu’à la Fondation Louis Vuitton à Paris.
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Mais sur les terres rases de la région camarguaise, le starchitecte avait cette fois-ci été invité à réaliser une “œuvre unique”. La milliardaire suisse Maja Hoffmann, 65 ans, héritière de l’entreprise pharmaceutique La Roche, avait déjà posé ses valises dans la ville de 52 000 habitants en 2013. Au Parc des Ateliers, un premier site de onze hectares était venu accueillir un premier programme d’expositions au cœur d’une ancienne friche SNCF.
Une tour babélienne d’acier, de béton et de verre
Mais pour parfaire Luma Arles, il fallait un insigne, un geste architectural immédiatement reconnaissable. Ce sera donc une tour, dont la construction confiée à l’architecte américain était entreprise dès l’année suivante. Longtemps, celle-ci eut des allures de Tour de Babel, sa base en inox semblait vouloir s’étaler plutôt que s’élancer, à l’instar de celle peinte par Pieter Brueghel l’Ancien.
Et puis, en 2021, les travaux prirent fin et le dernier week-end de juin, la tour et son ensemble ouvraient ses portes au public. Le mastodonte facetté en acier, béton et verre surplombe désormais la ville de ses 56 mètres de haut et prend ses aises sur une superficie de 15 000 m2 – dont 2000 m 2 de surface d’exposition. “Un phare”, dira sa commanditaire.
Luma Arles, cependant, n’est pas qu’une tour. C’est un complexe artistique, et même “un organisme vivant” dont l’ambition totalisante est d’“approfondir la compréhension des questions liées à l’environnement, aux droits de l’homme, à l’éducation et à la culture”.
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Les années 1990 à l’honneur
En clair, qu’y verra-t-on vraiment, en termes d’œuvres et d’expositions ? La nature archipélique du projet tend à complexifier la réponse, le temps du moins que les visiteur·euses s’habituent aux espaces et outrepassent les effets d’annonce alambiqués. Le cycle inaugural laisse néanmoins présager des orientations à venir.
On y retrouve d’abord la bande de la mécène et collectionneuse Maja Hoffmann, une génération d’artistes qui marquèrent les années 1990, et dont certains sont également intégrés à la direction artistique comme Liam Gillick ou Philippe Parreno. Leurs œuvres figurent parmi les commandes permanentes et cohabitent avec le toboggan géant de Carsten Höller, les ambiances atmosphériques d’Ólafur Elíasson ou encore un café conçu par Rirkrit Tiravanija.
A Luma Arles, les années 1990 sont à l’honneur, et pour parfaire le tableau, Pierre Huyghe ne saurait manquer à l’appel. Au sein des expositions temporaires, ce-dernier présente After UUmwelt, tandis que Prélude réunit quatre artistes émergents (Sophia Al-Maria, Kapwani Kiwanga, Patrick Staff et Jakob Kudsk Steensen) tous attaché·es, comme leurs aîné·es, à penser les œuvres et leur forme exposée en tant qu’écosystème évolutif.
Après les scintillements et les miroitements, les usages et les pratiques
Inaugurée quelques semaines à peine après la Bourse de Commerce à Paris, la fondation Luma annonce ses ambitions de changer l’institution du XXIe siècle, là où la première s’en tient à une vision plus classique : des chefs d’œuvres dans un écrin.
Au-delà des scintillements aussi séduisants que fallacieux de la Babel arlésienne, seuls ses usages et ses pratiques permettront d’en juger. Heureusement, c’est gratuit – pour la première année au moins.
LUMA Arles, gratuit sur réservation
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