Reconnue internationalement, l’œuvre immersive de la vidéaste nous exhorte à penser nos comportements ultra-numériques.
L’influence d’Hito Steyerl sur les années 2010 est immense, et l’exposition événement que lui consacre enfin le Centre Pompidou (conjointement avec le K21 Düsseldorf) viendra marquer d’une pierre blanche la décennie qui s’ouvre. Il peut être étonnant d’aborder de front l’impact qu’aura une exposition qui, à l’heure où nous écrivons ces lignes, s’apprête à peine à ouvrir au public.
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Mais la renommée de la vidéaste et théoricienne, née en 1966, à Munich, en Allemagne, n’est plus à faire. Ses écrits, dont la plupart sont en accès libre en anglais via la plateforme éditoriale e-flux.com et certains en cours de traduction en français (De l’art en duty free, les presses du réel, à paraître en 2021), proposent déjà les réflexions les plus abouties sur les imbrications entre culture visuelle et globalisation, théorie des médias et critique institutionnelle.
Ligne de force
Ses œuvres plastiques, elles, nous sont parvenues par échos plus distants, distillées ponctuellement en France au fil d’expositions collectives (dont Co-Workers au musée d’Art moderne de Paris en 2015-2016). Celle qui s’est d’abord destinée au cinéma documentaire dans les années 1990, citant parmi ses références Harun Farocki ou Alexander Kluge, enchaînera à partir des années 2010 les présentations dans les institutions et les biennales – à Venise, elle coreprésentera l’Allemagne en 2015 et participera à l’exposition collective de la dernière en date en 2019.
Une “chorégraphie sociale” qui adresse de front l’instrumentalisation algorithmique autonomisée des comportements de masse
En France cependant, I Will Survive, et son catalogue pléthorique de près de quatre cents pages, marque la première confrontation directe avec un corpus qui déploie ses installations vidéo déjà historiques (How Not to Be Seen: A Fucking Didactic Educational. MOV File, 2013, ou Liquidity Inc., 2014), comme ses plus récentes (This Is the Future, 2019 et Mission Accomplished: Belanciege, 2019), et sa nouvelle œuvre SocialSim (2020). Soit une “chorégraphie sociale” infusée de l’esthétique du gaming, qui adresse de front l’instrumentalisation algorithmique autonomisée des comportements de masse.
Il en va, chez Hito Steyerl, à la fois d’une mise en garde et d’une opération de sédition, portées par cette ligne de force qui imprègne l’ensemble de ses productions : l’émancipation ne pourra venir que par la connaissance des techniques de l’image.
I Will Survive de Hito Steyerl, jusqu’au 5 juillet, Centre Pompidou, Paris et sur centrepompidou.fr
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