Le meilleur des expositions d’art contemporain dans toute la France (et à Genève).
« A propos du Contrat Social »
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Dans La Pensée straight, la théoricienne féministe Monique Wittig consacre un chapitre à la déconstruction du Contrat Social de Jean-Jacques Rousseau, qu’elle disqualifie comme un modèle social construit sur l’exploitation des femmes. Une fois ceci posé, comment faire fructifier les graines de la révolte de manière à ériger un nouveau modèle communautaire qui viendrait s’y substituer ? Cette tâche, l’artiste Mai-Thu Perret s’y attèle depuis la fin des années 1990.
Née en 1976 à Genève, l’artiste a construit la majeure partie de son travail autour d’un projet nommé The Crystal Frontier. Sous ce titre se cache un projet tentaculaire, qui déploie l’histoire d’une communauté fictive de femmes dans le désert à travers une série d’œuvres allant de la sculpture à la céramique en passant par le textile. Tantôt attribuées à l’artiste ou à l’une des membres de la communauté fictive, ces œuvres font partie de celles que l’on retrouve au MAMCO à Genève, où elle peuple un étage entier du musée de ses « guérillères ». Alors que l’on entend souvent que notre époque serait en panne de futur, celles-ci n’ont rien perdu de leur appétit de changement.
• Mai-Thu Perret, jusqu’au 3 février au MAMCO à Genève
King of Pop-(art)
Identité, question raciale, célébrité, industrie culturelle mais aussi statut du fan et construction médiatique de l’image. Tous ces enjeux furieusement actuels naissent et s’incarnent chez un seul : Michael Jackson. Car le king de la pop n’est pas que cela. Tout au long de sa carrière, il inspire les artistes. S’il côtoie très tôt Andy Warhol, s’il se dira fasciné par la peinture classique de la Renaissance et s’engage comme mécène à la fin de sa vie, sa proximité avec les arts visuels reste relativement modeste au vu de son influence. Ainsi, c’est plutôt sa valeur de symbole universel qui en fait la toile de projection idéale pour les artistes contemporains de sa naissance, son ascension puis sa chute.
Cet hiver, le Grand Palais accueille la première exposition consacrée à l’influence de Michael Jackson sur les artistes. D’abord présentée à la National Portrait Gallery à Londres sous le commissariat de Nicholas Cullinan, elle nous parvient en France sous la houlette de la commissaire Vanessa Desclaux. Qui au sujet de la proposition souligne combien il est rare « d’avoir l’opportunité de voir réunis des artistes aussi différents. On va de l’art le plus conceptuel, avec David Hammons, à une iconographie kitsch et presque trop populaire pour être prise au sérieux, comme par exemple David LaChapelle« .
• Michael Jackson : On The Wall, jusqu’au 14 février 2019 au Grand
Palais à Paris
Balai, talons hauts, moustache et rouge à lèvres
Le surréalisme pin up d’Emily Mae Smith est à l’image de toute une vague de jeunes peintres qui réinvestissent actuellement la veine symboliste et surréaliste en la mâtinant de l’influence des gradients Photoshop. Parmi cette généalogie, parmi de jeunes artistes comme Jannis Marwitz, Alexandra Noël, Louisa Gagliardi ou Nicholas Party, Emily Mae Smith pourrait être perçue comme figure de proue. Née en 1979, l’artiste américaine ne s’inspire pas tant de l’imagerie digitale que du pop art et des Chicago Imagist. Il n’empêche, ses toiles de facture ultralisses, qui rappellent également la manière de Magritte ou Léger, frappent pile dans le mille de l’imagerie actuelle.
C’est que ses figures stéréotypées, qui signalent leur genre par quelques accessoires forcément binaires, les talons hauts ou la moustache, les formes phalliques et le balai de la ménagère, évoquent la codification artificielle du genre. Mais ses peintures exhibent également de manière explicite leur condition de peinture, s’adonnant au libre jeu des textures et des motifs. C’est peut-être la grande différence avec Magritte et ce qui l’ancre dans le contemporain : Emily Mae Smith ne cherche à aucun moment à nous faire prendre conscience que l’image de la pipe n’est pas une pipe, puisque le monde des images se répand aujourd’hui dans le réel qu’il colore en retour.
• Emily Mae Smith, jusqu’au 14 avril au Consortium à Dijon
Ex Fan des Eighties
Les images sont éternelles, les icônes de chair en revanche non. A la galerie Christophe Gaillard, l’artiste et cinéaste Unglee présente un « show », comme il l’appelle lui-même, c’est-à-dire une exposition fardée et grimée comme l’est un spectacle. Imprégné du glamour des stars hollywoodiennes de la belle époque, l’artiste se photographie en reprenant leur pose, en ayant au préalable pris soin de se faire maquiller et costumer de manière à leur ressembler par une maquilleuse de cinéma.
A la fin des années 1970, l’artiste alors étudiant en cinéma se fait connaître par ses films reproduisant à petite échelle le faste de la machinerie hollywoodienne, transposant à l’échelle d’une subjectivité unique l’entreprise collective que représente la réalisation d’un film. Il filme alors le faste du Paris des années 1980 qui également se fantasme ailleurs, à Los Angeles ou à New York, dans les années 1950 ou dans le monde étincelant qui jamais ne se ternit du simulacre. Une vidéo résume le délicieux drame du spectacle : Oh oui !, scène de danse où un jeune homme ondule lascivement sous les projecteurs, tandis que la voix off d’une femme vieillissante décline les fantasmes de possession qu’elle nourrit à son égard.
• Comme un désir d’éternité, le show de Unglee, jusqu’au 19 janvier à la galerie Christophe Gaillard à Paris
Ici c’est Paris
C’est l’histoire de deux artistes suisses qui arrivent à Paris, s’aménagent un atelier dans l’espace de leur galerie et se mettent à y produire ensemble un ensemble d’œuvres qui ont trait au nouveau contexte qui les environne. Résultat, des pigeons se font tirer le portrait, une colonne de carrelage vapote en béret, le logo de la RATP se voit érigé en arabesque délicate et enfin une scène de genre, scooter mal garé, poubelle défoncée, et cnnettes de 8.6 prend des proportions de peinture héroïque. A Paris Internationale déjà, la galerie Joseph Tang présentait le résultat de la collaboration des deux artistes en question, Adam Cruces et Louisa Gagliardi.
Venus respectivement de l’installation et de la peinture les deux artistes ont ensemble conçus cet ensemble de pièces en renouant avec une pratique d’atelier au long cours qui n’était habituellement pas au centre de leurs habitudes de travail respectives – le premier concevant ses pièces in situ, la seconde procédant pour ses peintures sans pinceaux et par impression de fichiers PDF. En résulte une variation à la fois tendre et amusée sur l’archétype romantique du flâneur urbain, ce « peintre de la vie moderne » baudelairien qui se meut comme dans un rêve à travers la grande ville rongée par le progrès technique et l’architecture moderne.
• Deleted Scene(s) d’Adam Cruces et Louisa Gagliardi jusqu’au 10 janvier à la galerie Joseph Tang à Paris
<< à lire et à voir aussi : Ana Mendieta au Jeu de Paume à Paris ; Persona Grata au MAC VAL à Vitry-sur-Seine et au Musée de l’Immigration à Paris ; Peindre la Nuit au Centre Pompidou Metz ; Paula Rego à Orsay à Paris >>
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