Etienne Blanchot, programmateur de l’évènement, nous raconte la deuxième édition d’Ideal Trouble, festival créé en réaction à un monde de la musique de plus en plus aseptisé.
Du 28 mai au 2 juin, le festival Ideal Trouble (qui se passera dans divers lieux parisiens) cherchera à revenir au principe fondamental de la programmation : faire jouer des artistes que l’on aime, les recevoir de la meilleure manière possible et sortir le public de sa zone de confort. Nous sommes donc allés poser quelques questions à Etienne Blanchot, à la tête du projet, afin qu’il nous parle des endroits qui acceuillent l’évènement cette année, et qu’il nous recommande quelques concerts.
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Est-ce qu’il y a une volonté de résistance chez Ideal Trouble ?
Oui, carrément. Surtout sur la forme : pour cette édition, on voulait raconter quelque chose, une manière de faire. Et bon, inutile de revenir là-dessus mais suite à mon départ de Villette Sonique, j’ai créé Ideal Trouble l’année dernière avec en quelque sorte la volonté de faire un pied de nez au milieu de la musique, qui est un peu ennuyeux. Je voulais revenir à un principe assez fondamental qui est de faire découvrir des choses au public, pas de s’aligner sur quelque chose de pré-établi.
Le festival s’ouvre à d’autres lieux cette année. Pourquoi ?
Au départ, j’avais tout de suite cette idée de l’ouvrir à d’autres endroits que la Station. Je voulais faire une sorte de parcours, avec des contextes différents ; mais ce qui m’intéresse le plus dans ces endroits c’est ce qu’ils racontent. Chacun d’entre eux prend des risques, essaie de réinventer les choses face aux gros festivals qui deviennent un peu tristounes, plus du tout défricheurs.
Tu peux me parler de ces endroits ?
Bien sûr. Michèle de Doxa Esta, au niveau du Zorba (et de la Pointe Lafayette), a réussi à transformer ces caves en salles à part entières, avec deux ou trois groupes par soir, de vraies découvertes. Aladdin du Péripate, a fait de ce lieu un des trucs les plus excitants de Paris, mais à sa manière, très punk. Le Collectif Mu a, de son côté, complètement réinventé la notion de tiers-lieu, la façon de faire du rock, du club avec La Station et le Garage Mu. Tout ça avec un aspect social très important parce qu’ils prennent très soin des artistes. Le but c’est finalement de transformer le jeu en le piratant, en lui donnant de nouvelles bases économiques, culturelles et sociales.
Et concernant Lafayette Anticipations ?
Dans un autre registre, Lafayette Anticipations est une fondation d’art contemporain privée, et François Quintin, avec les autres, a réussi à définir un espace de propositions qui est très rare, totalement dédié aux artistes. Il y a un atelier énorme au sous-sol par exemple ; et avant tout, il y a toujours cette idée de risque, de faire découvrir des choses au public. En gros, ce sont tous des gens qui essaient de combler des vides dans l’espace culturel. Ah, et il y a aussi le Chair de Poule dans le festival, qui est un bar incroyable de par l’amour, la passion qu’ils portent à la musique. Ils ne vivent que pour ça.
Il y aura aussi une Nuit Belge à la Station, le 29 mai. Pourquoi la scène belge ?
Plus que jamais, la Wallonie est au centre de tous les sujets, entre le hip-hop, la variété mainstream et le foot. Et depuis quelques années, il y a une scène alternative qui est ultra puissante. Ca va de choses un peu house comme DJ Athome, à des trucs plus techno-indus comme Laz, en passant par des projets expérimentaux tels que Summer Santana. Sans parler de Pizza Noise Mafia, qui est difficile à décrire. Il y a un énorme espace de proposition et en plus, sans aller dans le cliché, les Belges sont super sympa.
Ce sera après Scorpion Violente et Prettiest Eyes, c’est ça ?
Oui tout à fait, il y aura les concerts en première partie de soirée à l’extérieur, puis ce sera à l’intérieur, pour le club. On fait ça en collaboration avec les Actionnaires, un organisateur de concerts à Bruxelles hyper talentueux, et le Centre Wallonie Bruxelles de Paris.
Ce sont des noms qui sont très peu connus du grand public. Il y a une volonté de les faire sortir de l’underground ?
Oui, l’idée c’est d’élargir le spectre bien sûr, et de faire connaître les artistes qu’on aime. C’est ce que j’ai toujours dit par rapport à mon travail : si c’est bien programmé, le travail des artistes parlera à tout le monde. Les line-ups se ressemblent un peu tous dans les festivals, là on a essayé de sortir des sentiers battus.
De ton côté, quels événements est-ce que tu attends le plus ?
C’est très difficile de répondre à cette question, mais il y a Le Matin, un Breton qui fait très peu de concerts. C’est une sorte de génie de la composition électronique déréglée. De Ambassade aussi, qui fera son premier concert en France. Puis évidemment Vanishing Twin, qui est un combo de musiciens géniaux, réunis pour faire de la pop assez ambitieuse.
Il y a Eye, aussi, son album est super.
Grave ! C’est une Française et son disque est sorti un peu dans l’indifférence alors que c’est très pop, ce sont des vraies chansons. En gros, c’est ce que j’attends un peu des artistes, que leur musique soit simplement porteuse d’émotions. J’ai oublié de te parler de Fiesta El Vecio, aussi, une chanteuse incroyable, à la fois radicale et très sensuelle avec sa voix. Et de Beau Wanzer, un nerd fan de Carpenter qui fait de la super musique. A vrai dire, j’attends un peu tous les concerts, en fait.
Et au niveau du Péripate, tu peux me dire ce qui va se passer ?
Haha, c’est un peu une surprise. On a écrit le line-up mais comme souvent là-bas, il se décidera un peu au dernier moment. On a décidé de faire une Péripate dans sa pure tradition de folie habituelle, twistée par l’ADN Ideal Trouble. Du coup, on n’annoncera pas le plateau en amont. Peut-être qu’on le fera sur place, peut-être pas. Le principe de revenir au fondamentaux techno (sans têtes d’affiche, de gros noms) est assez séduisant, tout comme celui de prendre une claque musicale à l’aveugle. Enfin, le line-up devrait être plutôt techno, au sens très large du terme. Mais il pourrait aussi y avoir de belles surprises aux antipodes de ça.
Le festival Ideal Trouble aura lieu du 28 mai au 2 juin.
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