Des fouilles archéologiques ont exhumé les restes d’un repas enterré il y a 27 ans par l’artiste Daniel Spoerri.
Accroupis au dessus d’un trou béant, le pinceau à la main, les archéologues et les scientifiques présents dans les jardins du domaine de Montcel à Jouy-en-Josas assistent, aux côtés de Daniel Spoerri, à l’exhumation d’un banquet qu’il avait enfoui, en 1983, sous 1m30 de terre.,
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[attachment id=298]Un véritable happening réalisé il y a près d’un quart de siècle par ce créateur issu du Nouveau Réalisme, mondialement connu pour ses « tableaux pièges » rassemblant des restes de repas collés sur des panneaux de bois accrochés verticalement.
Sauf qu’ici il n’est pas question de sculpture mais plutôt « d’une expérience artistique en continu en hommage au Déjeuner sur l’herbe de Manet », un peu dans la mouvance de la Garbage Archeology, un mouvement artistique répandu aux Etats-Unis et qui, à travers l’analyse des poubelles, étudie la manière de vivre de la société de consommation.
Telle une véritable chasse au trésor, les scientifiques s’attardent à déblayer les restes de ce repas que le temps a plus ou moins bien conservé. Au final, seules les tables en aggloméré n’ont pas résisté ; les fourchettes, les couteaux, les assiettes Arcopal, et les verres Duralex sont, quant à eux, restés pratiquement intactes.
Au menu : mamelles fumées, ragoût de python et steak de trompe d’éléphant
A la vue des cadavres de bouteilles qui gisent sur le sol humide, on s’imagine assister à ce fameux banquet partagé notamment par Arman, Soulages, César et Spoerri ; entre artistes, galeristes et critiques d’art. Une sorte de « grande bouffe » figée dans l’instant, un peu à la manière des statues de Pompéi, mais dont le menu en laisserait certains sur leur faim.
Au programme des festivités, pas de caviar ni de foie gras en vue, mais plutôt des plats tous plus étranges les uns que les autres comme des tripes, des mamelles fumées, de la moue de veau, du ragoût de python et des steaks de trompe d’éléphant. Une véritable performance gustative qui révulsait de nombreux convives comme la femme du photographe Peter Knapp, présente lors de ce repas, et qui a préféré ne pas toucher à son assiette.
Les plus téméraires se sont risqués à apporter leur vaisselle, comme Niki de Saint Phalle, qui a joué la carte de l’élégance en venant avec des vases lilas pour « faire bourgeois ». L’histoire ne dit pas si elle a goûté à quelques-uns des plats de cet atypique gueuleton.
Daniel Spoerri compte réaliser un moulage de ce banquet avant de l’enterrer à nouveau pour les générations futures. Les archéologues espèrent juste qu’il prendra son temps, car ils voudraient étudier de plus près cette œuvre pour voir comment certaines matières, telle que la céramique, se sont décomposées dans le temps.
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