Un Noir et un Blanc doivent reconstruire le monde après un cataclysme : un duo explosif ouvre le festival Traversées africaines du Tarmac.
Pour le commun des mortels, noir plus blanc égale gris. Mais pour les comédiens Ousmane Bamogo et Gilles Ostrowsky, noir plus blanc égale zèbre. Pas de dilution, de compromis ou de confusion. Ne resterait‑il qu’un Noir et un Blanc sur Terre, à la suite d’un cataclysme, qu’ils continueraient de camper sur leurs positions. Et avec un peu de chance, à se poser des questions…
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C’est lors de la création de La Tempête, de Shakespeare, par Thierry Roisin, en 2015 au Burkina Faso avant une tournée française, que les deux acteurs se sont rencontrés. “On a passé trois mois ensemble à Ouagadougou pour répéter et créer la pièce, raconte Gilles Ostrowsky, lors d’une répétition au Tarmac le 21 février. On était très curieux l’un de l’autre et on a passé des heures à parler de tout. Les femmes, l’amour, la démocratie, le poulet à l’ail, la bière, le progrès. C’était un florilège permanent, un feu d’artifice de questions.”
Reconstruire à deux l’avenir de l’humanité
A Ouagadougou, Ousmane Bamogo est un comique célèbre, récompensé par plusieurs prix avec son duo -Combo.com qui utilise la candeur de l’enfance pour porter un regard critique et abrasif sur la réalité politique de son pays.
“Quand on a créé La Tempête, c’était la première fois que je travaillais avec des Blancs. J’avais beaucoup de questions, je ne connaissais pas la France et ensuite, quand j’y suis venu en tournée, j’ai été choqué par des choses, comme eux ont pu l’être chez nous. Pour finir, on s’est dit : pourquoi ne pas poser toutes ces questions sur un plateau ?”
Du monde dévasté, ne reste qu’un meuble monumental pourvu de 63 tiroirs, leur partenaire de scène doué d’une vie propre et qui “distille” à chaque ouverture de tiroir un son, un objet, un discours, un bébé, autant d’éléments du réel ou du passé qui servent d’amorce au jeu de questions que se pose le duo à l’heure de reconstruire à deux l’avenir de l’humanité. Vaste programme…
Un signal d’alarme où l’humour le dispute au bon sens
Au commencement était la baston, la violence, la souffrance : on ne refait pas le premier chapitre de l’histoire humaine. “Après qu’ils se sont bien défoulés et foutus sur la gueule, ils vont pouvoir commencer à parler, philosophe Gilles Ostrowsky. Ils prennent n’importe quel prétexte pour se mettre en concurrence. C’est à celui qui souffrira le plus.”
Autre élément-clé du plateau : la pissotière qui rythme les séquences et reproduit, dans un son et lumière évocateur, la puissance de feu que gardent en réserve les deux comparses pour se mesurer l’un à l’autre, comparer leur potentiel respectif et régler à la force du poignet l’étendue de leur rayon d’action.
A l’heure où, sur décision ministérielle, Théâtre Ouvert va devoir faire la preuve de sa “francophonitude” en lieu et place du Tarmac, ce Cri du zèbre sonne comme un signal d’alarme où l’humour le dispute au bon sens. Le bonheur de la rencontre peut alors s’amuser à revisiter la chanson française en moré : Aline de Christophe et L’Eté indien de Joe Dassin en sont la réjouissante démonstration. Fabienne Arvers
Le Cri du zèbre d’Ousmane Bamogo, Gilles Ostrowsky et Thierry Roisin, jusqu’au 9 mars, Le Tarmac, Paris XXe (dans le cadre de Traversées africaines, du 6 mars au 13 avril)
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