Alors que le CDNO pourrait tout bonnement disparaître et se mobilise pour sa survie, sa future ex-patronne, Séverine Chavrier, y met en scène “Aria da Capo”, avec les confidences de quatre ados déchiré·es entre amour de l’art et désir de vivre.
En ce printemps théâtral, les feux sont braqués sur le CDN d’Orléans. L’actualité y est 1) factuelle, 2) politique, 3) artistique ; et il est important de suivre ce qu’il s’y passe.
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1) Au début de l’été, Séverine Chavrier quittera le CDNO qu’elle dirige depuis janvier 2017 avec un excellent bilan (un public élargi et rajeuni, 600 heures d’ateliers avec les jeunes des alentours et la participation d’ambitieux·ses artistes associé·es – Suzanne de Baecque, Vimala Pons, Raoul Collectif et Angélica Liddell). Ce 1er juillet en effet, l’artiste reprendra la direction de la prestigieuse Comédie de Genève.
2) Malgré cette réussite, le CDNO pourrait disparaître (un théâtre où Stéphane Braunschweig, Olivier Py et Arthur Nauzyciel ont fait carrière). À ce jour, aucun processus de recrutement pour la succession de Séverine Chavrier n’a été enclenché. Sur place, l’équipe navigue à vue et se mobilise. Pour les pouvoirs publics, plusieurs scénarios seraient à l’étude : la suppression du théâtre, son absorption par la scène nationale de la ville ou une révision de sa mission.
En effet, la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak a laissé entendre qu’elle envisageait une refonte totale des “labels” (CDN, scènes nationales, CCN, scènes conventionnées…), qu’elle juge inadaptés aux défis actuels, de leurs modes de financement jusqu’à leur cahier des charges. Mais comment ? Tout reste à définir. Petit tabou. Grande réflexion. Immense chambardement. Orléans ferait office de test. Et pourquoi pas de jurisprudence. À suivre…
Séverine Chavrier a recueilli la parole de ces jeunes, à rebours des clichés sur le milieu.
3) Dernière preuve de l’ambitieuse production du CDNO : Aria da capo, en tournée. Signée Séverine Chavrier, justement, cette pièce cérébrale, tortueuse et mâtinée d’humour noir traite de l’adolescence (masculine, surtout) et de l’apprentissage musical (classique, essentiellement). Nous voilà plongé·es dans l’intimité de quatre instrumentistes (une fille et trois garçons qui jouent leur propre rôle) promis·es à une grande carrière. Mais écrasé·es par le poids d’une culture sacrée, tordu·es par une discipline de fer, traversé·es par des pulsions contradictoires. Conversations badines, postures gamines, atermoiements philosophiques… Tout y passe.
Au fil de longs mois, Séverine Chavrier a recueilli la parole de ces jeunes (dont les trois co-auteur·rices de la pièce), qu’elle met en scène crûment et cruellement. À rebours des clichés sur le milieu, on y découvre une génération déchirée entre le désir d’exigence et le droit à vivre son adolescence. Impossible conciliation. Passionnants désaccords.
Aria da capo de Guilain Desenclos, Adèle Joulin, Areski Moreira, mise en scène Séverine Chavrier, avec Guilain Desenclos, Adèle Joulin Areski Moreira, Victor Gadin. Au Théâtre Nanterre-Amandiers, du 12 au 22 avril.
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