Depuis vingt ans, le studio national des arts contemporains forme et révèle de jeunes artistes dont il fait découvrir chaque année les œuvres les plus récentes.
Après une exposition cet été au Palais de Tokyo, Le Rêve des formes, qui questionnait le dialogue entre artistes et scientifiques sur la plasticité du vivant, Le Fresnoy poursuit son travail d’exploration formelle avec son exposition annuelle, Panorama 19, présentant les travaux de ses élèves entre ses murs à Tourcoing. De Laurent Pernot à Laurent Grasso, de Neil Beloufa à Hicham Berrada, de Clément Cogitore à Anri Sala, beaucoup d’artistes confirmés sont passés par cette école dirigée depuis sa création en 1997 par Alain Fleischer.
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Cette année encore, on mesure sur place combien ce lieu de formation offre l’occasion à de jeunes artistes de développer un travail libre, sans carcan, ouvert à tous les médiums ; un foisonnement de gestes et de formes, qui en dépit d’un effet de dispersion ou d’inachèvement, témoigne d’une “véritable foi dans l’art”, selon l’expression de Jean de Loisy, président du Palais de Tokyo et commissaire de cette dix-neuvième édition, qui ne cache pas son étonnement face à la maturité de certains d’entre eux. “L’exposition réunit ce champ météorologique curieux où des masses d’air chaudes et froides, des humidités, des évaporations, des reliefs, créent toute une thermodynamique et dont l’ensemble définit non pas une exposition, mais un climat.”
Dans ce climat, dont la scénographie imaginée par Christophe Boulanger valorise les variations subtiles, quelques œuvres singulières se dégagent ; celles dont le mystère épais se fond dans la proposition d’un récit extravagant. Par exemple, Thomas Guillot a conçu une sorte d’ordinateur, à la fois vintage et futuriste, telle une console d’où pendent des câbles électriques qui modifient la nature des images et des sons.
Matière insaisissable et baignoires verticales
Selon les branchements, des voix multiples se font entendre, comme s’il s’agissait de spectres sortis des ruines d’un temps immémorial. Avec son objet curieux, Thomas Guillot invente un dispositif fascinant, reflétant les visages du monde contemporain autant qu’il s’en éloigne par un récit des origines.
Aussi étonnantes, les photographies de Baptiste Rabichon troublent par leur matière insaisissable, mêlant des compositions numériques à des manipulations argentiques, entre abstraction et sensualité. Populaire sur You Tube avec son personnage Solange te parle, Ina Mihalache s’est initiée durant deux ans au langage artistique dans les murs du Fresnoy ; elle a ici sculpté des baignoires verticales dans lesquelles on peut s’asseoir et qui nous parlent, comme un cocon réconfortant où le son rééquilibre les corps malmenés.
Beaucoup d’autres élèves – Léonard Martin, Alexandre Guerre, Hugo Deverchère, Hideyuki Ishibashi, Pablo Valbuena, Victor Vaysse… – témoignent d’un tempérament artistique vif, bien qu’encore en devenir ; le signe qu’en vingt ans, Le Fresnoy, par l’esprit de recherche qui l’anime, reste un vivier pour rêver les formes, à défaut de pouvoir les interpréter. Jean-Marie Durand
Panorama 19 Du 23 septembre au 31 décembre au Fresnoy, Tourcoing
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