Rentrée créative à Lausanne avec trois spectacles où s’affirment les démarches de créateur·rices aussi différent·es et singulier·es que Yasmine Hugonnet, Philippe Saire et Steven Cohen.
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Les Porte-Voix de Yasmine Hugonnet
Avec Les Porte-Voix, la chorégraphe Yasmine Hugonnet propose un cabaret ventriloque dans la salle Pavillon du théâtre de Vidy. Sur scène, les quatre interprètes évoluent entre les sculptures patinées d’un ossuaire géant et mouvant. La scénographie de Nadia Lauro évoque les formes stylisées d’un crâne, d’une série d’os et d’une mandibule. L’espace s’accorde à l’ambition de se lancer dans une archéologie des rapports entre la voix et le corps. Proposant un retour aux sources de la ventriloquie, le spectacle rappelle l’usage qu’en faisait la Pythie de Delphes pour prédire l’avenir. La pièce témoigne d’une pensée proliférante, ouvrant son propos à la place de la parole des femmes dans l’histoire comme la préhistoire.
Les Porte-Voix, chorégraphie et conception Yasmine Hugonnet. Du 8 au 11 décembre, Théâtre St-Gervais, Genève (Suisse). Les 14 et 15 mars 2023, Biennale de danse du Val de Marne, Atelier de Paris CDCN, Paris.
Velvet de Philippe Saire
Rendez-vous au théâtre Sévelin 36 où la compagnie Philippe Saire a choisi, avec Velvet, d’inventer un cabaret dansé dédié aux jeux des possibles avec un rideau de scène. Avec élégance et une belle dose d’humour, trois interprètes se retrouvent prisonniers des lubies d’un régisseur qui fait tomber sa collection de rideaux de scène, comme autant de thèmes d’improvisation et de défis lancés aux artistes. Une série d’impromptus où chaque mini numéro s’enchaîne à la manière d’une charade surréaliste. Envoûtant.
Velvet, pièce chorégraphique de Philippe Saire. Le 13 décembre, Théâtre Benno Besson, Yverdon-Les-Bains (Suisse). Les 30 et 31 mars 2023, Grütli, Genève (Suisse).
Boudoir de Steven Cohen
Retour à Vidy où le Sud-Africain Steven Cohen présente sa dernière pièce, Boudoir, à découvrir par petits groupes, salle René Gonzalez. On commence par assister à la projection d’un film pour découvrir Steven Cohen dans diverses performances mettant en scène ce qui constitue, pour lui, trois lieux de mémoire. Le voici au milieu des dépouilles d’animaux de la faune sud-africaine entassées dans la réserve d’un atelier de taxidermiste. Plus tard, il investit le cimetière juif de Johannesburg pour visiter la tombe où repose sa grand-mère, avant de changer de continent et de cadrer le site du camp de concentration du Struthof, dans les Vosges, où la nature à repris ses droits. Suite à la projection, on se dirige vers le fameux “boudoir”, un cabinet de curiosité regorgeant d’objets mémoriels comme autant d’autels où se recueillir. Perché sur deux mappemondes transformées en stilettos baroques, Steven Cohen évolue à demi-nu entre les spectateur·rices à la manière d’un fantôme. La débauche d’objets exposés et l’exiguïté de la pièce donnent l’impression qu’il nous invite dans sa tête, à la croisée des multiples cauchemars et fantasmes qui le hantent. L’intimité du partage est l’occasion d’une rencontre inoubliable avec le performer qui, comme dans les baraques foraines, apparaît et disparaît en utilisant une loge de bois pivotante découpée dans une cloison. Digne d’un magicien, ce tour de passe-passe confirme la volonté d’aborder avec légèreté l’imaginaire, tissé de réel, de celui qui a fait sienne la mission de porter la souffrance du monde à travers son art. Bouleversant.
Boudoir, conception, scénographie et performance, Steven Cohen, jusqu’au 16 novembre, Théâtre Vidy-Lausanne (Suisse). Du 24 au 26 novembre, dans le cadre du Festival d’Automne à Paris, Centre Pompidou. Du 13 au 15 décembre, Théâtre National de Bretagne, Rennes. Du 1er au 3 mars 2023, Bonlieu, scène nationale d’Annecy. Les 3 et 4 avril 2023, TAP, scène nationale de Poitiers.
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