Réunissant deux textes rares de l’auteur de la célèbre Femme assise, Marilú Marini et Pierre Maillet dressent un portrait sensible de Copi, celui qui reste pour l’éternité le plus délirant des Argentins de Paris.
Assise sur une chaise, à cour et à l’avant-scène, Marilú Marini a des allures de petite fille mise au piquet. Une gamine facétieuse qui peste en silence et ronge son frein alors que le public se presse pour rejoindre ses places. L’air de rien, elle commence par nous mettre la pression, comme si l’inopportun désordre causé par notre arrivée mettait en retard le début de ce spectacle qu’elle consacre à deux textes de Copi, La Journée d’une rêveuse et Rio de la Plata sous la direction de Pierre Maillet.
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Ce prologue sans parole s’avère un piège délicieux, l’occasion pour l’incomparable actrice qu’est Marilú Marini d’harponner notre attention et faire de nous ses captifs… Comment résister à ce visage au comble de l’exaspération se cachant et se dévoilant sous la touffe ébouriffée de sa tignasse blonde ? Comment ne pas frémir à ses regards noirs et ne pas fondre à ses œillades coquines ? Comment ne pas jubiler à la délicate chorégraphie de ses mains et de ses bras qui, dans un effet de zoom, deviennent tout son corps alors que la robe noire qu’elle porte la transforme en silhouette ?
Portrait de l’auteur
Les aficionados de Copi reconnaîtront d’emblée la référence à La Femme assise, la pièce qui avait inspiré au plus fou des Argentins de Paris la bande dessinée qu’il livrait chaque semaine dans les colonnes du Nouvel Observateur et pour laquelle Marilú Marini obtint le prix de la meilleure comédienne du Syndicat de la critique en 1984.
Dans cette position, la comédienne nous apparaît comme une reine en son royaume. Bien plus qu’une recréation de La Journée d’une rêveuse qui fut montée par Jorge Lavelli avec Emmanuelle Riva dans le rôle principal en 1968, le charme du spectacle se cristallise par touches pour former un portrait de l’auteur au gré des extraits de Rio de la Plata qui émaillent son cours… l’un des rares textes biographiques où Copi, qui en 1984 se savait déjà malade du sida, revient sur les épisodes de sa vie, ses allers et retours entre la France et l’Argentine alors que la dictature fait de lui un simple citoyen du monde épris de liberté.
Cabaret en noir et blanc
Accompagnée au piano par Lawrence Lehérissey et interpellée par les voix off de Michael Lonsdale, Marcial Di Fonzo Bo et Pierre Maillet, Marilú Marini puise avec pudeur à l’extravagance de Copi pour concocter ce cabaret en noir et blanc… Manière de dire sa tristesse d’avoir perdu une personne infiniment aimée tout autant qu’exprimer la lumière sans pareille de cet être si cher à son cœur. Chapeau bas.
La Journée d’une rêveuse (et autres moments…) d’après La Journée d’une rêveuse et Rio de la Plata de Copi, adaptation et mise en scène Pierre Maillet, avec Marilú Marini, jusqu’au 4 décembre à la Comédie de Caen, comediedecaen.com, et du 8 au 12 décembre au Théâtre national de Toulouse, tnt-cite.com
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