Bien trop rarement mise en scène et jouée, « La Duchesse d’Amalfi » de John Webster est un joyau méconnu du théâtre Élisabéthain. Créée récemment pas le collectif Eudaimonia et son metteur en scène Guillaume Séverac-Schmitz au Cratère – Scène Nationale d’Alès, où l’artiste est en résidence, l’œuvre peine à se déployer sous toutes ses facettes et convaincre de l’intérêt qu’il y aurait à la voir et l’entendre plus souvent.
Dans cette tragédie sanglante aux élans romantiques, John Webster dramatise la vie de la Duchesse d’Amalfi qui, veuve, se remarie secrètement à l’homme qu’elle aime, son intendant Antonio Bologna, faisant elle-même au passage la proposition que la différence de rang n’autorise pas au jeune homme. Heureuse et mère dans la clandestinité, elle n’échappera pas cependant au courroux, à la jalousie, aux règles infernales du patriarcat et, in fine, à la vengeance de ses deux frères, le cardinal d’Aragon et le duc Ferdinand de Calabre.
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Un trop plein d’enthousiasme ?
Menée bon train, dans une scénographie presque épurée, rappelant de ses néons et cadres mobiles le théâtre des années 80, la mise en scène de Guillaume Séverac-Schmitz ne s’embarrasse pas des subtilités de l’œuvre et encore moins des résonances qu’elle pourrait avoir aujourd’hui, pêchant en cela par son enthousiasme qui, au lieu de servir son projet, le dessert cruellement. A trop vouloir montrer que ce théâtre est riche, merveilleux, vif, politique, engagé, précurseur, il le rend grossier, poussif et caricatural.
La vigueur de la gouaille affichée de la Duchesse et, dans son sillage, des autres personnages, comme si le metteur en scène avait voulu traiter son sujet par la caricature et la dérision, engendre un affadissement des subtilités dramatiques et un regrettable appauvrissement du sens. Même l’épique au cœur de la pièce peine à sauver une œuvre qui est ravalée au titre de texte pour matinée classique à destination d’élèves désœuvrés.
Guillaume Séverac-Schmitz, qui dit inscrire la thématique de la chute au cœur de son travail de metteur en scène, excelle au moins en ce point.
La Duchesse d’Amalfi de John Webster, mise en scène Guillaume Séverac-Schmitz. Maison des Arts de Créteil du 19 au 22 février.
26 / 27 février La Passerelle, Scène Nationale de Saint-Brieuc
Du 7 au 9 mars au Jeu de Paume – Aix en Provence
17/18 avril au Théâtre de Nîmes
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