De Boris Charmatz à Tiziano Cruz, la révélation de cette édition, on aura vu à Avignon le corps sous toutes ses formes.
En nombre ou en solo, poétique ou politique, la danse cette année à Avignon n’était pas toujours là où l’attendait. À commencer par un stade, Bagatelle, par exemple “réquisitionné” par Boris Charmatz, artiste complice du festival, pour donner Cercles, surtout pas un spectacle mais une assemblée d’amateur·ices imaginant un monde meilleur. Ou quelque chose comme cela.
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Percutée par les résultats du premier tour des législatives françaises, cette proposition travaillant le motif du cercle et du bien commun réchauffa les cœurs lourds. Sur les musiques percutantes de la fanfare techno allemande Meute, 175 amateur·ices ont appris des danses de groupe n’effaçant jamais l’individu. Avec une dizaine de professionnel·les proches de Charmatz comme guides, Cercles marqua les esprits.
Interroger le passé comme le présent
À l’autre spectre de cette invitation au nouveau directeur du Tanztheater Wuppertal, on trouvera Forever, immersion dans l’univers de Café Müller, pièce unique de Pina Bausch. Soit une journée avec, dedans, contre Café Müller entre représentations et commentaires. Une affaire de transmission aussi qui pose problème. Une œuvre d’art vivante doit-elle être figée ou autonome ? Interprétée au plus près du public de la Fabrica, Forever interroge le passé comme le présent.
Performance de Tiziano Cruz, Soliloquio s’ouvrait par une parade dansée et chantée dans la touffeur d’Avignon. Ce dernier avait convié des communautés du coin, tziganes et sud-américaines, dans une démarche inédite. Avant que l’argentin “et indigène à la mode”, comme il se définit invite les spectateur·ices à un étrange cérémonial, cette fois au lycée Mistral. Partant des lettres adressées à sa mère durant le Covid-19 – lequel n’en finit pas de marquer les créateur·ices –, ce seul en scène tisse l’intime et le politique avec une force imparable. Que peut dire ce corps différent, celui de Cruz donc ? Quel est le pouvoir du théâtre dans un monde globalisé et néo-libéral ? Tiziano Cruz invente des rituels miniatures, influence revendiquée de son Nord de l’Argentine, la région de Jujuy, pour réparer les vivant·es et faire danser les morts.
Seconde pièce invitée par Tiago Rodrigues à Avignon cet été, Wayqeycuna voit Tiziano Cruz espérer enfin la réconciliation. Il évoque ces “souvenirs” tissés à même la toile de laine par les enfants de sa région. Et nous ouvre les portes de son univers. Magnifique. Alors que la direction du festival annonce déjà l’artiste complice de 2025, la fantastique Marlene Monteiro Freitas, et que la France en mode olympique rêve de records, on se dit que les raisons de croire en un avenir apaisé ne sont pas complètement illusoires
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