Chaque mois de juin, avec June Events, festival du CDC Atelier de Paris-Carolyn Carlson, la création chorégraphique se donne rendez-vous à la Cartoucherie. Rencontre avec Anne Sauvage, directrice générale de l’Atelier de Paris et programmatrice de cette 9e édition qui commence ce soir.
Comment est né le festival June Events ?
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Anne Sauvage – A l’origine de June Events, il y a Carolyn Carlson qui a fondé l’Atelier de Paris en 1999 et créé le festival en 2004, en complicité avec le Théâtre de l’Aquarium. Ce dernier reste un partenaire fidèle du festival, et nous sommes également accueillis cette année par le Théâtre du Soleil. Et même au-delà : nous rayonnons dans des médiathèques, des jardins du XIIe arrondissement, dans l’espace public à Paris ou à Vincennes.
L’Atelier de Paris, qui est devenu depuis peu un Centre de développement chorégraphique…
Depuis janvier, le festival s’instaure dans le prolongement organique de tout ce que nous organisons dans l’année, des résidences aux master class. Ce label CDC, c’est une reconnaissance et l’appartenance à un réseau de dix centres sur tout le territoire français. Je crois que c’est une bonne nouvelle, un signe fort pour la danse à Paris. Nous vivons un moment où les soutiens pour la production et la diffusion diminuent. La situation reste inquiétante pour les compagnies. Nous souhaitons que l’existence de ce CDC renforce les conditions dans lesquelles les compagnies travaillent à Paris.
June Events est-il un festival de plus ?
Nous recherchons avant tout à présenter une programmation un peu à part de celle des théâtres parisiens. L’empreinte du lieu, qui est magique au mois de juin, joue aussi beaucoup dans son identité. Nous voulons programmer des artistes dans un esprit de dialogue entre les générations. Nous sommes sur une construction de doubles soirées, avec des premières parties qui sont des découvertes, et des secondes parties avec des compagnies plus repérées. On fait le pari que la reconnaissance des uns pourra aider à la découverte des autres. Sur ce site au milieu des arbres à Paris, le spectateur sera invité à faire des parcours de soirée en soirée.
Revendiquez-vous des fidélités artistiques ?
Ce qui différencie June Events d’autres festivals, c’est le travail d’accompagnement. Il y a bien sûr la forte envie de programmer des coups de cœur et je ne me l’interdis pas. Mais cet événement est le temps fort d’une programmation qui se construit toute l’année depuis que nous avons repris le Théâtre du Chaudron. Toute la saison, nous accompagnons des parcours artistiques et des démarches. C’est plus que le simple suivi de projet. Notre fidélité se traduit par cet état d’esprit.
Vous présentez une soirée particulière autour de Tomeo Vergés ?
Oui, c’est une soirée consacrée à sa trilogie Incisions liée à la décomposition du mouvement avec, comme source d’inspiration, entre autres, le cinéma expérimental de Martin Arnold. Cela vient clore l’accompagnement de parcours que nous avons eu avec sa compagnie Man Drake depuis 2012. Le CDC a coproduit et accueilli en résidence bien des projets de Tomeo sur les trois dernières années. Il nous a semblé juste de présenter la totalité de cet opus.
Y a-t-il des axes que l’on peut dégager dans la programmation ?
On ouvre le festival sur un focus Québec avec Daniel Léveillé, trop peu présent sur les scènes parisiennes, et un jeune en devenir, Manuel Roque. C’est la troisième pièce de ce dernier, mais il ne s’est encore jamais produit en France. Nous avions accueilli Solitudes solo de Daniel en résidence, il était aussi venu pour une master class. Nous sommes très attentifs à la scène montréalaise. Comme notre histoire avec Benoît Lachambre ou Frédérick Gravel, qui ont tous deux donné des spectacles et des master class chez nous. Et en même temps, nous voulons ouvrir sur des jeunes talents.
C’est vrai qu’il y a des liens importants qui se construisent : avec le festival TransAmériques, par exemple, qui présente ces deux créations de Daniel Léveillé et de Manuel Roque attendues chez nous juste après. Il s’agit de collaborations à long terme qui se tissent pour faciliter la circulation des artistes et des œuvres. Et Montréal n’est pas un exemple unique.
Peut-on parler d’un fil rouge qui parcourt le festival ?
Une chose est ancrée dans l’ADN du festival depuis ses débuts : l’exploration des liens entre la danse et la musique. A mon sens, assez inépuisable au vu de l’actualité de la scène artistique. Je suis toujours surprise du nombre de projets qui font de cette exploration une source permanente d’inspiration.
Manuel Roque qui traverse des états de corps, porté par le Requiem de Fauré, Daniel Léveillé et Bach, une musicalité des corps donnée à voir chez Loïc Touzé, Rhythm de Mié Coquempot qui a ici inversé le processus : c’est le compositeur Pierre Henry qui a créé sa musique à partir des propositions de Mié Coquempot et Jérôme Andrieu.
Il y a aussi cette pièce pour trois médiums, danse, musique et lumières d’Alban Richard, ou Un sacre du printemps de Daniel Linehan dans lequel on pourra s’immerger. L’éventail est donc des plus larges.
Et cette année, un axe plus sous-jacent prend de l’importance : nous proposons des pièces avec davantage d’interprètes sur le plateau. Cela participe d’une volonté, je crois, d’afficher une certaine vitalité de la danse actuelle. Et pour nous, il s’agit de dire que dans ces temps où les compagnies se battent pour faire vivre des projets, nous sommes à leur côté. Ce sont des pièces qui défendent le partage.
Nous avons aussi en tête les événements du mois de janvier. Quelque chose qui n’est pas nommé mais qui est bien là.
La danse peut-elle être un miroir de la société ?
Avec leur création, les artistes reflètent et interrogent le monde. Je constate que la danse est plus que jamais engagée, et ce au-delà des plateaux. Nous menons des actions dans des collèges et des associations de quartier toute l’année. Je crois que la danse peut redonner du sens au vivre-ensemble.
June events, festival du CDC Atelier de Paris-Carolyn Carlson, du 8 au 20 juin 2015
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