Ce chorégraphe belge à l’énergie contagieuse est cette semaine à Paris, au Théâtre de la Ville, avec une pièce époustouflante fondée sur le saut. Rencontre.
Vous faites partie de la nouvelle vague belge : quel regard portez-vous sur les « anciens » ?
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Jan Martens – Ils ont marqué mon existence de spectateur et de chorégraphe. Ma première rencontre avec la danse contemporaine a été As Long as the World Needs a Warrior’s Soul de Jan Fabre en 2000. J’avais 16 ans et j’ai été submergé par la force, la physicalité, la sexualité et la sensualité de cette pièce et des performers. Plus tard, j’ai vu Fase d’Anne Teresa de Keersmaeker en vidéo et sa beauté m’a scotché. Une combinaison de féminité, de simplicité, d‘émotion et de mathématiques dévastatrice. L’une des inspirations de The Dog Days Are Over a été la fin de Fase avec sa musique de clappements. Quant à Jan Lauwers, j’aime sa manière de construire sa compagnie comme un laboratoire et une grande famille où beaucoup développent leur art. C’est un modèle pour moi.
Votre danse est très conceptuelle et très physique.
Oui, le corps est d’autant plus important que nous devenons des créatures en deux dimensions sur nos portables, nos mobiles. Nous communiquons davantage, mais nous sommes de plus en plus seuls. La physicalité est, à cet égard, une forme d’art essentielle qui peut reconnecter les gens entre eux. C’est ce qui m’a tenu en haleine chez Fabre et que j’essaie de développer dans mon langage chorégraphique.
The Dog Days Are Over part d’un seul mouvement : sauter. Ce qui vous intéresse, c’est la performance ? La résistance ?
La fatigue est un outil qui permet d’être sincère. A travers elle, les masques tombent, il n’y a plus de « performance ». On est soi, simplement. Au-delà de ça, je pense à ces gouvernements d’extrême droite qui voudraient que les artistes remplissent les salles. Mais qu’est-ce qui est commercial ? Qu’est-ce qui est du divertissement ? Pourquoi prend-on du plaisir à voir les autres souffrir (comme dans la téléréalité) ? Le saut peut répondre à ces questions. Un vocabulaire basique qui permet d’infiltrer le monde du burlesque ou du show avec une pièce de danse plutôt minimale.
Dans Ode to the Attempt, vous êtes sur scène en solo : est ce un (auto)-portrait ?
Effectivement. J’y fais ce que j’aime, danser, sur la musique que j’apprécie. Je donne au public un aperçu de mon ordinateur qui est tristement mon compagnon la plupart du temps ! Après avoir créé The Dog Days Are Over pour huit danseurs, c’était important de revenir sur le plateau. Je retrouve là une certaine liberté, je maîtrise le temps, l’ordre, la lumière. Jérôme Bosch était le point de départ, puis j’ai peu à peu dérivé. En faisant des recherches sur le peintre, je me suis rendu compte qu’il superposait beaucoup ses peintures. Ces « couches » ne peuvent être vues qu’au rayon X. Comme si je réécrivais encore et encore, dévoilant sur scène le processus de création, je superpose différents vocabulaires pour un même mouvement.
The Dog Days Are Over, du 26 au 30 janvier au théâtre des Abbesses, Paris. Le 2 février au Carré Château-Gontier
Ode to the attempt : les 22 et 23 mars au Grand Bain, La Rose des Vents de Villeneuve-d’Ascq, le samedi 26 mars au festival Artdanthé avec un autre solo d’un de ses danseurs, Steven Michel (que l’on a également pu voir chez Daniel Linehan), They Might Be Giants.
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