“Excuse-moi, je sors à peine de la douche.” Il est 20 h 30, Océanerosemarie, les cheveux encore humides, nous invite à entrer. C’est un peu la course parce qu’elle rentre à peine d’Avignon où elle vient de jouer la 571e de La Lesbienne invisible. C’est l’histoire légèrement autobio d’une lesbienne que personne ne croit lesbienne […]
« Excuse-moi, je sors à peine de la douche. » Il est 20 h 30, Océanerosemarie, les cheveux encore humides, nous invite à entrer. C’est un peu la course parce qu’elle rentre à peine d’Avignon où elle vient de jouer la 571e de La Lesbienne invisible. C’est l’histoire légèrement autobio d’une lesbienne que personne ne croit lesbienne et qui ferraille de 15 à 30 ans avec les butches, les fems, les parents, les amis, les lesbiennes refoulées, les hétéros allumeuses… « Concernant ces dernières, j’ai toujours une fragilité, mais je me soigne », rigole-t-elle. On arrive chez elle armé d’un bon bourgogne – on s’est renseigné.
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En cuisine, elle s’empare d’un économe et commence à faire la peau à un légume non identifié. « Le navet, c’est très fin et subtil, avec des endives, ça va être dément… Je fais gaffe pour pas ressembler à une grosse dondon le 9 mars. » Ce soir-là, elle joue à la Cigale, une prestation d’où sera extrait le DVD de son spectacle, l’acmé d’un marathon entamé il a presque quatre ans:
« Au début, j’étais dans une certaine inconscience, faut être fou pour parler de gouines à tout le monde, explique-t-elle. Je voulais changer les mentalités en jouant une lesbienne positive. »
Océanerosemarie jette les légumes dans la poêle avec une noix de beurre de la taille d’un poing et plante le tire-bouchon dans la bouteille. « Je peux arrêter le pain, les desserts, le fromage, mais en aucun cas le bourgogne », s’amuse-t-elle. Malgré le succès, il n’est toujours pas facile de faire tourner son spectacle en province. « Les salles subventionnées nous ferment souvent la porte, contrairement aux comiques qui remplissent autant que moi à Paris. C’est absurde, c’est surtout en province qu’il est important de libérer la parole, l’accueil y est dingue. » Avant de devenir l’Invisible, Océane a d’abord été musicienne sous le nom d’Oshen. Un projet qu’elle continue de porter aujourd’hui. « On me disait à l’époque de ne pas dire que j’étais lesbienne, que ça allait me couper du public. » Avec La Lesbienne invisible, spectacle populaire et politique, elle inverse le stigmate : contre le placard, elle s’affiche en quatre par six dans le métro:
« J’en ai un peu voulu à Muriel Robin de ne pas avoir fait son coming-out lorsqu’elle était la personnalité préférée des Français, mais c’était une autre époque. J’en veux davantage aux femmes médiatisées d’aujourd’hui. »
On passe à table. Océanerosemarie sert deux belles assiettes de légumes caramélisés accompagnés de tournedos à se damner. On parle de Michael Haneke. Elle est fan de Funny Games et d‘Amour, qu’elle a vu à Cannes. « C’était extrêmement émouvant. Pour une fois, Haneke ajoute de la tendresse dans son cinéma, sauf que j’avais peur que les acteurs meurent pendant la projo… » Elle ne jouera pas La Lesbienne invisible 2 sur les planches mais envisage de tourner une comédie romantique qui démarrerait là où finit le spectacle, lorsqu’Océanerosemarie s’est muée en trentenaire sex-addict.
En guise de dessert, Océane attrape deux poires à pleines mains, « de deux régions différentes, hein », et les découpe, ravie. On finit la bouteille. Océanerosemarie commence à bâiller. Elle attrape Le Déclic, la BD érotique de Manara – une inspiration pour son propre projet de BD érotique. « Il a tout compris au désir, à ce qui nous excite malgré nous. Le Déclic, c’est l’histoire d’une femme très prude qui se retrouve prise aux griffes de vieux gros porcs riches et manipulateurs, Marcela Iacub n’a rien inventé ! » Elle se glisse dans son lit avec Manara. On la laisse en de bonnes mains.
La Lesbienne invisible le 9 mars à Paris (Cigale) ; Ma cuisine lesbienne (éditions Des ailes sur un tracteur) ; Le Guide du mariage homo (La Martinière), sortie le 3 avril
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