“Day by Day, Night by Day” plonge le spectateur dans un flot de sons et d’images. Une expérience familière et dionysiaque de la désorientation.
8, rue Saint-Bon, Paris. 15 h. Sur un frigo, gisent des cadavres de bières. La fête semble toucher à sa fin mais continue en musique. Bien qu’il n’y ait plus grand-monde. A vrai dire, il ne reste qu’un jeune homme attablé derrière le bar, prêt à vous renseigner ou vous servir une bière. Pour sa première exposition parisienne à la galerie Freedman Fitzpatrick, Hannah Weinberger a voulu que son vernissage soit infini, ouvrant ainsi l’espace glacial et confiné de la galerie à une sociabilité potentielle permanente, à une fête intime, légère et innocente, accueillant le visiteur à bras ouverts.
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Une expérience dionysiaque de la désorientation
Née en 1988, cette artiste suisse assimile ses expositions à des « moments ». Et de ce moment, de ce sas divertissant, en découle un autre, tout aussi accessible, une vidéo projetée dans le boudoir de la galerie. Composée de fragments de vidéos issus de travaux antérieurs mais aussi de nouvelles séquences, Day by Day, Night by Day plonge le spectateur dans un flot de sons et d’images. Une expérience familière et dionysiaque de la désorientation, invoquant sans détour notre expérience intime.
Bruits de pas, tapotement sur un clavier de téléphone, sonnerie, tubes mainstream de l’été… Rythmée par des sons pris sur le vif lors de ses voyages, cette vidéo-clip ou ce clip-vidéo nous amène tour à tour en bord de mer, dans un jardin, sur une route désertique, dans un zoo, auprès de statues antiques ou de poissons d’un aquarium de Los Angeles.
Somme toute, des images aussi idylliques que potentiellement infernales, à la fois en dehors et dans les sentiers du tourisme international de l’entertainment. Ouvertement clichée, héritière à la fois du post-internet et de l’installation sensorielle américaine, la vidéo semble être un écho au phénomène de « post-ironie », cette approche ambiguë car à la fois cynique et honnête.
Ode fluide aux pérégrinations banales
Une alchimie douce-heureuse émane de ce mixage de vidéos intimes et sons divers, conjurant le chaos qu’on associe souvent à la vie contemporaine, faite de sauts, de collisions, d’aller et retours entre divers ordres de réalité « réels » ou virtuels. A la fois cinéma-vérité et clip vidéo, Day by Day, Night by Day opère comme les effluves d’un substrat d’une vie passée à rêver online et offline, une ode fluide aux pérégrinations banales, tirant partie des joies et des merveilles du zapping, du montage, du filtre Instagram. Par décalage et superpositions de sons et d’images, Hannah Weinberger fait entrer en symbiose diverses temporalités, ouvrant le champ de la galerie, muté en espace ouvert, au souvenir et à l’intimité. Day by Day, Night by Day : cette mélodie libérale est moins innocente qu’elle n’y paraît.
Day by Day, Night by Day, Hannah Weinberger jusqu’au 26 mai 2018. Galerie Freedman Fitzpatrick, 8, rue Saint-Bon 75004.
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