Pendant six mois à la Pépinière Théâtre, François Morel présente une série de spectacles attachants et/ou désopilants.
Si les souvenirs ont un parfum, ceux de François Morel sentent assurément la fleur. Ou plutôt les fleurs. Elles abondent et embaument dans Hyacinthe et Rose, spectacle doucement nostalgique sous le signe de l’enfance. Il y a d’abord ces deux prénoms, correspondant respectivement au grand-père et à la grand-mère du narrateur – interprétés par Morel lui-même, accompagné au piano par Antoine Sahler. Le sol en gazon vert planté de clochettes indique l’humeur bucolique de cette évocation d’un monde à la fois proche et lointain. Hyacinthe ne jure que par le matérialisme dialectique, tandis que Rose en pince pour le Bon Dieu. Ils ne s’entendent sur rien, sauf sur les fleurs. Un livre en particulier les réconcilie, véritable bible du jardinage due à un certain Hippolyte Langlois, que le narrateur aura la malencontreuse idée de colorier au stylo-bille. Erreur regrettable, tout comme celle qui lui fera un jour composer un bouquet de digitales avant de voir sa grand-mère le jeter violemment sur le tas de fumier. D’abord meurtri, il apprend que les digitales sont des fleurs empoisonnées. Les boutons d’or, en revanche, si on les place sous le menton ont, paraît-il, la vertu de révéler si vous avez ou non mangé du beurre… Hyacinthe et Rose abonde ainsi en détails touchants tout comme Bien des choses, autre spectacle nettement plus ironique que François Morel reprend en compagnie de son camarade Olivier Saladin dans le cadre de la carte blanche qui lui est consacrée à la Pépinière Théâtre. Jusqu’en juin prochain, Morel y déploie tel un accordéon au large soufflet l’éventail de ses talents, entre créations et reprises, dont un récital de chant.
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Écrit sous forme de cartes postales, Bien des choses relève d’un jeu de ping-pong épistolaire souvent désopilant entre les Rouchon et les Brochon. Deux couples dont les noms font évidemment penser à « ronchons » et qui en bons Français moyens contemplent les pyramides d’Égypte ou autres merveilles du bout du monde d’un oeil las tout en pensant que, quand même, c’est chez soi qu’on est le mieux. Ces lettres de vacances truffées de perles tiennent du feu d’artifice, dans une veine qui rappelle forcément un peu les Deschiens. Volontiers dérisoires, ces échanges relèvent presque d’une version ouatée du « choc des civilisations », dans la mesure où, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, nos voyageurs ne se remettent jamais en question.
Hyacinthe et Rose de et par François Morel, compte rendu
Bien des choses de et par François Morel, avec Olivier Saladin, jusqu’au 30 mars à la Pépinière Théâtre, Paris IIe
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