Articulant le message de Mozart à l’actualité de la lutte des intermittents, Simon McBurney invente une Flûte enchantée militante qui réjouit.
Avec le chef espagnol Pablo Heras-Casado et les musiciens du Freiburger Barock Orchester, oeuvrant dans une fosse rehaussée au niveau des premiers rangs du public, Simon McBurney annonce d’emblée la couleur de sa conception d’un monde de l’opéra où musiciens, chanteurs sur le plateau et spectateurs dans la salle, sont traités dans une même continuité spatiale et donc, quasiment sur un pied d’égalité.
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Cette Flûte enchantée de Mozart convoque plus que jamais les noces de la fiction et du réel via le carré rouge, signe de soutien à la lutte des intermittents, que portent sur le cœur chanteurs, musiciens et que l’on retrouve aussi dans la salle sur les vêtements de nombreux spectateurs. Un tapis rouge conjoncturel déroulé pour le projet mozartien où l’amour réunit Tamino (brillant Stanislas de Barbeyrac) et Pamina (Marie Eriksmoen), deux tourtereaux destinés à prendre leur envol vers les hautes sphères du pouvoir et pris en tenaille entre les forces des Lumières et les malédictions de la nuit… Sans oublier la prestation brillante d’un Papageno, oiseleur SDF, incarné ce soir là par Joseph Wagner. Un bras de fer philosophique que Simon McBurney pose sur un plateau nu où, pour seul élément de décor, il se contente d’un pont suspendu par des filins qui lévite à volonté et place chacune des actions en apesanteur au-dessus du plateau.
L’aventure concilie projections vidéo, bruitages en direct et effets chorégraphiques dignes d’un Busby Berkeley. Avec une direction des chanteurs qui s’attache autant à tirer le meilleur du théâtre des récitatifs qu’à tempérer les numéros de bravoure de la partition, McBurney et son chef ont travaillé à l’évidence main dans la main… Et cette parcelle d’utopie au milieu de la tempête sociale qui gronde fait alors magnifiquement honneur à Mozart.
Patrick Sourd
La Flûte enchantée, de Mozart. Direction musicale Pablo Heras-Casado, mise en scène Simon McBurney. Festival Aix Lyrique au Grand théâtre de Provence, à Aix-en-Provence, jusqu’au 23 juillet. www.festival-aix.com
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