S’emparant de Détruire, dit-elle, Jean-Luc Vincent salue avec humour l’écriture de Marguerite Duras en offrant le rôle de la romancière à Anne-Elodie Sorlin, sa complice des Chiens de Navarre.
Retour en 1969. En voix off, Marguerite Duras parle de son film Détruire, dit-elle. C’est à travers sa parole que nous découvrons la feuille de route du spectacle à venir. Un rappel de son humour, de son rire de petite fille mutine, quand elle résume son propos par une histoire drôle dont la chute donne le vertige : “On casse tout et on recommence.”
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Avec Détruire, deux exfiltrés du collectif Les Chiens de Navarre sont à la manœuvre. L’auteure avait imaginé une histoire qui puisse être jouée au théâtre. Jean-Luc Vincent signe l’adaptation, joue et met en scène. Clope au bec, Anne-Elodie Sorlin y incarne une Marguerite Duras accompagnée sur le plateau par un jeune homme qu’on reconnaît comme jouant Yann Andrea. L’actrice, impayable en deus ex machina, s’amuse à contempler la fiction qui se déploie ; elle ne lâche pas ses personnages et tire les ficelles de l’imbroglio sentimental qui les rassemble.
Une comédie qui ne dira jamais son nom
Au départ, il s’agit de trois clients réunis dans un hôtel quasi désert. Elisabeth Alione, Max Thor et Stein nouent connaissance, avant qu’Alissa, la femme de Thor, puis Bernard, le mari d’Elisabeth, ne les rejoignent. Sur scène, le mystère de leurs échanges flirte avec les limites d’une comédie qui ne dira jamais son nom.
L’évidence jubilatoire du jeu d’Anne-Elodie Sorlin suffit à contenir nos rires. Qu’ils s’éprouvent amoureusement en jouant aux cartes au salon ou au croquet dans le parc, les figures durassiennes se frottent à un désir qui les aimante.
Presque imperceptiblement, Jean-Luc Vincent tire la pièce vers le cinéma de John Carpenter et de David Cronenberg. Evitant la partouze, la pièce s’imbibe avec élégance d’autres univers. Le subtil recours à une contamination devenue virale redonne au texte le ressort ludique d’une folie destructrice aussi radicale que contemporaine.
Détruire d’après Détruire, dit-elle de Marguerite Duras, mise en scène Jean-Luc Vincent, le 21 mars au Théâtre de Vanves (festival Artdanthé), du 21 au 23 mai à Dijon (festival Théâtre en mai)
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