Suite à la décision de la mairie UMP, début décembre, de fermer la Haute Ecole d’Art de Perpignan, une quinzaine d’étudiants opposés au projet interpellent les pouvoirs publics en se mettant en vente sur le net.
« Julie, 22 ans, Perpignan Bac S, MANAA. De grandes compétences, peut même être utilisée comme étagère. 1euro » ou « Anais, 22 ans, Perpignan Bac ES, BTS Commerce International, Beaux art Conceptrice de rond-points, spécialisée dans les cadrans solaires. 2980 euros ». On peut lire ces annonces sur les sites de vente en ligne Le Bon Coin et eBay, respectivement dans les catégories ameublement et art contemporain.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Fermement opposée à la décision de la mairie de fermer progressivement la Haute Ecole d’Art de Perpignan (HEART), établissement bi-centenaire installé rue Foch, une brochette d’étudiants a choisi d’utiliser Internet comme moyen de visibilité assorti d’un mélange de dérision et de provocation. « On cherche à montrer qu’on est encore vivants et que l’école est encore ouverte, malgré ce que peut faire croire la mairie », explique Pierre Akrich, un étudiant de l’école.
Trop cher, pas assez d’effectif
Autre objectif de ce coup de projecteur : réclamer plus de moyens à la municipalité pour maintenir l’école à flots « bien que le maire Jean-Marc Pujol pense que l’école coûte trop cher et qu’elle n’est pas rentable », souligne Pierre. La raison officielle invoquée par Michel Pinnell, adjoint au maire en charge de la culture, pour justifier la fermeture de l’école est le manque de financement à l’échelle locale. La réduction des budgets aboutit donc à des situations de crises mais aussi à des paradoxes comme la fermeture de la maison de l’emploi prévue pour la fin du mois, jugée elle aussi trop coûteuse, alors même que la ville atteint des taux de chômage record.
« En fermant l’école, le maire et son équipe vont récupérer un millions d’euros, ce qui les motive d’autant plus », déplore Pierre. En effet, l’HEART est financée à 90% par la municipalité et à 10% par la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles).
Une dotation en baisse de 11 milliards d’euros en trois ans
Selon Michelle Waquant, professeure à l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy, « dans le contexte actuel de baisse de dotations budgétaires aux collectivités territoriales à hauteur de 11 milliards d’euros sur trois ans, les collectivités puis, par ricochet, les municipalités sont asphyxiées et n’ont pas d’autre choix que de revoir leur politique économique envers des établissements culturels qu’elles financent ».
En l’occurrence, l’école des Beaux-Arts de Perpignan, en tant qu’EPCC (Etablissement Public de Coopération Culturelle), ne fait pas partie des sept écoles nationales et donc ne dépend pas directement du budget de l’État mais de celui de la ville. Et Michelle Vaquant de résumer « l’épisode de la probable fermeture des Beaux-Arts de Perpignan est une conséquence collatérale de la politique de coupes budgétaires du gouvernement mais pas une conséquence directe ».
Une pétition vise à interpeller la ministre de la Culture
En deuxième lecture, la raison invoquée par le maire et son équipe pour justifier cette fermeture est celle du regroupement des écoles d’art dans des pôles d’excellence dans les grandes villes. Or, c’est principalement ce que cherchent éviter à tout prix les étudiants de « petites » écoles pour préserver leur identité et exercer leur art librement. « L’enseignement artistique n’a pas de rapport avec l’enseignement universitaire. Nous avons besoin de rester indépendants pour continuer à exercer notre esprit critique, notre enseignement par la discussion ou la relation de proximité entre les profs et les élèves dans la transmission », souligne Pierre.
Il n’empêche, les procédures de fermeture de l’HEART sont entamées et la fin est programmée pour l’année 2016. Les discussions entre les élèves et l’adjoint au maire à la culture, Michel Pinell n’ ont rien donné pour l’instant.
Les élèves sont parvenus à provoquer le buzz et se rallier le soutien de plusieurs directeurs d’écoles d’art de toute la France (Montpellier, Nîmes etc). Ils ont aussi lancé une pétition qui vise à interpeller la ministre de la Culture Fleur Pellerin, et demande à l’ensemble des partenaires publics (ville, région et Etat) de diriger leur action collective vers la sauvegarde de l’établissement.
{"type":"Banniere-Basse"}