Levant le voile sur la vie des humanitaires, Tiago Rodrigues témoigne avec empathie sur ces volontaires qui refusent d’être considérés comme des héros.
Comment rendre compte de la barbarie humaine ? À Beyrouth, en septembre 1982, Jean Genet fait figure d’exemple avec son texte, Quatre heures à Chatila. Étant l’un des premiers à découvrir l’ampleur du massacre perpétré dans le camp de réfugiés palestiniens, il ne peut que s’interroger sur la manière d’exprimer un indicible qui ne peut qu’échapper à la représentation dans les médias.
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“La photographie ne saisit pas les mouches ni l’odeur blanche et épaisse de la mort. Elle ne dit pas non plus les sauts qu’il faut faire quand on va d’un cadavre à l’autre.” Tiago Rodrigues questionne le même sujet avec sa pièce Dans la mesure de l’impossible, en réunissant les témoignages de membres d’organisations humanitaires intervenant dans des zones de guerre. “Nous n’allons pas jouer ou illustrer des événements qui se sont déroulés là-bas, précise Tiago Rodrigues, non, nous allons raconter des événements que quelqu’un nous a racontés, et qui se sont déroulés là-bas. Nous ne faisons pas du théâtre documentaire mais un théâtre documenté.”
Les mondes du possible et de l’impossible
La pièce condense les confessions de quatre humanitaires suite à des rencontres avec l’auteur-metteur en scène et les acteurs chargés de les incarner. Retravaillé à partir du matériau brut des interviews, le texte final se libère des références aux conflits dont les récits rendent compte pour préférer décrire des situations devenant aussi intemporelles qu’exemplaires. Pour témoigner de l’irréconciliable présent de ces volontaires vivants entre deux réalités, Tiago Rodrigues préfère parler d’un mouvement de bascule entre “le monde du possible”, figurant nos sociétés où règne la paix, et “un monde de l’impossible”, désignant celui qu’ils parcourent lors de missions où plus aucune règle n’existe.
Créé sur le plateau de la Comédie de Genève, le spectacle nous entraîne vers l’ailleurs d’un paysage abstrait figuré par la toile blanche d’un chapiteau affalé, suspendu à mi-hauteur dans les cintres. Comme une sourde menace, les solos du batteur Gabriel Ferrandini évoquent la violence qui cerne en permanence ceux qui œuvrent à porter de l’aide et des soins. Aucun ne prétend être un héros… “On est un bout de sparadrap sur la souffrance humaine.” La grandeur de ces engagements tient alors à la valeur d’une humilité partagée par tous. Ils se savent incapables de réduire la faille qui sépare les deux mondes mais ils persistent à penser que sauver une vie est une bataille qui se gagne au jour le jour.
Dans la mesure de l’impossible, texte et mise en scène Tiago Rodrigues. Avec Adrien Barazzone, Beatriz Bràs, Baptiste Coustenoble, Natacha Koutchoumov et le batteur Gabriel Ferrandini.
Du 24 février au 5 mars, Théâtre national de Bretagne, Rennes. Les 10 et 11 mars, l’Equinoxe-Scène nationale de Châteauroux. Du 15 au 17 mars, CDN Orléans-Val de Loire. Les 25 et 26 mars, TPR-La-Chaux-de-Fonds. Du 29 au 31 mars, CDN Besançon Franche-Comté. Du 6 au 8 avril, Théâtre de la Cité-CDN, Toulouse. Du 12 au 14 avril, La Coursive-Scène nationale de La Rochelle. Le 29 avril, Théâtre des Salins-Scène nationale de Martigues. Du 4 au 6 mai, Le Maillon Théâtre de Strasbourg-Scène européenne. Du 11 au 14 mai, Théâtre du Nord CDN Lille-Tourcoing. Les 18 et 19 mai, Scènes du Golfe-Vannes. Du 16 septembre au 15 octobre à L’Odéon-Théâtre de l’Europe dans le cadre du Festival d’automne à Paris.
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