Viens, on part loin. Où ça ? Loin, loin des cieux ternes de la rentrée, des langueurs bétonnées implacables. Où ça ? En Lozère, pourquoi pas la Lozère. Et qu’irait-on y faire ? De l’art, par exemple, renouer avec le temps long de la création, en immersion et au contact de l’artisanat et du paysage. […]
En Lozère, la nouvelle résidence d’artistes Apiary invite les artistes contemporains à s’imprégner d’un contexte rural marqué par des savoirs-faire ancestraux et un rythme de vie dépitché.
Viens, on part loin. Où ça ? Loin, loin des cieux ternes de la rentrée, des langueurs bétonnées implacables. Où ça ? En Lozère, pourquoi pas la Lozère. Et qu’irait-on y faire ? De l’art, par exemple, renouer avec le temps long de la création, en immersion et au contact de l’artisanat et du paysage. On s’y croirait presque, non ? S’évader en Lozère, par procuration certes, mais à travers les yeux d’une artiste : c’est possible. Durant le mois de septembre, Les Inrocks s’associent à la résidence Apiary. Première résidence d’artiste territoriale en Lozère créée à l’initiative de l’association Happyculture, celle-ci entend sortir les plasticiens du cercle de l’art contemporain pour proposer une immersion en milieu rural. Dès 2018, l’atelier de filature d’Apiary qui accueille la résidence, hébergé au Musée Vivant de la Filature des Calquières à Langogne, ouvrira ses murs à trois artistes par un, dont un diplômé des Beaux-arts de Montpelier (MoCo), associé au projet. Là, ils composeront avec l’héritage historique et technique du territoire, marqué par un savoir-faire rare : la tapisserie.
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Contre le stress numérique, inventer des modes de vie alternatifs – et ruraux
La démarche est dans l’air du temps. On ne compte plus les articles célébrant le retour aux valeurs simples – forcément rurales et manuelles donc. Un néologisme a même été forgé pour désigner la mise au vert de ces anciens rats des villes : les « néo-ruraux ». Dans le champ de l’art, de nombreuses expositions dédiées à la céramique (Céramix à la maison rouge en 2016) ou aux bijoux (Medusa au MAMVP cet été, encore en cours) ont définitivement tordu le cou aux préjugés pesant sur l’artisanat. Au point que cet été, l’exposition Pré-capital au centre d’art La Panacée à Montpellier érigeait la tendance en mouvement de fond, explorant les « formes populaires et rurales dans l’art contemporain« . L’idée développée au fil des pièces des treize artistes ou duo d’artistes réunis en son sein ? Celle, relativement novatrice, d’une « décroissance artistique » dans les modes de production des artistes qui, se détachant d’une adhérence sans réserve à l’écosystème numérique, reviennent à des formes de production pré-industrielles. Pour les commissaires, Charlotte Cosson et Emmanuelle Luciani, associées au directeur du centre d’art Nicolas Bourriaud, les traditions populaires, savoirs-faires ancestraux et modes de vie ruraux constituent un véritable réservoir formel, voire un mode de vie alternatif.
Bianca Argimon : entre Jardin des Délices et open-space
En invitant l’artiste Bianca Argimon, la résidence Apiary se situe dans la continuité de ces réflexions, qu’elle ancre de surcroît dans la confrontation directe et en temps réel à un contexte de production spécifique : la collaboration avec Jacques Bernard, artiste lissier lozérien. Née en 1988 en Belgique, Bianca Argimon étudie à la Central Saint Martins à Londres, aux Arts Décoratifs à Paris et empoche son diplômée des Beaux-Arts de Paris avec les félicitations. Depuis, on a pu se familiariser avec son travail au gré d’expositions collectives l’an passé : au Salon de Montrouge dédié à la jeune création ou encore dans l’exposition Le Nouveau Monde Industriel à la Galerie Continua Les Moulins – dont nous rendions compte ici. En partant de faits historiques ou d’actualité, l’artiste insère des éléments fictionnels afin de redéfinir les normes morales et socio-politiques admises. Dans ses dessins minutieux, mais aussi des œuvres en volume ou en textile, le Jardin des Délices prend des allures d’open-space.
Cherchant à révéler les points de friction et les moments d’absurdité qui font grincer les rouages du quotidien, Bianca Argimon fait de l’information la matrice de saynettes en équilibre sur le fil de l’absurde. C’est depuis la résidence qu’elle nous fera pénétrer dans le secret de l’atelier et assister, semaine après semaine, à l’évolution de ses recherches. Dévoilant non seulement l’esquisse d’une nouvelle manière de travailler à l’orée du second millénaire, mais également un regard singulier sur l’actualité. Après la Slow Food, bienvenue à l’ère du Slow Art.
L’inauguration d’Apiary aura lieu au Musée de la Filature des Calquières à Langogne en Lozère, le dimanche 3 septembre 2017 à 11h00 (entrée libre).
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