L’expo-blockbuster au Grand Palais entend montrer l’influence du génial Pablo sur l’art contemporain. Une démonstration sans fond, aussi vaine qu’agaçante.
Tout et plus encore
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Sept ans après Picasso et les maîtres qui confrontait les œuvres de Picasso aux tableaux de Velázquez ou Rubens, le Grand Palais fait le chemin inverse en confrontant l’immense génie de Picasso aux créations actuelles. Ça commence très sobrement : à côté de l’autoportrait en bleu de 1901, un mur de vidéos et de courtes interviews d’artistes qui, de Jeff Koons à Agnès Varda, évoquent leur relation aléatoire à Picasso, faite de respect et de distance.
Mais dès la salle suivante, on passe à la logique du nombre et du fourre-tout. Sous l’intitulé “Salut l’artiste !”, l’expo mélange un mur de gravures collées les unes aux autres, d’artistes rendant hommage au peintre de Guernica. On se dit alors que la démonstration de la “Picassomania”, bien moins forte que la Duchampmania et la Warholmania, sera bien poussive.
Le n’importe quoi multimédia
L’un des objectifs de l’expo est d’ouvrir le grand public à l’art contemporain via la figure populaire et revisitée de Picasso. Ça marche par endroits : quand des artistes d’origine africaine reprennent le primitivisme des Demoiselles d’Avignon, dans une optique gender et postcolonial studies. Ou dans la salle consacrée au pop art, quand Warhol, Claes Oldenburg ou Roy Lichtenstein traitent le génie espagnol en icône populaire.
Mais à l’inverse de ces bonnes intentions, Picasso.mania donne parfois l’impression bizarre, et sans doute contraire aux vœux du commissaire Didier Ottinger, de nous faire passer du génie moderne au bazar du tout-image. La faute aux choix esthétiques, parfois arbitraires, anecdotiques ou faibles. Pour illustrer la vision cubiste par exemple, les photos-montages de David Hockney s’imposent avec évidence, mais certainement pas avec sa vidéo bien faible inspirée par Parade.
Plus loin, une production vidéo imite avec lourdeur les formes de l’art contemporain, par une superposition d’extraits de films, de spectacles de danse et de publicité Rolex évoquant la figure de Picasso. Ce serait donc cela, l’époque contemporaine : le basculement de l’art moderne dans la médiasphère, le n’importe quoi multimédia ? C’est Alain Finkielkraut qui va être content.
Salon à l’ancienne
On se rassurera en faisant remarquer que les œuvres de Picasso elles-mêmes ne sont pas mieux traitées, et pas toujours visibles à cause d’un abus de “mural”. Pourquoi mettre bord à bord vingt tableaux du maître sur le même thème (le cubisme, ou le portrait de la femme), quand un seul de ces chefs-d’œuvre, mieux mis en valeur, ferait plus d’effet ?
Ces murs de tableaux, certes inspirés par les accrochages de l’artiste dans ses ateliers, font un peu trop salon à l’ancienne, et forment une sorte de nuage dans lequel on ne voit pas grand-chose, sinon un effet de masse. Un comble pour une exposition, et le “cloud” du spectacle.
{"type":"Banniere-Basse"}