Avec des échos shakespeariens et un clin d’œil à Sarah Kane, Sophie Perez et Xavier Boussiron inventent l’histoire d’un roi des éléphants qui trie pour rire les petits et les grands.
Chacun dans son camp. Se séparer des enfants âgés de 7 à 11 ans avant d’entrer dans la salle est un premier pincement au cœur pour ceux qui sont venus assister en famille à Babarman, mon cirque pour un royaume, la dernière création de Sophie Perez et Xavier Boussiron.
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Pour découvrir un spectacle qui leur est entièrement dévolu, les petits devront attendre dans le hall, avant de gagner un chapiteau planté sur le plateau. Dès qu’ils accèdent à la salle, les ados et les adultes ont un droit de regard sur la scène et les coulisses à vue où les acteurs finissent de se déguiser en trompant l’ennui aux tables de maquillage, face à des portants chargés de costumes et autres masques grotesques.
On rit jaune dans la salle
Affublés d’une collerette de pétales pour jouer les fleurs des champs, de deux énormes coquards pour faire le panda géant ou d’une trompe et d’une couronne pour incarner le roi des éléphants, ceux qui espéraient devenir les histrions d’un théâtre “élitaire pour tous” en mémoire d’Antoine Vitez se retrouvent, vieillis sous le harnais, à courir le cachet en faisant les clowns.
Entre deux vannes douteuses, cette bande de nostalgiques du “théâtre de texte” commencent par casser l’ambiance. Se chauffant la voix sur le monologue de 4.48 Psychose – “J’ai gazé les Juifs, j’ai tué les Kurdes, j’ai bombardé les Arabes, j’ai baisé des petits enfants qui demandaient grâce…” –, ils précisent que cette ultime saillie de Sarah Kane précède son suicide par pendaison avec les lacets de ses baskets, à 28 ans, dans les toilettes. Autant dire qu’on rit jaune dans la salle, quand le groupe des gamins arrive enfin.
La farce a ses deux faces
A travers les fumées d’un son et lumière relevant du tapage nocturne, nous n’aurons que des échos lointains de ce qui se joue sous le chapiteau. Même s’il est maintenant de notoriété publique qu’il s’agit d’un conte où l’éléphant Babarman, fatigué du pouvoir, laisse le trône à un autre lui-même version Mini-Me, pour mieux entuber le peuple de son royaume de fantaisie…
Chaque sortie d’un des baltringues qui officient dans le Saint des Saints – dont nous sommes exclus –, est un prétexte pour faire monter la pression, tel le show de Stéphane Roger en larmes se moquant d’un prétendu bambin qui affirme détester André Breton et le surréalisme et s’indigne qu’on puisse se déguiser en un énorme grain de café pour tenter de le faire rire. On l’aura compris, la farce a ses deux faces, l’une s’amuse de la panique des grands, l’autre se réjouit d’assouvir les bas instincts des petits.
Babarman, mon cirque pour un royaume conception, texte et scénographie Sophie Perez et Xavier Boussiron, avec Sophie Lenoir, Gilles Gaston-Dreyfus, Stéphane Roger, Marlène Saldana, Françoise Klein et Danièle Hugues, du 12 au 21 mai à Nanterre-Amandiers
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