Dans cette création née en 2005, le Britannique invite chaque soir un·e nouvel·le interprète. Un spectacle qui se retrouve un peu dépassé par sa propre mécanique.
Jeudi 6 juillet à Avignon (Vaucluse), sous les arches verdies du Cloître des Célestins, l’heure du lever de rideau a sonné pour l’acteur, auteur et metteur en scène britannique Tim Crouch. Lui qui a déjà conquis les esprits outre-Manche avec My Arm (2002), England (2007) ou encore The Author (2009), présente enfin dans l’Hexagone son très célèbre An Oak Tree. Une pièce qui, depuis sa création en 2005, a déjà connu près de 360 versions et tout autant d’interprètes. Pour la 77ème édition du Festival, l’anglais entend, via ses invité·es, apporter un nouveau souffle à sa pièce et peut-être conquérir le très exigeant public avignonnais.
Tim Crouch commence par exposer les règles du jeu de sa proposition. Chaque soir, il invite un·e nouvel·le interprète à le rejoindre sur scène. Tout comme le public, iel ne sait rien de ce qui va se dérouler la prochaine heure. Si le script est le même, la représentation elle, reste une performance unique. An Oak Tree est avant tout une histoire de confiance, comme le souligne son auteur. Une rencontre aussi avec son invité·e, même si la préparation se résume à une heure passée ensemble avant le début du spectacle. Un duo s’instaure alors entre l’interprète et celui qui devient à la fois un guide et partenaire de jeu. Un cocktail surprenant qui permet de multiplier les niveaux de lecture – de quoi perdre la tête, le tout à la sauce d’un humour très anglais.
Tentative de co-construction d’un récit
An Oak Tree est l’histoire d’un deuil à travers la complexe réparation d’un homme qui a perdu sa fille dans un accident de voiture. Il la voit à présent réincarnée dans un chêne planté au bord d’une route. Ce 6 juillet, sur scène, la comédienne du jour caresse et enlace un arbre imaginaire : les doigts de Natacha Koutchoumov, qui ouvre la série de représentations à Avignon, s’accrochent aux irrégularités d’une écorce devenue peau. Plus que tout, la pièce se veut une performance intime se jouant de l’inédit et de la spontanéité d’un texte découvert sur le moment.
Un défi de lâcher prise, sans doute, pour l’interprète choisie. Dans son ombre à elle se cache en miroir l’œil du public. Tentative de co-construction d’un récit, An Oak Tree se retrouve sans doute un peu dépassée par sa propre mécanique, au risque de passer à côté de son sujet, le deuil, dilué sous la mise en abyme. De cette thérapie de groupe on retient surtout la performance précieuse d’une comédienne mise à nue dans sa vulnérabilité. Limitée par les instructions d’un Tim Crouch qui peine à s’effacer, la liberté de jeu en pâtit, et, en conséquence, le public semble prendre racine.
An Oak Tree, création de 2005. Écrite, mise en scène et interprétée par Tim Crouch accompagné d’un·e nouvel·le invité·e chaque soir : Teresa Coutinho, Adama Diop, David Geselson, Natacha Koutchoumov, Cynthia Loemij, Vítor Roriz. Jusqu’au 11 juillet au Festival d’Avignon, à 22h00, au Cloître des Célestins. Spectacle en anglais surtitré en français.
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