Ils sont onze “jumpers”, dix garçons et une fille, à venir se placer silencieusement sur le plateau, lentement, un par un, en bombers flashy, jeans et baskets. Une intro étirée avant l’explosion sonore et visuelle d’une tornade de danseurs lancés dans une séquence de jumpstyle où la répétition des sauts se complexifie en une série […]
Ouverture trépidante à la Biennale de Charleroi danse pour cette première édition dirigée par Annie Bozzini avec l’étourdissant Jumpstyle de To Da Bone du collectif (La)Horde.
Ils sont onze “jumpers”, dix garçons et une fille, à venir se placer silencieusement sur le plateau, lentement, un par un, en bombers flashy, jeans et baskets. Une intro étirée avant l’explosion sonore et visuelle d’une tornade de danseurs lancés dans une séquence de jumpstyle où la répétition des sauts se complexifie en une série de variations qui modifient en permanence leur position sur le plateau. Fulgurance et précision. Rapidité et fluidité. Tourbillons aériens et chocs sonores des bonds sur le sol. Une énergie brute couplée à un vocabulaire gestuel bluffant par sa diversité stylistique et sa technicité.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
C’est avec cette intro que le collectif (La)Horde créé en 2011 par Marine Brutti, Jonathan Debrouwer et Arthur Harel a remporté le 2e prix du concours de Danse élargie en 2016. To Da Bone créé pour l’ouverture de la Biennale de Charleroi Danse, en élargit le principe tout en allant jusqu’à l’os de ce projet un peu fou qui consiste à faire sortir de la toile d’internet un style de danse qui s’y développe par des danseurs isolés aux quatre coins de l’Europe ou du Canada depuis les années 2000 pour l’amener sur une scène.
Solos, duos ou trios se détachent progressivement du groupe et la personnalité de chaque jumper s’exprime sur les musiques techno-hardcore à l’origine de cette danse née dans les clubs hollandais et belges. TO DA BONE leur donne la parole et le plateau résonne bientôt de voix russe, ukrainienne, hongroise, italienne, allemande ou française, chacun racontant sa découverte du jumpstyle, son initiation avec des tutoriels et leur rencontre, d’abord virtuelle, via leurs vidéos postées sur YouTube, puis physiques lors de rassemblements. C’est ainsi que les styles évoluent et la pièce combine plusieurs de ses variantes : “oldstyle”, “hardjump”, “tekstyle” ou “hakken”.
On les découvre lors d’une séquence où l’improvisation gestuelle se mêle aux paroles. Et les images projetées de leurs vidéos sur un écran de toile blanche se croisent avec la captation en direct de leurs démonstrations. Pour (La)Horde qui n’aime rien tant que convoquer “des communautés d’individus en marge de la culture majoritaire pour un bout de chemin solidaire et artistique”, les jumpers incarnent “une danse populaire ‘post-internet’ qui émancipe et fédère. Le terme post internet est un néologisme que nous avons emprunté directement à l’art contemporain. C’est un terme qui correspond vraiment à notre pratique. Il ne s’agit pas seulement de situer notre collectif de manière chronologique sur une timeline ou d’expliquer que nous nous inspirons de vidéos vues sur internet pour créer du geste. Mais plutôt de comprendre que le corps est impliqué différemment aujourd’hui dans des espaces online et offline, en 3D et en 2D.”
https://vimeo.com/218588883
Là réside justement le coup de force d’un spectacle qui réunit tous ces jumpers pour la première fois sur une scène en combinant leurs expériences pour les faire passer du statut d’amateurs isolés à celui de professionnels réunis par une même détermination : terrasser le piétinement mortifère d’une société à bout de souffle en lui opposant le bondissement survolté d’un mouvement de résistance. Un signal fort donné par Annie Bozzini pour son arrivée à Charleroi Danse plébiscité par un public enthousiaste et chaviré par ce shot d’énergie folle et contagieuse.
Fabienne Arvers
Biennale de Charleroi Danse, du 27 septembre au 14 octobre.
ToDa Bone, (La)Horde, le 28 septembre à Charleroi. Le 7 octobre, salle Hébert à Paris, dans le cadre de la Nuit Blanche. Les 2 et 3 février à la MAC de Créteil.
{"type":"Banniere-Basse"}