L’âge de l’engagement et de l’amour, à l’instar de la “Revue rouge” et de “Pauline à la plage”, deux belles réussites parmi la vingtaine de spectacles proposés.
“Puisque le feu et la mitraille
Puisque les fusils et les canons
Font dans le monde
Des entailles
Couvrant de morts les plaines et les vallons
Puisque les hommes sont des sauvages
Qui renient le dieu Fraternité
Femmes debout
Femmes à l’ouvrage
Il faut sauver l’humanité !”
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La musique est de David Lescot, les paroles sont de Montéhus, enfant de la Commune, révolutionnaire cocardier et chansonnier engagé du début du XXe siècle. Sur scène, la gouaille cristalline de Norah Krief porte haut les mots cinglants et féministes de La Grève des mères qui fut interdite en 1905 par décision de justice et Montéhus condamné pour incitation à l’avortement…
Chants de batailles et chants d’assauts, chants populaires et chants de luttes, hymnes révolutionnaires, rouges et engagés : La Varsovienne, L’Appel du Komintern, Die Solidarität, Le Front des travailleurs… écrites par Bertolt Brecht, Hans Eisler, Paul Vaillant-Couturier, Arthur Honegger, Darius Milhaud… rassemblés par Norah Krief et David Lescot pour cette Revue rouge, portent en eux une trace du siècle passé et de ses combats, de notre histoire et de notre culture.
Mais c’est sans folklore, frontalement rock, toujours arrachés à l’espoir d’un monde meilleur, vibrants donc, comme Norah Krief, micro en pied perchée sur un haut tabouret et gainée de cuir, animée comme si elle chantait dans un mégaphone hissée en haut d’une barricade, que ces chansons populaires agissent, surgissant de l’enfance et de l’histoire, comme des révélateurs de consciences. Elles donnent du souffle.
La grâce de Rohmer en scène
Au cinéma à la pesanteur théâtrale d’Eric Rohmer, le collectif Colette donne une légèreté toute cinématographique en portant à la scène le scénario de Pauline à la plage. Marion invite sa jeune cousine Pauline à passer la fin de l’été avec elle sur la plage près de Grandville, elles y rencontrent un ancien flirt de Marion, Pierre, qui les présente à Henry, un ethnologue désabusé. Pierre est amoureux, aigre et sans espoir, de Marion. Marion est charmée par la désinvolture d’Henry tandis que Pauline découvre les jeux de l’amour avec Sylvain, un garçon de son âge.
Sans ironie aucune, oscillant entre faux désirs et vraie indifférence, tout l’arrière-plan du cinéma de Rohmer déboule avec une fraîcheur intacte et pertinente en avant scène, aiguillonnée par une fausse naïveté éclairée. Car, si les interprètes du Collectif Colette ne peuvent pas jouer de la candeur de ceux de 1983, ils savent en revanche saisir la beauté et la profondeur du discours amoureux de Rohmer pour s’en amuser avec la distance qui les sépare des années 70 et retrouver la tendre et joyeuse cruauté qui anime autant le film que le spectacle qu’ils viennent d’inventer.
Revue rouge, de David Lescot et Norah Krief, à Besançon, les 2 Scènes, le 17 décembre 2015
, à Paris, le Monfort Théâtre, du 7 au 13 janvier 2016, à
Châteauvallon les 20 et 21 mai 2016.
Pauline à la plage, du collectif Colette, du 9 au 12 février 2016 au Théâtre de Vanves, du 13 au 14 février 2016 au Théâtre de la Commune, Aubervilliers
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