Photos, lettres, tube de dentifrice et autres restes étranges de votre relation amoureuse ratée s’affichent dans un nouveau musée à Los Angeles. Un moyen de tourner la page ou de satisfaire ses pulsions voyeuristes ?
Vous venez de vous séparer. On peut dire sans exagérer que vous avez déjà connu des jours meilleurs. En rangeant votre chambre, vous retombez sans le vouloir, sur de vieilles affaires qui vous rappellent l’autre. Une photo, une lettre, une bague… La question se pose alors inévitablement : faut-il jeter ces souvenirs ? Les laisser dans un coin prendre la poussière… ou les exposer aux yeux de tous ?
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L’idée peut à première vue sembler curieuse. C’est pourtant bien ce que propose le musée des Relations brisées (Museum of broken relationships) qui vient de s’ouvrir à Los Angeles, sur l’une des plus célèbres artères de la ville, Hollywood Boulevard. Quelques mois avant, l’établissement avait lancé un appel aux dons sur son site internet, encourageant chacun à envoyer les vestiges d’une relation passée. Ce concept original s’inspire d’une première exposition consacrée aux histoires d’amour ratées, ouverte en 2006 à Zagreb en Croatie.
A quelques mètres du clinquant Walk of Fame, se dresse un espace aussi épuré que discret. A mille lieux des enseignes tapageuses qui accueillent, chaque jour sur le boulevard, leur lot de touristes. Dans cette galerie, pas de tableau, ni de sculpture exposé mais des dizaines de babioles en tout genre, à première vue sans grande valeur. En tout cas pour nous. Un costume de pom-pom girl, une robe chinoise, des flacons vides de parfum, une mandoline… Cette surprenante collection représente un petit échantillon des dons collectés par le musée depuis février.
“On s’attendait à en recevoir vingt ou trente. Finalement on a récolté trois cents objets venant des quatre coins du monde, ça a été un vrai succès” sourit la directrice Alexis Hyde.
La réussite est telle que l’établissement va renouveler sa collection tous les six mois, permettant de donner une visibilité à tous les dons. Des lettres, une alliance et… un pot de cornichon.
© Marie campistron
Du pot de cornichon aux implants mammaires
Se balader entre les différents objets de la galerie offre une sensation assez étrange, celle un brin voyeuriste mais plaisante, de s’immiscer dans l’intimité d’inconnus. Chaque élément exposé s’accompagne d’une note anonyme rédigée par le donateur. Seuls peuvent être indiqués un lieu et quelques dates situant la relation. Bien sûr, on retrouve les lettres romantiques et froissées, les journaux raturés et l’alliance enlevée. Mais beaucoup d’objets surprennent à l’image d’un tube de dentifrice entamé, d’une collection de magazines Playboy, ou encore d’un panneau de signalisation. La palme de l’originalité revient certainement à cette femme qui a fait parvenir au musée ses implants mammaires, après s’être séparée de son mari qui l’avait poussée à se faire opérer.
Certaines histoires prêtent à sourire, comme celle justifiant la présence étonnante d’un pot de cornichons : “Je voulais en faire cadeau au premier garçon dont je pensais être amoureuse (…). Lors de notre premier rendez-vous, il m’avait dit qu’il adorait les cornichons. Il a arrêté de répondre à mes messages, avant que j’ai pu avoir la chance de les lui offrir.”
D’autres anecdotes laissent au visiteur un goût plus amer : “Ce fer a servi à repasser mon costume de mariage. C’est aujourd’hui tout ce qu’il reste de ce dernier” explique dans un style lapidaire, une note située à côté de l’appareil. Exposer son passé, une catharsis ?
© Marie campistron
Se libérer du passé
Bien sûr les histoires diffèrent : en parcourant la galerie, on se mêle aux histoires d’amour ratées, aux déceptions amicales, au deuil familial. Pourtant, les mots justifiant ces dons restent souvent les mêmes : “Je n’arrivais pas à m’en débarrasser”, “je pense que ce musée est le meilleur endroit pour y laisser mes souvenirs”.
Pour Alexis Hyde, cette exposition représente un moyen pour certains de se libérer des souvenirs d’un passé douloureux :
“Je suis convaincue qu’il y a dans cet acte de donner, un effet cathartique. Beaucoup de personnes m’ont affirmé qu’elles se sentaient mieux, qu’elles voulaient tourner la page tout en participant à un projet qui pourrait peut être aider d’autres personnes en souffrance. Car au final, on est tous pareils. Peu importe notre origine, notre âge ou notre milieu, on passe tous par là”.
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