La Fondation Beyeler revient sur l’histoire du légendaire almanach édité par Wassily Kandinsky et Franz Marc à Munich en 1912, « Der Blaue Reiter ». Un moment décisif de l’histoire de l’art moderne, ici magistralement évoqué à travers la redécouverte de toiles magnifiques, notamment celles peu connues en France de Marc.
En 1912 à Munich, Wassily Kandinsky (1866-1944) et Franz Marc (1880-1916) publiaient leur almanach Der Blaue Reiter (le Cavalier bleu), considéré dans l’histoire de l’art comme un geste fondateur de la modernité. Ce recueil de textes et d’images hétéroclites, comme une œuvre d’art totale regroupant toiles, dessins d’enfants, partitions musicales, images votives, œuvres d’Afrique et d’Asie… défendait une idée forte dont la puissance subversive paraît aujourd’hui nécessaire à relancer.
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Ses auteurs voulaient œuvrer à la transformation de l’art, mais aussi des modes d’existence, en déplaçant les langages et les modes de représentation du monde, mais aussi en ouvrant les frontières, en appelant à une vraie “internationale” des arts, à la fois politique et esthétique.
“Le principe internationaliste est le seul possible ; l’œuvre entière, ce qu’on appelle l’art, ne connaît pas de frontières et pas de peuples, elle ne connaît que l’humanité », affirmaient Kandinsky et Marc.
C’est cette formidable épopée de l’avant-garde artistique du début du siècle, fracassé par la guerre de 1914, que l’exposition de la sublime Fondation Beyeler de Bâle propose de découvrir, à travers 70 tableaux de Kandinsky et Marc, mais aussi d’August Macke, Gabriele Münter et Alexej von Jawlensky, tous membres d’une communauté d’artistes libérés, échappant aux règles fixes de collectifs comme, à leur époque, les Futuristes ou Die Brücke.
Un élan vital brisé par la guerre
Le parcours fluide et chronologique de l’exposition révèle le passage progressif des peintres de la figuration vers l’abstraction et la non-objectalité. Et surtout le chemin vers une pure libération de la couleur, inspirée par les paysages préalpins de Bavière, décor de leur vie.
Chez Jawlensky, un nuage se transforme en une pure surface orange lumineuse ; chez Marc, un cheval exhibe le bleu étincelant de sa crinière, contrastant avec le jaune du blé dans la prairie. Chez Kandinsky, l’affranchissement vis-à-vis de la figuration s’accomplit pleinement, comme dans ses incroyables Compositions et Improvisations.
De ce nouveau traitement chromatique, de cette dynamisation de la toile par la grâce des moyens picturaux, de cette volonté aussi de promouvoir un art “synesthésique”, excédant les frontières disciplinaires, l’exposition témoigne sensiblement. A l’image du cheval bleu de Marc qui s’élance, l’élan vital de ce mouvement d’avant-garde, brisé par la guerre, reste l’un des grands souffles de la modernité dont l’écho lointain vibre toujours un siècle plus tard.
Fondation Beyeler à Bâle, jusqu’au 22 janvier 2017
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