Le premier week-end d’octobre, Paris a rendez-vous avec la nuit, avec l’art et avec la dérive. Organisée cette année du 6 au 7 octobre, la Nuit Blanche fait sauter les verrous de lieux habituellement inaccessibles au public. Notre sélection d’événements à ne pas rater.
Jamila Johnson-Smalls au Théâtre de la Ville
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On la découvrait l’an passé au Palais de Tokyo. La première rencontre avec Jamila Johnson-Smalls, personne ne l’oublie. Lors du festival de performances Do Disturb puis lors de sa résidence entre les mêmes murs dans le cadre de La Manutention, son magnétisme séduisait, troublait et déstabilisait. A 31 ans, la danseuse et chorégraphe londonienne est l’une des étoiles montantes de la danse contemporaine. L’art contemporain raffole de ses performances dark, où les corps mis en transe expriment les environnements de chaque danseur. Visibilité des corps racisés, codes de survie en milieu urbain et grâce chamanique se mêlent et réinventent une archive des gestes du présent. « Je crois vraiment que c’est une nana qui va avoir un avenir incroyable« , s’enthousiasme Gaël Charbau, commissaire de la Nuit Blanche 2018. « J’ai donc décidé de la placer le temps d’une nuit à l’endroit où elle est légitime : au Théâtre de la Ville« . Sous le nom Last Yearz Interesting Negro, elle viendra montrer son spectacle I ride in colour and soft focus.
99 vêtements populaires à l’Hôtel de Ville
Maintenant que les défilés sont diffusés en streaming et rassemblent des audiences de matchs de foot (locaux, les matchs, mais quand même), la plupart ont en tête les images du hall de l’Hôtel de Ville transformé en catwalk pour les grands défilés. Agnès B, Balmain, Lanvin y ont envoyé leur armée de créatures déterminées porter haut les couleurs de leurs marques respectives. Décidé à twister les choses, la Nuit Blanche y invite un autre projet mode, mais solidaire et populaire celui-ci.
« Andrea Crews est une marque créée par l’artiste et designer Maroussia Rebecq. Elle a été l’une des premières en France à porter un mouvement de mode solidaire, à parler d’upcycling« , raconte Gaël Charbau, qui la dit « pile dans l’air du temps« . Que verra-t-on concrètement, sous les ors de la République ? Des silhouettes créées à partir d’une sélection de vêtements du quotidien remixées en nouvelles silhouettes toutes les heures. Qui seront ensuite disponibles à la vente en exclusivité sur le site Leboncoin.
Philippe Quesne et Laurent le Deunff au Parc zoologique de Paris
C’est l’un de ces projets pour lesquels l’équipe de la Nuit Blanche elle-même avait cessé de croire. A en croire Gaël Charbau, dieu sait s’il y en a eu. Mais celui-ci revêt tout de même une valeur symbolique particulière. Quand bien même les artistes seraient certes de drôles d’animaux, investir le Zoo semblait équivaloir à tracer des plans sur la comète. Et pourtant, nous y voilà : le Zoo participera bel et bien pour la Nuit Blanche pour la première fois depuis la création de l’événement en 2002.
Dans le rôle du zèbre et du tigre ou de tout autre animal sauvage (on ne leur a pas demandé leur animal totem) : Philippe Quesne et Laurent le Deunff, respectivement metteur en scène et artiste. Direction le Grand Rocher, construction en béton armé des années 1930, pour faire l’expérience d’une balade immersive en son et lumière évoquant des récits de science fiction à la Jules Vernes, tandis que des effigies d’animaux se cacheront bien dissimulées dans le décor.
Tarik Kiswanson et Charlotte Moth au Petit Palais
Les musées de la ville eux-aussi veillent tard pour l’occasion. Tandis que certains choisissent de dévoiler leurs expositions en cours gratuitement et nuitamment de 20h à 1h (Alphonse Mucha au Musée du Luxembourg, les Nymphéas de Monet au Musée de l’Orangerie, Miro et Eblouissante Venise au Grand Palais), d’autres s’ouvrent à des installations temporaires d’artistes contemporains. C’est le cas du Petit Palais qui accueillera en duo les artistes Charlotte Moth et Tarik Kiswanson.
Les deux interagiront avec le contexte. La première en présentant sa vidéo La Réserve présentée au Prix Marcel Duchamp en 2017, déambulation dans l’espace de stockage d’un musée peuplé de statues silencieuse ici présenté en projection format XXL. Le second avec une nouvelle pièce associant deux statues de mannequins d’enfant en bronze, l’un noir, l’autre composé d’une marqueterie de couleurs de bronze, principaux protagonistes d’une pièce sonore qui fera résonner l’espace d’un dialogue hanté sur les frontières, l’identité et l’impossible appartenance.
TV DOC au Palais de la Découverte
Non loin de là, le DOC, lieu autogéré de production et d’exposition installé dans un ancien lycée technique du XXe arrondissement, proposera sa propre émission télévisée : Station Mire. Soit une « programmation interactive et critique » déroulée au fil de 12h de JT, reportages, envoyés spéciaux, météo, télé-achat, pubs, clips, débats.
Tout le vocabulaire, les codes et les clichés d’une certaine télévision publique en train de tomber en désuétude… voila de quoi s’empareront les équipes de TV DOC, dans la grande tradition des artistes perturbateurs des ondes, de Chris Burden à Gerry Shum. Tournée en direct depuis les locaux du DOC, Station Mire sera visionnable en direct au Palais de la Découverte.
Thanks for Nothing sur le pont Alexandre III
Entièrement piéton, le pont Alexandre III se transforme en scène confiée à la programmation du collectif Thanks for Nothing, plateforme philanthropique lancé l’an passé avec une vente aux enchères et une exposition au Palais de Tokyo dont les bénéfices étaient reversés à une association venant en aide aux réfugiés.
Cette année, l’événement met en lumière une scène de jeune artistes, performeurs et danseurs réunissant au total dix artistes. Dont Laure Prouvost (qui représentera en mai la France à la Biennale de Venise), le danseur et chorégraphe Noé Soulier, l’ancienne danseuse étoile Marie-Claude Pietragalla ou encore le vidéaste Melik Ohanian – comme nous l’évoquions déjà entre nos colonnes ici.
La Société des Arts Technologiques de Montréal à la Gaîté Lyrique
Enfin, dans un écrin plus intime, la Gaîté Lyrique accueille la Société des Arts Technologiques, un centre transdisciplinaire de recherche et création dédié à la culture numérique, son développement et sa conservation. Étendant la nuit jusqu’à dimanche 16h, on y retrouvera des expériences en réalité virtuelle et réalité augmentée, des performances forcément immersives explorant mouvement, vitesse et architecture, ainsi que des DJ et VJ-set de minuit à 6h du matin.
Un bon point de chute après avoir vagabondé au gré des diverses constellations sensorielles qui se déploieront à travers Paris pour l’une des éditions les plus fournies de l’événement marquant à Paris l’entrée dans le mois de l’art, à quelques semaine avant le début de la FIAC.
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