Ne plus jamais prendre l’avion ou ne pas avoir d’enfant, voici quelques-unes des questions que se pose cette jeune militante pour l’environnement.
A l’occasion de la grève mondiale pour le climat, ce 15 mars 2019, Les Inrocks donnent la parole à de jeunes idéalistes qui apportent une réflexion personnelle et singulière sur l’engagement éthique.
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Zoé Chalumeau, passée par l’école de commerce EM Lyon avec une spécialisation dans la finance, se dirige aujourd’hui vers l’investissement à impact social. En parallèle, elle a mis en place tout un style de vie contemporain, mais radicalement repensé pour agir sur le micro et le macro.
Quelles pratiques green avez-vous mis en place dans votre vie ?
J’ai décidé de ne plus prendre l’avion pour voyager parce que c’est extrêmement polluant – 40 à 300 fois plus polluant que le train, 10 à 20 fois plus que le car. Je me suis dit que je m’autorisais uniquement six heures d’avion par an, au grand maximum, en cas d’urgence. Le week-end dernier, je suis allée à Berlin. J’ai pris le car à l’aller et le train au retour. C’était un peu plus cher que les billets d’avion ce qui est assez délirant, mais au moins ma conscience écologique se portait bien. Je me dis donc que si je veux être cohérente avec ce que je pense et ce que je dis, il faut vraiment arrêter ce petit plaisir coupable de l’avion, d’autant que j’ai eu l’occasion de beaucoup voyager dans ma vie. Je me rends compte que je peux passer d’aussi bonnes vacances en France avec des amis ou à faire une retraite de yoga qu’en allant dans des hôtels au bout du monde, sans vraiment rencontrer des gens sur place. On est vraiment dans une ultra consommation du voyage, horrible, liée à la culture des réseaux sociaux.
Pouvez-vous retracer la genèse de votre engagement écologique. Quelle philosophie générale défendez-vous ?
J’ai commencé par être végétarienne, il y a un an. Je mangeais déjà peu de viande, et j’ai emménagé à Berlin où tu peux manger végétarien dans tous les restaurants. Je me suis ensuite renseignée sur l’industrie. J’ai été convaincue qu’il fallait vraiment que j’arrête définitivement de consommer du poisson ou de la viande. Ensuite, je suis partie en échange académique à Vancouver, où ils sont assez en avance sur l’écologie. Je me suis aussi beaucoup renseignée sur le développement durable, les pratiques au quotidien pour réduire son empreinte… Je passais souvent par des phases d’angoisse en me disant que l’on courait vraiment à la catastrophe et que c’était fou que plein de gens ne s’en rendent absolument pas compte. Maintenant j’ai dépassé ce stade parce que je réalise plusieurs choses :
Premièrement, à mon échelle, ce ne sont pas les petits gestes écolos-bobos qui vont changer le monde, le plus important c’est vraiment d’en parler autour de soi et de s’engager à plus grande échelle via des associations ou son travail. J’essaie de ne jamais être dans la culpabilisation auprès de mes proches parce que cela ne sert à rien, mais plutôt d’essayer de trouver en chacun la valeur qui fera qu’ils seront sensibles à l’écologie et au développement durable.
Deuxièmement, en soi, je pense qu’il est clair qu’aujourd’hui on va connaître des bouleversements énormes, et que la prise de conscience, les changements de mode de vie ne vont pas du tout être assez rapides. Donc, cela ne sert à rien de passer sa vie à s’angoisser pour ça, il faut juste essayer d’en être conscients et d’avoir un impact à son échelle parce que finalement…
Le changement doit passer par les politiques et les entreprises ! Il faut une énorme prise de conscience au niveau global, que cela devienne la priorité numéro une des politiques et des entreprises, que l’on arrête d’être dans une priorisation du profit et de la croissance. Je pense aussi que la croissance capitaliste telle qu’on la connaît a échoué à réduire les inégalités sociales et qu’il faut aujourd’hui que l’on vise une croissance zéro. Ou sinon, une croissance qui soit au service de davantage d’égalité sociale… vaste programme ! En bref, je pense que c’est important qu’au niveau de la société, on change nos modes de vie, car cela permet une prise de conscience générale.
Quelles actions menez-vous au quotidien ?
Je suis végétarienne depuis un an, je n’achète que des produits de saison locaux au marché, et quelques trucs en plus au supermarché. Je fais tous les gestes écolos-bobos de base : trier, aucun achat de vêtements neufs – dur pour l’accro au shopping que j’ai pu être, mais “youhou“ les friperies et les brocantes, et le style vintage ! –, limiter au maximum le plastique, les emballages, avoir toujours sa gourde, se désabonner de ses newsletter – les mails sont hyper polluants –, prendre les transports en commun, etc. Je suis allée manifester avec les jeunes pour le climat à Paris, il y a deux semaines. Je vais aller à la marche pour le climat, la semaine prochaine. J’aide des associations comme Aremacs à Lyon et Surfrider. Au quotidien, comme je te le disais, j’essaie d’en parler un maximum autour de moi. Au niveau professionnel, j’ai décidé d’orienter ma carrière vers ça en travaillant en “impact investing”. Ce sont des fonds qui investissent dans des entreprises qui ont un impact social ou environnemental au sens large. Je cherche surtout des fonds qui investissent dans des entreprises en lien avec la transition écologique et l’environnement – bon, après, c’est très récent comme type de fonds, il y en a une dizaine en France, donc j’espère que j’y trouverais un stage quand même. Là, j’ai aussi suivi un Mooc en ligne sur le réchauffement climatique et un cours à l’EM Lyon sur “les systèmes de pensée et le développement durable” pour développer mes connaissances sur le sujet et savoir vraiment de quoi je parle.
Pourquoi est-ce que la Génération Z se sent-elle si investie dans la cause environnementale ?
Notre génération y est particulièrement sensible parce que l’on se rend compte que cela va nous toucher très directement et dans un horizon temporel très court. 2050 c’est dans 30 ans, nos enfants en auront 20 à ce moment là – si l’on décide d’en avoir, pour le moment je me dis que ce n’est pas écolo ! – et qu’il y aura très concrètement des guerres pour les ressources, des villes qui auront disparu avec la montée des eaux… En 2050, il y a aura un milliard de réfugiés climatiques : c’est énorme et ça va entraîner des bouleversements géopolitiques et économiques énormes. Donc, c’est angoissant, et ça nécessite des réponses urgentes (…). J’imagine que l’état actuel de la planète me renvoie à plusieurs peurs : peur d’un monde bouleversé, de la mort peut être aussi quelque part, des scénarios catastrophistes…
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