Sur le chemin de la présidentielle pour laquelle l’actuel chef d’état brigue une troisième candidature contestée, et à moins d’une semaine du premier tour, le nombre de morts et de blessés ne cesse d’augmenter. Parmi ces derniers, le chanteur Youssou N’Dour, touché à la jambe, d’après son entourage, lors d’une manifestation interdite de l’opposition ce mardi à Dakar.
(De Dakar) Comme plusieurs de ses concitoyens depuis le début de la campagne présidentielle sénégalaise, le chanteur Youssou N’Dour a été blessé ce mardi lors d’une manifestation. Lui, l’un des Sénégalais les plus connus au monde, à qui le Conseil constitutionnel avait refusé la candidature le 27 janvier dernier pour cause de manque de signatures valides, s’était, encore une fois, présenté à une manifestation interdite du Mouvement du 23 juin (M23), le collectif regroupant les opposants de Wade et une partie de la société civile.
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Ce mardi 21 février l’opposition avait, une fois de plus, demandé le droit de manifester sur la Place de l’Indépendance, à Dakar. Et une fois de plus, le rassemblement fût interdit et les accès bloqués par un important dispositif policier à travers les différentes rues convergeant sur cette place du centre de la capitale. Qu’importe, l’opposition avait maintenu son mot d’ordre, faisant, ces derniers jours, de l’accès à cette place un symbole absolu de liberté.
Cette mobilisation suivait un week-end très tendu, pendant lequel au moins deux morts avaient été déplorées lors d’affrontements entre les forces de l’ordre et la population, principalement des jeunes « qui en ont marre » de Wade, l’actuel président, dont la troisième candidature, malgré une promesse publique de ne pas aller au-delà de deux mandats, a été validée par le Conseil constitutionnel.
Un journal sénégalais, L’Obs, à propos de ce rendez-vous, avait osé titrer: « Dakar en danger. Le M23 lance l’assaut final aujourd’hui. » Vers 18h00, sur l’avenue Georges Pompidou, les Champs-Elysées dakarois, artère principale menant à la Place de l’Indépendance, la foule était compacte, bloquée à quelques dizaines de mètres de l’objectif final par un cordon de policiers. Debout sur son 4×4, Youssou N’Dour, soutenu par les acclamations, harangue la foule :
« Je pense que nous devons insister pour aller à la Place de l’Indépendance », lance-t-il en wolof.
Plus tard, il rejoint sur son véhicule Ibrahima Fall, l’un des candidats officiels. La foule s’enthousiasme de plus belle lorsque qu’arrivent successivement à leur côté Mansour Sy Djamil, un chef religieux lié à la mosquée visée par une grenade lacrymogène de la police la semaine précédente, et le fougueux Cheikh Bamba Dièye, maire de Saint-Louis et candidat à la présidence également. Tout près, est présent aussi un autre candidat, Idrissa Seck, ancien Premier ministre de Wade. La foule, galvanisée, se demande alors si les leaders vont aller au bout, rompre avec elle le cordon policier.
A 19h00, des jets de pierres s’abattent sur les forces de l’ordre qui répliquent quasi instantanément à coups de grenades lacrymogènes, vidant en quelques secondes l’avenue. C’est dans cette brusque fin que Youssou, d’après son entourage, a reçu un projectile dont il n’a pas mentionné la nature. La blessure n’est que légère.
Mais d’autres Sénégalais ont eu, ces temps-ci, moins de chance que la star: selon les sources, ces élections ont provoqué déjà au moins six ou sept morts depuis l’avis du Conseil Constitutionnel du 27 janvier dernier. Sans compter les nombreux blessés.
La situation s’est tendue d’avantage avec l’interdiction de manifester du mouvement civique « Y en a marre », composé, entre autres, de rappeurs et qui a démontré sa capacité à mener des rassemblements pacifiques. Et surtout avec l’épisode de la grenade jetée par la police à travers les porte de la mosquée El Hadj Malick Sy de Dakar.
Depuis, plusieurs mairies liées au pouvoir ont été incendiées. Et les commerçants de rue, qui craignent de perdre leurs outils de travail, reprochent aux jeunes, avec leur « guérilla de rue », d’alimenter le feu de la contestation en brûlant leurs tables en bois.
Le ton monte au Sénégal. Ce mercredi, après l’arrestation pour port d’arme non autorisé d’un jeune opposant politique de Wade, Malick Noël Seck, son avocat a « conseillé » aux partisans de Wade, si son client n’était pas libéré, de ne pas sortir en ville habillés des couleurs du candidat-président. Qui maintient toujours sa candidature à quatre jours du premier tour.
Moctar Kane
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