Ce criminologue français s’est rendu à Bruxelles le 19 février pour parler de criminalité et d’immigration devant un parterre de dirigeants du parti indépendantiste flamand.
Les idées françaises s’exportent, la preuve. Criminologue réputé, tenant d’une ligne sécuritaire sans faille, Xavier Raufer a fait un petit tour à Bruxelles, pour un débat organisé au Parlement flamand par le Brabants Seniorenforum (Forum brabançon des seniors), organisation du troisième âge satellite du Vlaams Belang.
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Ce parti politique, qui a succédé au Vlaams Blok en 2004, souhaite la partition de la Belgique entre Wallons et Flamands et la constitution de grands Pays-Bas. Il défend une ligne anti-immigration, anti-islam et pro-sécurité. Il dispose de 21 députés au Parlement flamand (onze de moins que pendant la législature précédente). C’est donc le deuxième parti de cette assemblée, derrière les démocrates-chrétiens et à égalité avec les libéraux.
Ancien d’Occident et d’Ordre Nouveau, Xavier Raufer intervient régulièrement dans les médias, en tant qu’expert en terrorisme et criminologue. Mathieu Rigouste, chercheur en sciences sociales à Paris VII (et pas du tout sur la même ligne politique), en dresse un portrait acide dans Les marchands de peur :
“Depuis la fin des années 1990, Xavier Raufer, de son vrai nom Christian de Bongain, est l’un des plus proches et des plus constants collaborateurs d’Alain Bauer. Ses productions idéologiques constituent une sorte d’archétype de la collusion entre l’idéologie sécuritaire et l’extrême-droite.”
Fiers de leur invité, les membres du Vlaams Belang ont diffusé une vidéo de la rencontre, dans laquelle Xavier Raufer répond à trois questions. Il développe un petit discours sur l’hybridation du terrorisme et du banditisme. Puis, sur la condamnation d’Eric Zemmour pour provocation à la haine raciale, le criminologue est très clair :
“La justice poursuit fréquemment toute atteinte à la présomption de racisme ou des affaires comme celle-là, et donc on est obligé d’être très vigilant sur ce qu’on dit, on est obligé de mesurer ses propos, ce qui est normal, il faut mesurer ses propos quand on a une expression publique. Mais deuxièmement, nous constatons deux poids deux mesures, parce qu’en même temps les auteurs de chansons de type rap, enfin si on peut appeler ça des chansons, tiennent des propos extrêmement machistes, racistes à l’égard du pays dans lequel ils vivent, à l’égard des femmes et caetera et on les laisse parler pour liberté d’expression, et on condamne Zemmour qui n’a dit que la vérité, à savoir que si on va à la porte d’une prison en France, huit sur dix des gens qui en sortent et qui y entrent sont issus de l’immigration, c’est une simple vérité. Alors la condamnation, elle provient du fait qu’on n’a pas le droit de faire des statistiques ethniques en France, donc on n’a pas le droit de dire la vérité sur ce plan-là. Mais, dans le fond, Zemmour n’a fait que dire ce que tout le monde pense.”
http://www.youtube.com/watch?v=4zbzLMGrYo8
Xavier Raufer conclut en répondant à une question sur sa propre expérience de martyr de la liberté d’expression, attaqué par le Mrap pour provocation à la haine envers les Roms et relaxé par le tribunal correctionnel. Nous avons joint Xavier Raufer pour lui demander des éléments de contexte sur la rencontre au Parlement flamand et sur ses propos filmés. Il n’est pas content du tout :
“Vous faites le flic de la pensée c’est ça? J’écris des dizaines d’articles, des bouquins et vous n’en avez rien à foutre et là, parce que c’est le Vlaams Belang, vous m’appelez? Je n’ai aucune sympathie pour votre journal. Si vous faites un article dont le contenu est diffamatoire, je vous attaque. Mais pourquoi vous voulez savoir ça ? Vous voulez savoir à quel âge j’ai perdu ma virginité aussi ? Ce sont des questions de flic.”
Nous devrons donc nous passer des lumières du principal intéressé. Celui-ci affirme qu’il n’a “pas été invité par le Vlaams Belang” mais ne souhaite pas nous dire par qui. Pour comprendre à quelle invitation il répondait donc, le journaliste antifasciste belge Manuel Abramowicz, de la revue Résistances, a regardé la vidéo avec nous. Il nous indique qui entoure le criminologue, à partir d’une image arrêtée à 15 secondes :
“Tout à gauche c’est Frédéric Erens, président du Vlaams Belang de Bruxelles, ancien du Front national belge. Puis Filip de Man, le leader historique du VB. On le voit parler avec Xavier Raufer. Ensuite, c’est Filip Dewinter, son dirigeant actuel. Debout à côté de lui, c’est Raymond De Roover, président d’honneur du VB à Bruxelles et président du Forum brabançon des seniors. Enfin, Dominiek Lootens-Stael, député régional bruxellois du Vlaams Belang, l’un des tenants de la ligne anti-immigration.”
La conférence était annoncée sur les différents sites Internet reliés au Vlaams Belang, et dans Vérités bruxelloises, le journal du VB à Bruxelles. Sollicité par les Inrocks, le parti n’a pas répondu à nos demandes d’interview.
Camille Polloni
*Les marchands de peur, la bande à Bauer et l’idéologie sécuritaire, Mathieu Rigouste, éditions Libertalia, février 2011.
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