Avec 339 voix pour et 151 contre, la résolution qui vise à inciter le gouvernement à reconnaître l’Etat palestinien vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale. La sénatrice EELV Esther Benbassa revient sur ses enjeux.
Alors que le Premier ministre suédois a promulgué le 30 octobre un décret pour reconnaître l’Etat de Palestine, les députés français ont voté pour la résolution en faveur de la reconnaissance de l’Etat Palestinien. Le texte sera maintenant examiné par le Sénat le 11 décembre.
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Un geste dont la portée est surtout symbolique, mais qui aura malgré tout son impact, à quelques jours du vote des parlementaires européens sur le sujet, prévu le 18 décembre. La France n’est pas le seul pays d’Europe de l’Ouest à suivre l’exemple de la Suède, puisque le sujet a aussi été débattu au sein des Parlements britannique et espagnol.
La résolution a été rédigée par un groupe socialiste présidé par Elisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Elle avait été initialement proposée le 30 octobre dernier par la sénatrice EELV Esther Benbassa. Elle était formulée comme une demande que le “gouvernement français reconnaisse sans délai l’Etat palestinien souverain et démocratique sur la base des lignes de 1967, avec Jérusalem comme capitale de deux Etats.” Entretien.
La France a toujours conservé une position très mesurée sur la question de la reconnaissance de l’Etat Palestinien, qu’est-ce qui a changé aujourd’hui ?
Esther Benbassa – La France, comme l’Allemagne, porte encore la culpabilité de la Shoah. De fait on a longtemps préféré rester discret sur la question de la Palestine, tout en y envoyant des fonds pour la reconstruction des villages détruits sur place. Mais aujourd’hui le problème n’est plus d’agir par rapport à cette culpabilité, ce n’est pas une raison pour qu’on ne reconnaisse pas ce territoire à côté de celui d’Israël.
Les nombreuses manifestations pro-palestiniennes de cet été ont elles aussi influencé les politiques ?
Pas seulement. Bien sûr, le soutien est venu de la rue, mais il est aussi venu d’une pétition, lancée par Elie Barnavi qui a été signée par 700 personnes, dont de nombreux intellectuels. Le véritable souhait qui se dessine derrière toutes ces démarches, c’est celui de la paix.
Des initiatives comme la marche du collectif des « femmes qui œuvrent pour la paix » la semaine dernière à Sdérot, au sud d’Israël, vont aussi dans ce sens…
Tous les mouvement commencent comme ça, petit à petit, on pousse, on fait bouger les choses. Je crois que tous les Israéliens veulent la paix, c’est leur gouvernement qui met un frein. Les ultrareligieux qui rêvent d’un Israël biblique font pression sur Benyamin Netanyahou. Mais les choses évoluent avec le temps. Lors des pourparlers d’Oslo au début des années 90, les citoyens d’Israël étaient pour la reconnaissance de l’Etat palestinien. Demain ils le seront peut-être de nouveau. Je me place de leur point de vue quand j’évoque le besoin de la paix. Ce signal est aussi pour dire au Hamas que ce n’est pas en envoyant des missiles qu’il y aura la paix. Le Hamas, terroriste ou pas, devrait participer à la négociation. De Gaulle en son temps avait bien négocié avec le FLN. En France, aussi, on a envie de vivre en paix entre juifs et musulmans.
Pour revenir au vote, Laurent Fabius a rappelé la semaine dernière que seul le pouvoir exécutif peut prendre la décision de reconnaître la Palestine. Un rappel nécessaire ?
Oui et non. Je pense que quand les socialistes ont rédigé la résolution que j’avais proposée, ils l’ont malgré tout fait avec un certain aval de sa part, un droit de regard. Qu’il s’agisse du vote de l’Assemblée, du Sénat, ou du gouvernement, ça n’est bien sûr pas avec nos textes ici que nous remplaceront les négociateurs. Mais c’est un signal fort que nous envoyons avec l’Espagne et la Grande-Bretagne. C’est particulièrement symbolique dans le contexte où Mahmoud Abbas (président de l’Autorité palestinienne – ndlr) s’apprête à se rendre au conseil de sécurité de l’ONU.
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