La photo d’une femme vêtue de blanc, prise à Khartoum (Soudan), lundi 8 avril, est devenue le symbole de la contestation contre le régime d’Omar El-Béchir.
Le 8 avril, à Khartoum (Soudan), une femme s’est dressée contre le régime d’Omar el-Béchir, le président au pouvoir, lors de la sixième journée consécutive de mobilisation populaire. L’index levé en l’air, perchée sur le toit d’une voiture, elle a harangué la foule aux cris de “Thawra ! ” (“Révolution !”), entourée majoritairement de femmes qui la filmaient avec leur téléphone. Sa stature superbe et le caractère purement subversif de son geste ont été immortalisés par le photographe Lana H. Haroun, qui a capturé cet instant de liberté. La photo a été postée sur Twitter, sur son compte, et elle est devenue virale.
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Taken by me@lana_hago#8aprile pic.twitter.com/o7pDUsQg84
— Lana H. Haroun (@lana_hago) April 8, 2019
De nombreux symboles
Elle incarne désormais à elle seule le soulèvement des “kandakas”, ces femmes insurgées, qui ont emprunté leur nom aux reines de l’antique royaume de Koush, comme l’explique France Info. Tout dans son incarnation est symbolique. Jusqu’aux vêtements qu’elle porte, et qui rappellent “les grands mouvements populaires qui ont contribué à jeter à bas deux régimes militaires, en 1964 et 1985, au Soudan”, explique Le Monde. Ses boucles d’oreille en or sont aussi significatives : il s’agit de fedaya, que les femmes se transmettent de génération en génération, symboles de la beauté féminine, note le Washington Post. Plusieurs vidéos d’elle ont également été relayées :
شابة سودانية تقود تظاهرة في الخرطوم. #اعتصام_القيادة_العامة pic.twitter.com/iJ02tWZVOG
— التلفزيون العربي (@AlarabyTV) April 9, 2019
“Nous allons changer le monde”
On l’y voit danser et chanter, le sourire aux lèvres, malgré les risques énormes qu’elle prend en manifestant ainsi. Elle a été identifiée par plusieurs médias comme Alia, 22 ans, étudiante en ingénierie et en architecture, relève le Washington Post. Alia, que Le Monde a rencontrée, connaît bien les dangers qui guettent les protestataires. Son frère, Babiker Abdelhamid, un médecin de 27 ans, a été tué dans les manifestations à Khartoum. Il tentait alors de secourir des personnes blessées par les forces de sécurité. Alia espère que le mouvement mettra un terme à ce régime, à sa police et aux lois patriarcales qui privent les femmes de liberté : “Ici, c’est tellement dur pour les filles. Tant que tu n’es pas mariée, tu es une enfant et ensuite… Tu es encore une enfant. Tu ne peux même pas voyager seule ! Mais nous allons changer le monde”, dit-elle au Monde.
Don’t know her name, but this Woman in #Sudan is leading rallies, standing on car roofs, and pleading for change against autocratic Bashir.
Here she is singing “Thawra” (Revolution). Remember this voice: https://t.co/0JG31Tp4rZ
— Joyce Karam (@Joyce_Karam) April 9, 2019
Plusieurs internautes spéculent sur les personnalités qui l’ont inspirée, ou sur la symbolique qu’elle convoque dans les imaginaires collectifs. Ainsi, l’activiste soudanaise Hala al-Karib, membre de l’ONG Strategic Women Initiative, avance qu’elle pourrait évoquer la figure de Mihera bint Abboud, une femme guerrière et poète qui a mené le combat contre l’invasion turco-égyptienne au début du XIXe siècle.
She's wearing a white tobe (outer garment) and gold moon earrings. The white tobe is worn by working women in offices and can be linked w/cotton (a major export of Sudan), so it represents women working as professionals in cities or in the agricultural sector in rural areas.
— Hind Makki (@HindMakki) April 8, 2019
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