Prix de l’abonnement, contenus originaux, étendue du catalogue : Amazon souhaite continuer de concurrencer le géant Netflix sur le terrain de la diffusion de vidéo à la demande par abonnement. Utopie ou rêve accescible ? Petit état des lieux.
Amazon ne compte pas se laisser distancer. Dimanche 17 avril, la multinationale américaine a annoncé le lancement de deux nouvelles offres, dont « Prime video », un service de vidéo à la demande par abonnement qui permet de regarder des films et séries de manière illimitée en streaming. L’objectif est assumé : ne pas laisser Netflix occuper le marché et s’imposer comme un acteur à son niveau.
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Jusqu’ici, Amazon permettait déjà à ses abonnés de visionner des programmes, mais ils étaient forcés de s’abonner à Amazon Premium, une offre à 99 $ par an qui comprenait à la fois la plateforme de streaming, des réductions et un service de livraison de colis plus rapides. A présent, Amazon proposera un abonnement à 8,99 $ par mois (Amazon Prime) uniquement pour la diffusion de programmes.
Les intéressés auront également la possibilité de s’abonner mensuellement à Amazon Premium pour 10,99 $ par mois. Sur le papier, l’offre n’est pas intéressante : sur un an, cela revient à 131,88 $ par an, au lieu des 99 $ Amazon Premium. Pourquoi Amazon propose-t-il alors cette formule ? La réponse est à chercher du côté de son principal concurrent. Une des forces de Netflix est de fournir un abonnement au mois, sans engagement, que l’on peut annuler en quelques clics. En se calquant sur ce modèle, Amazon permet à ses utilisateurs de « tremper un doigt de pied dans l’eau de la version Prime avant de passer au niveau supérieur [Amazon Premium] », résume Business Insider. Pour le site américain, cette formule permet aussi de souligner « combien Amazon Premium [à 99$ par an, ndlr] est un super deal ».
La compétition sur le téléchargement de programmes pour visionnage hors ligne
L’un des gros avantages d’Amazon Prime résidera dans la possibilité de télécharger les programmes d’Amazon pour les visionner hors-ligne, comme les utilisateurs d’Amazon Premium peuvent déjà le faire depuis septembre 2015. Si Netflix ne propose pas cette option, elle est courante sur des plateformes de musique en streaming comme Spotify ou Deezer.
Le lendemain de l’annonce d’Amazon, Netflix devait présenter ses premiers résultats trimestriels de 2016. Interrogé sur le sujet des vidéos hors-ligne, le PDG Reed Hastings a souligné qu’il fallait « faire preuve d’ouverture d’esprit » et a, pour la première fois, affirmé considérer cette option.
« Nous nous sommes focalisés sur le ‘click and watch’ et la beauté et la simplicité du streaming, a-t-il poursuivi, mais à mesure que nous nous développons dans le monde, nous découvrons des réseaux Internet plus instables… C’est une chose à laquelle nous devons réfléchir. »
Il y a moins d’un an pourtant, la plateforme ne semblait pas partante pour se lancer dans ce service : « Il faut avoir beaucoup de stockage libre sur son appareil, il faut gérer cet espace, je ne suis pas sûr que les gens ont vraiment envie de faire ça », avait déclaré Neil Hunt, responsable produit chez Netflix, en septembre 2015. Anne-Marie Squeo, une des porte-parole de Netflix, avait ajouté à CNN :
« Avec un wifi accessible dans de plus en plus d’endroits et un internet de plus en plus rapide, la capacité à regarder des vidéos en direct presque partout rend le concept du téléchargement de moins en moins pertinent. »
Le catalogue d’Amazon s’étoffe, Netflix mise sur les contenus originaux
Du point de vue des abonnés, Netflix emporte largement la mise face à Amazon. La multinationale de Reed Hastings a annoncé mi-avril avoir passé la barre des 80 millions de clients dans le monde, notamment depuis que la plateforme est disponible dans plus 130 pays. Mais Amazon – qui ne communique pas officiellement sur ses chiffres – compte déjà, selon les estimations des médias américains, au moins 46 millions d’abonnés (en janvier 2016, on s’approchait des 54 millions selon l’institut de recherche indépendant CIRP (Consumer Intelligence Research Partners).
Pour rattraper son retard, Amazon cherche depuis des années à étoffer son catalogue. En 2014, la compagnie de Jeff Bezos a passé un accord avec la chaîne câblée HBO pour proposer un grand nombre de ses séries (Six feet under, les Soprano mais aussi True Blood ou Boardwalk Empire). Entre 2015 et 2016, Amazon aurait dépensé près de 3 milliards de dollars en contenus vidéos et musicaux, d’après une étude financière de Wedbush, contre 4 milliards pour Netflix En 2016, Netflix souhaiterait aller jusqu’à 5 milliards d’investissements (licences de contenus et contenus originaux confondus).
Gros catalogue contre contenus originaux ?
Entre janvier 2014 et avril 2016, le nombre de contenus du catalogue que proposait Netflix US a diminué de 32%, comme l’a rapporté le site Fortune. « Ces chiffres ne donnent pas beaucoup d’indications sur la raison [d’une telle baisse], analyse l’article, mais elle pourrait être due, en partie, à la compétition qui s’accélère. Avec Hulu, Amazon et les autres, il ne serait pas surprenant que les prix [des catalogues] augmentent et que Netflix fasse le choix de renoncer à certaines titres. » A l’inverse, Netflix mise de plus en plus sur sa production de contenus originaux. Comme l’a rappelé Business Insider, le nombre de programmes originaux (séries, documentaires, stand-up entre autres) a augmenté de 182% entre 2012 et 2016.
Dans un article très complet qui compare les catalogues des plateformes de streaming video les plus populaires aux Etats-Unis (Netflix, HBO Now, Amazon, Hulu), le site Paste Magazine a récemment résumé l’état de la concurrence entre ces différents acteurs : si Netflix propose une sorte de « pot-pourri » où l’on peut piocher à la fois des contenus originaux, films, docu, stand-up, Amazon Prime dispose de plus de blockbusters récents – en plus de tous les offres liées à son service de livraison.
Du côté des séries originales, Amazon est à la traîne, même si la firme dispose de quelques pépites (Transparent) et de programmes populaires reconnus par la critique (Mozart in the Jungle a remporté le Golden Globe de la meilleure série comique en 2016). Et elle ne compte pas s’arrêter là. Elle a ainsi récemment mis la main sur Woody Allen, qui s’est engagé à produire une série pour Amazon Prime. Le réalisateur a beau avoir décrit cette association comme une « horrible erreur » (à cause de sa méconnaissance du format sériel), sa série est bel et bien en développement ; fin janvier dernier, on apprenait que la chanteuse Miley Cyrus apparaîtrait au casting.
Le blocage des VPN peut-il jouer contre Netflix ?
Depuis janvier 2016, Netflix a lancé l’offensive contre les internautes qui utilisent des VPN (outils qui servent à masquer son adresse IP pour pouvoir surfer sur un site internet en lui faisant croire que l’on vient d’un autre pays). En effet, à cause des droits sur les licences des films et séries, certains programmes accessibles sur Netflix ne sont disponibles que dans certaines régions du monde. On peut ainsi regarder Le fabuleux destin d’Amélie Poulain sur Netflix Canada, mais pas Netflix France. Pour contourner ce blocage et avoir accès à tous les catalogues de Netflix, de nombreux abonnés utilisaient un VPN ou des logiciels comme Smartflix, qui permettent d’accéder à tous les catalogues de tous les pays. Mais depuis quelques mois, Netflix bloque l’accès à sa plateforme aux utilisateurs qui ont recours à un VPN.
Dans un communiqué, l’entreprise Nord VPN qui propose ce type de service a fait savoir qu’elle constatait une augmentation du nombre d’internautes qui « passent de Netflix à d’autres services de streaming« , et de citer « YouTube Red, Hulu et Amazon Prime ».
« Contrairement à Netflix, les autres services n’empêchent pas les utilisateurs d’autres pays d’utiliser des VPN pour avoir accès à leurs contenus, qui sont limités pour l’instant aux Etats-Unis et au Royaume-Uni », conclut le communiqué.
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