A Villeneuve-sur-Lot, l’ex-circonscription de Jérôme Cahuzac, les électeurs se sont prononcés ce dimanche soir en faveur du candidat de l’UMP. Avec une hausse de la participation. Mais beaucoup de bulletins blancs et nuls.
Dans cette terre de gauche, marquée par l’affaire Cahuzac et le va-et-vient des caméras depuis quinze jours, la mobilisation de l’électorat de gauche pour le candidat de l’UMP, Jean-Louis Costes a fait la différence. Dès l’annonce des résultats, il a d’ailleurs remercié les « électeurs de sensibilité de gauche », tout en soulignant aussi que ce résultat « est un message envoyé à la classe politique et surtout à la politique économique du gouvernement qui fait des ravages ». Elu avec 53,76% des voix face à son concurrent du FN, Etienne Bousquet-Cassagne (46,24%), il a ainsi bénéficié du Front républicain dont il s’était lui-même réclamé pendant la campagne pour, disait-il, « faire barrage à l’extrême droite ».
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Pour autant, pas sûr que les perdants soient ceux qu’on pense… « C’est une défaite électorale, mais une grande victoire politique », exultait aussitôt Gilbert Collard, l’un des deux députés Front national. Le candidat du FN battu, insistait lui sur « une défaite au goût de victoire ».
« Seuls contre tous, nous progressons de manière considérable, ce qui est de très bon augure pour les échéances électorales à venir », a insisté Etienne Bousquet-Cassagne.
Peu de temps après, il recevait un coup téléphone de félicitations de Marine Le Pen, qui l’a mis en larmes d’émotion.
Malgré la victoire de l’UMP, les visages semblaient définitivement plus détendus et satisfaites du côté du FN, tant au niveau local ravis d’avoir frôlés qu’au niveau national, qu’à l’UMP, ravis d’avoir frôlés les 50%. A l’UMP, les visages crispés, même après la victoire montraient qu’on avait eu chaud… Toute la semaine, l’UMP avait craint le pire, dépêchant sur place Jean-François Copé, patron du parti, et Bruno Le Maire ex-ministre de l’Agriculture en cette terre rurale, pour soutenir son candidat et sauver les meubles.
Et même si Jean-Louis Costes l’a emporté, grâce à une hausse de la participation, il est vrai que le jeune candidat du FN, étudiant en BTS commercial, a d’abord réussi à éliminer le candidat de la gauche après l’affaire Cahuzac et le rejet de l’exécutif puis réussi à progresser de vingt points entre les deux tours en faisant campagne sur le thème de « la France des oubliés ». Entre les deux tours, il a ainsi gagné 7 095 voix. A Paris, certains ont eu peur de voir s’installer à l’Assemblée nationale un troisième député frontiste et « Ken et Barbie », selon l’expression de Marion Maréchal-Le Pen. Dans ce contexte, Jean-François Copé a donc pris ce résultat comme un « avertissement sérieux », à moins de dix mois des municipales. Un constat partagé par François Fillon qui dans un communiqué a parlé d’un « avertissement pour l’opposition ». A l’inverse, Florian Philippot, bras droit de Marine Le Pen, s’est réjoui d’avance tirant un enseignement catégorique : « le Front républicain est mort ». Termes repris mot pour mot, quelques heures plus tard, par Marine Le Pen.
On est loin du sursaut qui avait eu lieu en 2002 quand Jacques Chirac, face à Jean-Marie Le Pen, l’avait emporté avec 82% des suffrages. Si la hausse de la participation est nette entre les deux tours à Villeneuve, 15% des électeurs qui se sont déplacés ont mis un bulletin blanc ou nul. Et c’est la deuxième fois en moins de six mois que le FN réussit une telle percée avec plus de 45% des suffrages. Déjà à la législative partielle de l’Oise, le 24 mars dernier, la candidate FN, Florence Italiani, avait échoué de peu au second tour, face à l’UMP Jean-François Mancel, vainqueur avec 51,41% des voix contre 48,59% pour le FN. Autant de résultats qui renvoient aussi la droite à ses propres questionnements idéologiques et stratégiques entre les tenants d’un discours centriste et ceux qui prônent un discours plus musclé.
Pour Copé, « l’UMP doit continuer d’assumer »
Dès l’annonce des résultats, Jean-François Copé a réitéré son appel à une « droite décomplexée (…) qui ne soit pas fière d’elle-même, qui assume un discours d’autorité, intraitable sur les questions d’insécurité, d’immigration ». En somme, a-t-il dit encore, « l’UMP doit continuer d’assumer ». A l’inverse, Nathalie Kosciusko-Morizet a tiré une autre leçon de la de cette élection :
« La leçon, c’est qu’il faut faire de la politique, qu’il ne sert à rien de courir derrière le Front national, qu’il faut bien au contraire le combattre au nom de nos valeurs et de notre projet. »
Même tonalité chez François Fillon, insistant sur la fidélité « à ses valeurs » et sur un « discours de vérité (…) autour de propositions courageuses et crédibles » pour rassembler la droite et le centre. Le prochain bureau politique de l’UMP risque d’être agité.
Pas sûr que la majorité échappe à son bilan. En déplacement ce dimanche en Jordanie, François Hollande a brièvement commenté au cours d’une conférence de presse les résultats de l’élection. « Nous aurons à tirer toutes les leçons de ce scrutin et du second tour et du premier tour. »
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