Contre les dernières volontés de l’écrivain russe, le fils de Vladimir Nabokov a rendu public le dernier roman inachevé de son père. Il paraîtra en France chez Gallimard.
The Original of Laura aurait du finir en cendres. Peu avant sa mort en 1977, Vladimir Nabokov avait demandé à sa femme et à son fils, Dimitri, de détruire le manuscrit de son dernier roman resté inachevé. Dans son testament, l’écrivain russe confessait ne pas supporter l’idée que « les lecteurs voient une œuvre aboutie dans son esprit mais pas encore sur le papier« .
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Le texte, que Dimitri conservait dans le coffre d’une banque suisse, est effectivement composé de 138 fiches cartonnées, dont 50 seulement sont rédigées dans un ordre suivi. Pendant plus de 30 ans, attisant la colère des fans et des agents littéraires de l’auteur de Lolita, le fils se plaisait à décrire le manuscrit de son père comme un travail « brillant, original, assez radical (…), un pur concentré de la créativité » de l’écrivain. Les écrivains et critiques avaient beau lui demander quelques feuilles pour en juger ou arguer que si on avait respecté les volontés auto-destructrices d’un Virgile ou d’un Kafka, la littérature aurait ignoré de grandes œuvres, il n’y avait rien à faire. Dimitri Nabokov s’entêtait par peur de trahir son père mais aussi de crainte que tous les gens qui avaient vivement critiqué Lolita, les « Lolitologists » comme il les appelle, ne s’en prennent à nouveau à la réputation de l’écrivain.
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Pourtant fin avril 2008, l’héritier du romancier changeait brusquement de décision : il s’était laissé convaincre par… son père en personne. « Il est apparu devant moi et m’a dit avec un grand sourire ironique : ‘T’es vraiment dans un sacré bordel ! Allez lance-toi et publie-le’ « , confiait-il sur son blog. Le spécialiste de Nabokov, Zoran Kuzmanovich, qui est un des rares à avoir écouté le fils Nabokov lire des extraits du manuscrit, a décrit le roman comme « un Nabokov grand cru« . Racontant l’histoire d’un universitaire séduisant mais mal marié à une femme qu’il a épousée pour sa ressemblance avec son amour de jeunesse, The Original of Laura renoue avec le thème de la nostalgie des premières amours déjà présents dans Mary et Lolita.
Publié simultanément cet automne au Royaume-Uni (chez Penguin) et aux États-Unis (aux éditions Knopf), le roman a été acheté en France par Gallimard. La maison d’édition, qui attend encore que le fils de Nabokov reconstitue le texte et rédige une introduction, n’a pas encore fixé de date de parution.
Gladys Marivat
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