La campagne pour la présidence de l’UMP ne commence officiellement que le 4 octobre. Mais les candidats présumés, eux, ont déjà entamé leur tour de France des fédérations.
A l’heure où la France en vacances a les yeux rivés sur la Grande Boucle, un autre tour de France se prépare. Les équipes sont nombreuses. Les coureurs se déclarent. Et se jaugent avant d’entamer le prologue d’été avec les fédérations UMP pour étapes. Et c’est à qui en verra le plus pendant l’été pour revêtir le maillot jaune : la présidence de l’UMP. C’est dans ce contexte que chacun a entamé son contre-la-montre : François Fillon, Jean-François Copé, Xavier Bertrand, Bruno Le Maire, Nathalie Kosciusko-Morizet et désormais Dominique Dord.
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Le député de Savoie et trésorier de l’UMP est le deuxième, après François Fillon, à s’être officiellement lancé dans la bataille ce 14 juillet. Si, pour beaucoup, son annonce est passée inaperçue entre la fête nationale et les feux d’artifice, Dominique Dord a pourtant commencé à dire tout haut ce que d’autres dans sa famille politique pensent plus ou moins bas, craignant que « l’UMP doive faire, fin 2012, un choix pour 2017 ».
« Celui qui sera président contrôlera l’appareil à fond et celui qui sera battu fourbira ses armes pour les échéances suivantes », prédit-il. Il ne se présente donc « pas parce que Jean-François Copé ou François Fillon n’ont pas les qualités nécessaires » ni « pour éviter une guerre des chefs, même si l’expression est malheureuse, car la compétition a du bon ».
Il est candidat, annonce-t-il, parce qu’il estime que « le jour de vérité n’est plus très loin » et qu’il faut apporter des réponses immédiates aux problèmes actuels.
Pas sûr pour autant que sa candidature soit validée, lui qui souffre d’un déficit national de popularité. Or, pour être entérinée, chaque candidature, déposée au plus tard le 18 septembre, doit être parrainée par au moins 3 % des 264 137 adhérents de l’UMP à jour de cotisation au 30 juin 2012. Soit un minimum de 7 924 militants répartis sur au moins dix fédérations différentes. Fastoche pour Fillon ou Copé, dont la candidature ne fait plus de doute.
Un regroupement entre coéquipiers ?
Selon le dernier scénario choisi, l’actuel secrétaire général de l’UMP devrait fausser compagnie au peloton et provoquer son échappée le dernier week-end du mois d’août avec trois rendez-vous : une déclaration de candidature dans Le Figaro magazine le 25 août, la réunion à huis clos de son mouvement, Génération France, le 26 août et un grand meeting à Châteaurenard, le 27 août (Bouchesdu-Rhône).
Pour les autres coureurs potentiels, en revanche, la barrière des 3 % pourrait compliquer la donne. D’où une petite étape pour « écouter les attentes des militants », et jauger de leur cote de popularité avant de se déterminer. Voire d’envisager un éventuel regroupement entre coéquipiers pour éviter l’élimination avant le vote des militants les 18 et 25 novembre.
A l’heure actuelle, le peloton de tête reste emmené par François Fillon et Jean-François Copé, chacun prenant bien soin de ne pas nommer l’autre, préférant désigner son rival par une périphrase. Fillon est ainsi devenu le « pré-candidat » pour Copé quand ce dernier est qualifié de « candidat de l’appareil » opposé au « candidat des militants ». Eux, opposés ? Officiellement, tout va bien. « Je ne suis candidat contre personne », lançait François Fillon dans le Loiret, le 9 juillet, en entamant son tour des fédérations. Quant à Jean-François Copé, il répète à l’envi qu’il ne veut pas polémiquer, mais qu’il souhaite installer l’opposition dans un « esprit combatif et constructif ».
Officieusement, c’est plus compliqué. Chacun des deux camps pédale à toute vitesse, ne ratant pas une occasion d’égratigner son challenger et de faire valoir ses propres qualités de meilleur opposant. Comme Jean-François Copé qui glisse, avec gourmandise, qu’il voit dans son déjeuner avec Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux le signe d' » une amitié, peut-être même une affection » de la part de l’ancien chef de l’Etat. Fillon, lui, n’a pas été convié ! Sur BFM, toujours l’air de rien, Copé dépeint Fillon comme un élu non représentatif de la société française et issu d’une autre époque : « Nous ne sommes pas de la même génération. (…) Nous n’avons pas la même histoire électorale. Il est aujourd’hui député du centre de Paris. Je suis, pour ce qui me concerne, députémaire de la ville de Meaux, qui est le reflet de la diversité de la société française. » Fini, Fillon ? Sur France Info, ce 12 juillet, Copé n’est pas loin de le sous-entendre, tout à sa volonté d’occuper l’espace. Au moment de s’exprimer sur le dossier sensible de PSA, le secrétaire général de l’UMP se positionne ainsi comme le numéro 1 de la droite : il faut « que le gouvernement sache qu’en ce domaine, l’opposition – au nom de laquelle je m’exprime ce matin – sera à ses côtés ».
Pour éviter de se laisser distancer, François Fillon réplique le même jour dans un mail envoyé à ses soutiens. « Pour affirmer notre opposition et préparer la reconquête, il nous appartient de bâtir ensemble une alternative solide », écrit-il. Une manière de s’autoproclamer, lui aussi, premier opposant de François Hollande et de rappeler aux militants UMP qu’il a acquis à Matignon, pendant cinq ans, une expérience d’homme d’Etat. Il profite également de son courriel pour avancer ses pions et annoncer la poursuite de son tour de France : « J’irai dans les semaines et les mois qui viennent à votre rencontre partout en France. »
Du temps, de l’écoute et des muscles
Prochaine étape minutieusement choisie : les Vosges, le 23 juillet, le fief de Philippe Séguin, héraut du gaullisme social et mentor politique de Fillon. Son nouveau directeur de campagne, Eric Ciotti, fidèle sarkozyste et pilier de la fédération des Alpes-Maritimes, l’une des plus importantes de France, devrait l’accompagner pour un déplacement d’une journée. Objectif : montrer aux militants une disponibilité totale. « Ce sera l’esprit de notre campagne. Du temps et de l’écoute », a promis Laurent Wauquiez, soutien de l’ex-Premier ministre.
Pour l’écoute, François Fillon annonce le lancement sur son site d’une consultation militante, sous forme de questionnaires, pour bâtir son projet : « Mon rôle est de vous écouter pour construire avec vous un projet d’alternance. Ce projet ne peut pas être le fruit de compromis et de prudences tactiques. (…) J’ai souhaité ouvrir, dès cet été, une réflexion collective sur internet et les réseaux sociaux, espaces de débat à la hauteur de nos ambitions démocratiques. Au menu, huit thèmes : institutions, compétitivité, sécurité/justice, souveraineté, société, élections, citoyenneté et rénovation de l’UMP. Exemple : ‘Etes-vous favorable à la fusion de la Région et du Département ? Favorable ? Non favorable ? Ne se prononce pas… » Une méthode qui n’est pas sans rappeler celle de la grande distribution.
Du temps, de l’écoute mais aussi des muscles pour ne pas laisser le maillot jaune à Jean-François Copé, que Fillon estime juge et partie dans la bataille. L’ex-Premier ministre réclame ainsi que le vote physique des militants puisse se faire dans les circonscriptions plutôt que dans les fédérations, pour favoriser une plus forte mobilisation qu’il pense lui être profitable. Il dénonce dans la foulée le verrouillage de l’UMP, après la nomination de trois secrétaires généraux issus du courant Génération France de Copé : Pierre Charon, Jérôme Dubus et Géraldine Poirault-Gauvin. Depuis plus d’un an, cette élue parisienne est en guerre ouverte avec Philippe Goujon, président de la fédération UMP de Paris et soutien de François Fillon à Paris. Réplique du secrétaire général de l’UMP à l’issue du bureau politique du parti : « Je ne veux pas polémiquer ». Et d’ajouter sur France Info, le 12 juillet :
« Je ne préfère même pas en discuter. La transparence est totale. La meilleure preuve c’est qu’aujourd’hui je ne suis pas dans cette campagne. Je suis dans l’installation de l’opposition. » Question de la journaliste : « Ne me dites pas que vous ne pensez pas à ce congrès du mois de novembre ? » – « Si bien sûr, je ne vous le dis pas. Bien sûr, j’y pense. »
Il était aujourd’hui en déplacement à Houssen (Haut-Rhin), puis sera le 19 à Caen dans le Calvados. Des étapes de plaine avant les cols. Mais dans le Tour de France, rien n’est joué avant le sprint final.
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