Echange de SMS, photos dénudées, fausses histoires d’amour… victime d’une usurpation d’identité sur Twitter, un jeune acteur français avait porté plainte. Le 4 avril, la justice française a condamné la société américaine à livrer l’identité du plaisantin. Sous peine d’une amende de 500 euros par jour de retard.
« Tiens c’est bizarre, t’as un Twitter Bernard*? Je suis allé voir ce que t’écrivais, quel boulard ! » Nous sommes l’été dernier. Bernard discute avec des amis et apprend par hasard qu’il gazouillerait sur le réseau social de micro-blogging. Etonné, ce jeune acteur à l’affiche d’une série télévisée française vérifie la chose en rentrant chez lui. Il découvre avec stupéfaction de nombreux tweets écrits en son nom. Bernard décide de remplir un formulaire demandant la fermeture du compte. Rien ne change. « A l’époque, j’étais totalement étranger aux réseaux sociaux, nous raconte-t-il. Je n’y connaissais rien et j’ai peut-être mal suivi les consignes. » Son double numérique continue tranquillement à s’amuser.
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Echange de SMS, photos dénudées, fausses histoires d’amour…
Sauf que le culot de l’usurpateur croît à mesure que les semaines défilent :
« Il parlait avec beaucoup de filles et obtenait leur numéro de téléphone pour communiquer avec elles par SMS. Il a aussi créé de faux comptes Twitter à mes petites sœurs et nous faisait parler entre nous. Sans oublier les histoires d’amour qu’il me prêtait avec certaines filles. Là encore en utilisant plusieurs faux comptes Twitter. Je commençais vraiment à avoir peur, ça pouvait être un fou. »
Son avocat, Anthony Bem, renchérit. « La personne est allée jusqu’à demander à ces filles d’envoyer des photos où elles devaient montrer qu’elles aimaient mon client. » Au total, 5 000 tweets postés. Et un faux compte qui affiche plus de 6 000 followers. Le phénomène ne serait pas rare sur Twitter. « En général, ce sont des fans qui font ça, ajoute Anthony Bem. Ils veulent à tout prix se faire passer pour leur idole. »
La justice française ordonne à Twitter de transmettre ses données
Décidé à stopper la plaisanterie, Bernard porte plainte. Mais la police se déclare impuissante. Il décide alors de contacter Anthony Bem qui, en novembre, met en demeure Twitter de supprimer le faux profil. S’en suit un échange de mails entre l’avocat et l’entreprise américaine, qui refuse d’accéder à la demande de Bernard.
Jointe au téléphone, l’avocate de Twitter Alexandra Néri se retranche derrière le fait que les données sont stockées aux Etats-Unis. Selon elle, seule une commission rogatoire internationale aurait pu permettre de communiquer ce genre d’informations :
« Twitter reçoit sans cesse des ordonnances lui demandant de fermer tel ou tel compte. Et, parfois, de la part de pays pas vraiment démocratiques. Dès lors, nous ne pouvons pas dire à certains pays qu’on leur transmet les données d’identité parce qu’ils sont démocratiques et refuser de le faire avec d’autres pays au motif qu’ils sont des dictatures. Le seul qui peut décider doit être un juge américain. »
Une logique contestée par le tribunal de grande instance de Paris, qui, le 4 avril, a sommé Twitter de lui communiquer les données du faussaire dans un délai de huit jours. Sous peine d’une astreinte de 500 euros par jour de retard. Le réseau social a par ailleurs été condamné à verser 3 000 euros à l’acteur.
Twitter complice ?
L’avocat de l’acteur souhaite aller plus loin et évoque une possible « complicité » de Twitter. Si le profil de Bernard a depuis été supprimé, il aura dû attendre au total 4 mois depuis la première demande de son avocat. Anthony Bem s’interroge :
« Est-ce que Twitter n’est pas complice d’usurpation d’identité en laissant un faux profil aussi longtemps ? Je me pose la question, et au fond de moi je pense qu’on peut répondre par l’affirmative. »
Des propos qui font bondir Alexandra Néri :
« Parler de complicité est complètement fantaisiste. Mais que voulez-vous, c’est très à la mode de taper sur Twitter. »
Les deux parties devront peut-être s’expliquer à nouveau devant la justice : Anthony Bem va « prendre contact avec le juge » dans les prochains jours pour évoquer cette question.
*le prénom a été modifié
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