Pour son dernier rassemblement de campagne avant le premier tour, c’est à un apéro que Jean-Luc Mélenchon a convié ses soutiens. Au belvédère de Belleville dans le XXe arrondissement de Paris, le candidat de la France insoumise a prononcé un court discours, notamment aux côtés de Pablo Iglesias, leader espagnol de Podemos. Aux cris de “résistance”, ils ont appelé à une “Europe insoumise” et à “se débarrasser de Madame Le Pen” dès dimanche.
“Gracias, Pablo.” Pour sa dernière apparition publique avant le premier tour de l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon aura pu – un peu – pratiquer son espagnol. Perché sur le belvédère de Belleville, à Paris, le candidat de la France insoumise n’est pas venu seul à l’occasion de l’apéro organisé par ses équipes : accompagné de Marisa Matias du Bloc de Gauche portugais, mais surtout de Pablo Iglesias, leader de Podemos, en Espagne, celui qui oscille entre la troisième et la quatrième place dans les sondages a prononcé une courte allocution devant plusieurs centaines de personnes, toutes acquises à sa cause.
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Ils arrivent vers 19h15, passant non loin du buffet composé de chips, légumes frais et cubis de diverses obédiences (grosse présence de Sangria). Souhaitant conclure cette campagne sur une note festive, a contrario d’autres candidats qui ont interrompu là suite à l’attaque des Champs Elysées, jeudi soir – une minute de silence en hommage au policier décédé est tout de même observée au début de la soirée, qui a changé de lieu au dernier moment pour des raisons de sécurité – Jean-Luc Mélenchon débute son discours en évoquant “l’espoir” qu’un tel événement “soulève” : “Tout le monde nous regarde.”
“L’important c’est qu’en nous voyant, vous comprenez qu’il y a plusieurs Europe, qu’il peut y avoir un autre type de coopération (…) Si vous savez à quelle Europe on se réfère, c’est à cette Europe des rebelles, cette Europe insoumise”, déclare celui qui est régulièrement attaqué sur son programme concernant l’Union européenne [un “plan A” consistant en une renégociation des traités européens, et, en cas d’échec, un “plan B” synonyme de sortie de ces mêmes traités, ndlr] et, plus généralement, sur sa politique internationale.
« La peur, le marketing, la corruption »
S’il se dit “prêt à la suite” et annonce “vouloir garder des forces pour les quinze jours à venir”, Mélenchon en est convaincu : “Ca va vraisemblablement se régler à une poignée de voix. Cela dépendra des décisions de chacun dans le secret de sa conscience. Nous pouvons avoir un magnifique second tour en se débarrassant de Madame Le Pen.” Pablo Iglesias, pin’s de la France insoumise et poing de levé, n’est pas plus tendre avec la candidate du FN, la voyant comme l’incarnation de “la peur” – Macron, lui, a le droit au mot “marketing”, Fillon, celui de “corruption”, la chance.
Le slogan de Podemos, “¡Si se puede!”, est entamé régulièrement par la foule, largement hispanophone. Plusieurs médias étrangers sont d’ailleurs présents, à l’image d’une reporter de télévision portugaise qui, de façon toujours inexpliquée et un peu comique, emmène son énorme valise avec elle dans la meute des journalistes tout en roulant sur les pieds de tout le monde – allez, on lui souhaite tout de même d’avoir réussi à atteindre les candidats. Mélenchon, en tout cas, est sur le départ, après avoir appelé “les gens” à se mettre “au travail” : “Pour se faire plaisir, on crie une dernière fois la devise de la République. 1-2-3… Liberté, égalité, fraternité!” Après le compte à rebours, on a cru instant qu’il allait se transformer en hologramme.
Dynamique citoyenne
Les voilà donc partis, la foule, elle, restant boire des coups sous les banderoles à l’effigie du député européen. Quel est leur état d’esprit à deux jours du premier tour ? Marwen, 33 ans et créateur d’une start-up – “Non, je ne vote pas Macron” – est séduit par le député européen “car il propose une vraie alternative”. Ce qui lui plaît, aussi, c’est tout ce qui se passe autour du candidat : “J’ai senti que quelque chose était en train de se passer. Pour moi avant, la politique était quelque chose qui venait du haut. Aujourd’hui, on a une intelligence collective qui part du bas, une base populaire, et Mélenchon va être le chaînon qui rassemble tout cela.” Bière à la main, il appréhende un peu qu’il ne passe pas le second tour. “Jusqu’à hier soir, j’y croyais, j’étais convaincu. Mais avec ce qui s’est passé aux Champs… Je sais pas. Je pense que ça peut jouer pour les indécis : j’ai par exemple des copains qui se tâtaient pour voter Mélenchon mais qui, depuis l’attaque, reconsidèrent leur décision.”
Alejandra, Colombienne de 28 ans installée en france depuis une quinzaine d’années, aimerait bien, elle aussi, que la France insoumise remporte l’élection, notamment “pour la dynamique citoyenne” qu’elle incarne. N’ayant pas la nationalité française, elle ne peut pas voter alors elle a “hésité à venir avec un panneau disant : “cherche abstentionnistes!” pour refiler sa voix. Elle reçoit d’ailleurs un SMS d’un ami : “Il veut bien voter pour moi, mais il dit que ça dépend de pour qui je vote, ha ha.” Elle est accompagnée de Luc, 36 ans, qui, après avoir longtemps voté LCR, s’est rallié à Mélenchon depuis 2012 “parce que c’est quelqu’un qui peut rassembler, et qui a une cohérence”.
Citant tour à tour François Ruffin et Noam Chomsky – le linguiste américain a récemment appelé à le soutenir – il y croit plus qu’à la précédente élection “car la configuration n’est pas la même : en 2012, il y avait eu le vote utile pour Hollande. Là, c’est probable qu’il y ait la même chose, mais dans le sens de Mélenchon”. En tout cas, si son candidat n’est pas au second tour, il votera blanc. Blanc, comme la couleur du tee-shirt d’une jeune femme dansant sur la musique de l’acteur Yvan le Bolloc’h et son groupe, venus jouer en soutien. Sur son vêtement, il y a écrit « It’s time. » Ici, tout le monde espère que dimanche sera celui de Mélenchon.
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