La nouvelle protégée de Cyril Hanouna « Touche pas à mon sport » cartonne depuis son lancement. Une déclinaison sportive de « Touche pas à mon poste » qui reprend à la lettre le succès de l’émission. Des blagues potaches, des bimbos, des clashs…
Du sport, des potes, des clashs et du buzz. Depuis le 23 novembre 2015, Touche pas à mon sport bat des records d’audience. Nouvelle protégée de Cyril Hanouna, l’émission reprend les ingrédients qui ont fait le succès de « Touche pas à mon poste »: des blagues potaches dans une ambiance survoltée. Diffusée tous les jours de la semaine en amont de TPMP, l’émission permet d’en gonfler l’audience tout en captant les plus jeunes dès la sortie des cours. Entre deux débats corrosifs sur l’actualité sportive du jour, des WAGs (comme l’ex-femme de Boudewijn Zenden, Clio Pajczer) sont invitées à se déhancher ou à pratiquer des exercices de fitness en tenue légère.
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« Une ambiance cours de récré à l’esprit juvénile »
Dans ce show animé par Estelle Denis, les débat sont volontairement polémiques. Entre chroniqueurs, on s’invective sans langue de bois, quitte à laver son linge sale en public. Pour François Jost, professeur en sciences de l’information et de la communication à l’université de Paris III, ce choix n’a rien d’hasardeux: « C’est précisément ce que recherche le public de ce genre d’émission : une ambiance cours de récré à l’esprit juvénile. Une cacophonie qui casse l’esprit classique des chroniqueurs qui lisent leurs fiches« . La preuve en image: lorsque Raymond Domenech explique préférer le sport à la naissance de son enfant avec Estelle Denis, cette dernière rougit pendant que le public se marre.
https://www.youtube.com/watch?v=G_BgYVl2H9w
Programmée à 17h50, juste avant TPMP, l’émission met tout en œuvre pour ne pas faire zapper le téléspectateur. « On retrouve un humour et des comportements qui sont purement adolescents », analyse François Jost qui évoque « une régression infantile ». Un sentiment partagé par une autre journaliste sportive habituée des plateaux télévisés : « Hanouna prend soin de sa cible qui est jeune. On est plus dans un show de divertissement que dans une émission d’analyse sportive. »
https://www.youtube.com/watch?v=4GhEG0PRLY0
Ce « show de divertissement » aurait d’ailleurs très mauvaise réputation au sein du monde des journalistes sportifs: » Ça manque de profondeur. On a tendance à regarder un peu ça de haut entre collègues. Personnellement je n’irai jamais mettre les pieds là bas, explique une autre journaliste sportive qui décrit « une ambiance de discussion de comptoir ».
Le bon, la brute et le bruyant
Autour du plateau, chaque chroniqueur semble avoir un rôle à tenir. « Personnellement je ne voudrais pas participer à cela. J’ai pas envie d’être soit la fille sexy, la sympa ou la grande gueule… », confie une journaliste de l’Equipe. La chroniqueuse Francesca Antoniotti assume, elle, un rôle de forte tête: la « Corse qui ne mâche pas ses mots ». Lorsqu’on évoque les propos sexistes d’un coach de D2, elle s’insurge: « C’est de la discrimination, il faut se battre, on ne peut pas trouver ça normal » . Mais son coup de sang est rapidement douché par Dominique Grimault qui lui prend la main de manière un brin paternaliste.
Question humour, les chroniqueurs n’hésitent pas à se piéger en caméra cachée. Comme Pierre Ménès, mal à l’aise face à une Estelle Denis qui feint de suspecter son mari d’adultère. A l’instar de Touche pas à mon poste, l’effet « déconnade entre potes » est recherché: « cela permet de faire croire au spectateur que la complicité sur le plateau continue en dehors », décortique François Jost.
Entre sexisme et beauferie
Autre moment fort de l’émission: les conseils sportifs de Clio Pajczer. Dans sa chronique « les conseils de Clio », la production la met en scène dans des exercices de muscu où elle est toujours filmée dans des postures suggestives. On la voit aussi prodiguer des conseils en petite tenue dans une baignoire. « Sous un faux prétexte, on aguiche le spectateur sur un autre plan : celui du corps du Clio Pajczer », estime François Jost. Un procédé « misogyne« , selon une journaliste sportive, « à l’image de la façon dont les femmes sont considérés dans la presse sportive »
https://www.youtube.com/watch?v=ZCa5oKkMAxc
« Depuis des années, le sexe en tant que tel a quasiment disparu de la télévision », raconte François Jost, « le prétexte du sport rend la chose tout à fait acceptable. Ce n’est pas de l’érotisme torride mais une pratique sportive, donc quelque chose de sain ». Lorsque Clio Pajczer ou Ludivine Sagna (la femme du footballeur Bakary Sagna) réalisent une série d’abdos en pantalon de cuir moulant ou des exercices en talons aiguilles, difficile de ne pas voir les intentions de la production. Sur YouTube, ses séquences font le bonheur des capseurs (des internautes qui compilent « les photos de jolies filles).
https://www.youtube.com/watch?v=6Dt1tCXdUsU
« T’as un très beau p’ti cul »
Dans cette ambiance façon Gym Tonic revisité, les chroniqueuses n’échappent pas aux remarques bien lourdes de leurs confrères. Lorsque Clio Pajczer fait des abdos en compagnie de Ludivine Sagna et Ariane Brodier, Pierre Ménes se déplace sans scrupules pour filmer leurs fesses avec son téléphone. Quand on l’invite à regagner sa chaise, Gilles Verdez prend le relais. « Tu as un très beau p’ti cul », lance-t-il à Clio Pajczer.
https://www.youtube.com/watch?v=Z6QJRp6Saqw
Le recrutement des chroniqueuses semble avoir été fait sur des critères plastiques; au cours de l’émission, les femmes journalistes sont d’ailleurs souvent réduites à un rôle de « bimbo ». Même si le CV de Clio Pajczer la légitime largement pour débattre de l’actualité sportive: passée par Lephocéen.fr et Léquipe 21, la chroniqueuse connaît très bien le monde du foot.
« Dans les émissions sportives, on a tendance a vouloir glamouriser le plus possible la femme à l’antenne », conclut une journaliste sportive. « Touche pas à mon sport » n’est pas la première émission à utiliser ce registre, elle symbolise, aujourd’hui plus que nulle autre, le sexisme ambiant dans le milieu du sport et de la télévision.
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