Quel est l’impact de l’industrie sur l’environnement ? Alice Le Roy et Virginie Linhart dressent la chronologie des désastres écologiques depuis les années 50 dans Ecologie, ces catastrophes qui changèrent le monde : un état des lieux inquiétant.
A part Claude Allègre et quelques aveugles illuminés qui mettent en doute son existence, la crise climatique fait aujourd’hui l’unanimité contre elle. Sans que le constat partagé des dangers qu’elle provoque ne suffise à imposer partout des solutions à la hauteur de l’enjeu.
Les catastrophes récentes – la sécheresse extrême en Australie en 2006, Katrina à La Nouvelle-Orléans en 2005, la canicule en Europe en 2003 – sont tombées d’un ciel que les hommes n’ont pas ménagé. Et c’est l’histoire de cet impact sournois de l’industrie sur l’environnement que racontent Virginie Linhart et Alice Le Roy.
La généalogie qu’elles dressent des catastrophes éclaire la profondeur de la crise écologique. A travers cette consignation d’une longue succession d’accidents, les auteurs font aussi le récit de l’invention d’un mouvement politique qui mettra plusieurs décennies à s’imposer au coeur du débat public.
Linhart et Le Roy remontent à l’après-guerre, faisant de Londres, en 1952, le premier lieu historique d’une vaste catastrophe écologique : le smog ensevelit alors la capitale anglaise sous une purée de pois jaunâtre et provoque la mort de 4 000 habitants. En cause : les usines de charbon qui polluent l’air. Autre crise : la pollution des campagnes américaines par l’usage intensif d’un pesticide, le DDT, considéré comme un produit miracle du progrès économique, jusqu’à ce que la biologiste Rachel Carson dénonce en 1962 ses effets dramatiques.
L’industrie chimique fait des ravages dans tous les pays industrialisés : au Japon, l’empoisonnement au mercure de la baie de Minamata à la fin des années 50 fait des milliers de morts. Pire, l’explosion, dans la nuit du 3 au 4 décembre 1984, de l’usine de pesticides de Bhopal en Inde, détenue par la société américaine Union Carbide, reste comme la pire catastrophe industrielle (près de 20 000 morts) : elle marque le début du combat de l’écologiste indienne Vandana Shiva.
Avec le naufrage du Torrey Canyon au large des côtes britanniques, en 1967, de l’Amoco Cadiz en 1978 et de l’Erika en 1999, le pétrole mobilise aussi contre lui une nouvelle génération d’écologistes, dont la première victoire sera la condamnation de la société Amoco en 1992 et la définition d’un principe fondateur : “Les pollueurs sont les payeurs.”
Le nucléaire (Tchernobyl en 1986), la déforestation, la biodiversité ou les émissions de gaz à effet de serre ne mobilisent plus les seuls militants et scientifiques, mais des Etats. Comme Virginie Linhart et Alice Le Roy le rappellent dans des archives impressionnantes ou dans les interventions d’écologistes de renom (Rajendra Pachauri, Wangari Maathai…), il faudra des décennies pour en prendre la mesure. Si la catastrophe écologique a un passé, est-il encore temps de lui interdire un avenir ?
Ecologie, ces catastrophes qui changèrent le monde, d’Alice Le Roy et Virginie Linhart, le 10 décembre, France 2, 23 heures