Un compliment, c’est un peu d’amour dans beaucoup d’esprit. Et c’est aussi la sève de la nouvelle application que s’arrachent les adolescents américains depuis quelques semaines. “To Be Honest” (TBH), soit “pour être honnête”, se veut être une plateforme ultra bienveillante, faite pour gonfler l’ego de ses utilisateurs. “Nous avons créé TBH parce que nous […]
A mille lieues des applications anonymes propices aux ragots et noms d’oiseaux, TBH, parangon de bienveillance, permet d’envoyer – et de recevoir – anonymement des appréciations positives de ses amis. C’est bon pour le moral…
Un compliment, c’est un peu d’amour dans beaucoup d’esprit. Et c’est aussi la sève de la nouvelle application que s’arrachent les adolescents américains depuis quelques semaines. « To Be Honest » (TBH), soit « pour être honnête », se veut être une plateforme ultra bienveillante, faite pour gonfler l’ego de ses utilisateurs. « Nous avons créé TBH parce que nous pensons que nous devrions nous sentir mieux en utilisant les réseaux sociaux – et non pas plus mal », peut-on ainsi lire sur le site de l’application.
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Le principe ? Aux questions générées par l’intelligence artificielle, l’usager se voit proposer quatre noms d’amis, piochés au hasard dans son carnet d’adresse. S’il ne peut donc rien écrire et se contenter de choisir un nom parmi tant d’autres, la véritable particularité de l’application réside dans les fameuses interrogations posées : toutes sont extrêmement positives, et ne visent qu’à flatter.
« Qui est le plus intègre ? » « Qui a le plus de chances de devenir président ? » « Qui est le plus drôle ? » « Qui sait toujours quoi dire et quand ? » A chacune de ces questions enjouées, l’utilisateur doit donc choisir lequel correspond, selon lui, le mieux à la question posée. Et s’il se sent dans une impasse, il peut même demander à ce que quatre autres noms lui soient soumis.
Un bon moyen de séduire, gagner des points auprès de son entourage, et renforcer l’entre-soi, penserez-vous sans doute. Eh bien même pas : si la personne que vous avez désignée comme étant « celle au plus beau sourire » en sera bien informée, elle ne connaîtra cependant pas votre identité. L’élu(e) devra se contenter d’une gemme, rose si la réponse vient d’une fille, bleue d’un garçon et violet si la personne a choisi l’option « non binaire » lors de son inscription (une option d’une modernité sans pareille, vous en conviendrez).
L’occasion de voir son ego gonflé à bloc
Lancée le 3 août, TBH caracole au sommet des applications gratuites les plus téléchargées de l’App Store et revendique pas moins de 2 millions d’utilisateurs quotidiens. Pour le moment disponible dans une petite quinzaine d’Etats américains seulement, la plateforme est encore en plein processus de développement, ce qui lui permet d’éviter de crouler sous les requêtes. « La demande a explosé si rapidement (rappelons que les utilisateurs ne peuvent s’inscrire que depuis six semaines), ils n’ont tout simplement pas assez de bandes passantes sur le serveur et de support technique pour se développer plus rapidement pour le moment » analyse nos confrères de chez BuzzFeed.
Une bonne façon de faire languir les Etats (et pays, l’Hexagone en tête) où TBH n’est pas encore téléchargeable, se garantissant un certain succès au moment de son arrivée. Un popularité grandissante qui n’étonne en rien Yann Leroux, psychologue spécialiste du monde numérique : « On a toujours besoin de choses positives, c’est plus facile à digérer, c’est une aide importante pour grandir ! Le regard positif des autres nous soutient et nous aide à aller dans le bon sens. »
L’appli TBH (To Be Honest) a l’air ouf!! Mais bon elle reste au Us pour le moment ????????
— Laura (@Laura_Ovdr) 27 septembre 2017
Ça serait trop bien que TBH sorte en France ????
— Kévin ???? (@kevin_chapeau) 27 septembre 2017
qd TBH ça va sortir en france ca va être pire que Curious Cat
— tristan (@lmr_tristan) 27 septembre 2017
On veut l’appli TBH en France !!
— Swan (@PaulineR_thr) 27 septembre 2017
Et l’anonymat des utilisateurs ne diminue pas l’impact des compliments reçus selon notre expert, bien au contraire : « On a toujours besoin de voir notre ego gonflé à bloc. Cela a toujours existé, ça ne reflète pas particulièrement la société actuelle. Mais ce qui change aujourd’hui c’est qu’on donne autant d’importance au regard positif d’un ami qu’à celui d’un parfait inconnu. »
Anti-ragots
Une nouveauté qui fait figure d’appel d’air dans un paysage numérique saturé par les applications dédiées aux rumeurs et bassesses comme, pêle-mêle, Yik Yak, Secret ou encore la frenchy Gossip. Utilisées comme plateformes de diffusion de ragots et de messages violents (sous couvert d’anonymat), elles n’avaient d’ailleurs pas manqué de provoquer craintes et inquiétudes dans les établissements scolaires français.
Si bien que Gossip a fermé ses portes à la suite d’une polémique et d’une mise en garde du ministère de l’Education nationale. Quand les autres ont tout bonnement disparu, victime d’une gloire aussi fulgurante qu’éphémère. “Les applis d’intox ne sont que violence et agressivité : c’est un plaisir immédiat”, analyse Yann Leroux, justifiant ainsi leur courte espérance de vie.
L’application de la maturation
TBH sera-t-elle de ces fugaces phénomènes de mode ? Difficile à dire. Si, selon le psychologue, l’aspect “bisounours” ne devrait pas lui être fatal, elle doit néanmoins craindre les trolls, capables de saboter l’essence positive de l’application. « TBH n’est pas sans rappeler Hearthstone, jeu de cartes en ligne signé Blizzard. On peut y échanger des mots avec nos partenaires, mais que des phrases positives. Problème, certains en ont vite usé et abusé pour ‘spamer’ les autres joueurs. Résultat, on ne peut plus envoyer trop souvent des messages à son adversaire. Il est fort probable qu’il arrive la même chose à TBH : les dispositifs les mieux pensés sont toujours détournés… »
Ce qui n’empêche pas Yann Leroux de croire au potentiel de TBH, qu’il juge comme la rampe de lancement d’une nouvelle série de plateformes plus adultes, plus réfléchies : “TBH, c’est le signe de maturation des applications. C’est plus facile de faire des applications qui dénigrent les autres. Alors qu’admettre quelque chose de positif demande de plus amples réflexions. C’est même étonnant qu’un concept comme celui de TBH ne sorte que maintenant ! »
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