Plébiscitée par les skateurs à ses débuts, Supreme est devenue en vingt ans la marque préférée des rappeurs, modeux et branchés. Snoop Dog, Kate Moss, Damien Hirst, Larry Clarke, Lou Reed , Morrissey : tous ont porté le logo rouge et blanc. Alors que la marque ouvre sa première boutique française à Paris, retour sur […]
Plébiscitée par les skateurs à ses débuts, Supreme est devenue en vingt ans la marque préférée des rappeurs, modeux et branchés. Snoop Dog, Kate Moss, Damien Hirst, Larry Clarke, Lou Reed , Morrissey : tous ont porté le logo rouge et blanc. Alors que la marque ouvre sa première boutique française à Paris, retour sur son histoire.
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Une marque destinée aux ridders crée par un type incapable, selon ses dires, de monter sur une planche : tel est le paradoxe sur lequel se construit, en 1994 Supreme, une des marques de streewear les plus cultes de ces vingt dernières années. Créée en 1994 par le très discret James Jebbia, Supreme est devenue en 22 ans une véritable référence en matière de streetwear. Le premier store, ouvert dans la foulée sur Lafayette Street, flirte à l’époque avec toute une colonie de riders qui ne se retrouvaient pas dans les codes vestimentaires de New-York. Le succès est immédiat.
L’esthétique suprême, c’est quoi ?
S’il est incapable de monter sur une planche, Jebbia sait en revanche développer une identité visuelle ultra efficace et désirable. Il s’est visiblement grandement inspiré (pour ne pas dire pompé) du travail de l’artiste conceptuelle Barbara Kruger pour créer son logo rouge rectangulaire, orné de l’inscription « Supreme ». Comble de l’ironie: Jebbia, qui n’hésite pas à baser le logo de sa griffe sur les oeuvres d’une artiste, a attaqué en justice en 2013 la marque Married to the MOB pour avoir commercialisé un tee-shirt « Supreme Bitch » reprenant le code couleur de la marque.
Efficace, le logo Supreme est floqué sur des tee-shirts et des sweat-shirts blancs ultra basiques qui deviennent immédiatement des best-sellers. Il décline également sur des casquettes, des vestes, des sacs, sur des planches… Bref, sur tout un vestiaire de fringues et d’accessoires que les skateurs affectionnent : des basiques aux couleurs monochromes.
Supreme flirte avec le rap et gonfle les skateurs
Mais c’est la scène rap 90 qui fait réellement décoller la marque. Snoop Dog, Raekwon ou RZA du groupe Wu-Tang Clan, tous ont crée pour elle tee-shirts et sweats à leur propre effigie, toujours un brin provoc’, ambiance bad boy et gros guns. Des pièces aujourd’hui collector. Et la nouvelle génération a reprit ce flambeau avec en chef de file Tyler, the Creator. Ce rappeur et dingue de skate conçoit la marque comme un véritable lifestyle, s’affichant toujours casquette 5 Panel by Supreme vissée sur la tête. Par la même occasion, il a fait de la 5 panel un produit star qui a envahi la capitale.
Ces ambassadeurs Supreme séduisent un public branché, qui voit dans la marque au logo rouge et blanc un source de distinction : porter du Supreme à la fin des années 90, c’est faire partie d’un petit club fermé. Un engouement qui a très vite eu le don d’agacer les skateurs, au point d’en détourner certains. Jimmy Cholley, skatteur depuis 15 ans et vendeur chez Nozbone témoigne : « Esthétiquement j’aime bien les produits Supreme, mais j’en porterais pas car ils ne sont plus uniquement basés sur le skate. Maintenant c’est une marque pour le style et pour l’image, si le public la réclame c’est parce qu’il voit Rihanna en porter ». Laurene, skateuse passionnée depuis 10 ans et vivant à Londres ajoute: « Ils sont trop commerciaux et trop ancrés dans la culture américaine. En plus, malgré leurs récents efforts pour élargir leurs gammes, ça reste une marque à laquelle les filles ont vraiment du mal à s’identifier. Ils sont devenus exactement comme Vans, tous les deux ont oublié la véritable image du skate pour juste faire une marque de fringue qui suit les tendances ».
En gagnant les faveurs de l’art, de la mode et du cinéma, les pièces Supreme deviennent des objets de collection
À défaut de séduire sur le long terme les skateurs, Supreme gagne les faveurs du monde de l’art contemporain et du cinéma. Les noms les plus en vogue de la pop culture s’associent à elle. Dans une interview accordée au New York Times, l’artiste Nate Lowman se rappelle avoir vu à la Galerie Gagosian, sur Madison Avenue, une planche qu’il avait conçue pour Supreme –ornée d’un motif de balles de pistolets- aux côtés des decks de Christopher Wool et de Jeff Koons. «Ces planches sont toutes accrochés au mur et valent des milliers de dollars ! » s’exclame-t-il en riant. En 2005, Larry Clark, vraie figure de proue de la culture skate et adolescente, fait aussi des decks tendance teenage-porn. La même année, Peter Saville – artiste à l’origine du graphisme de l’album Unknown Pleasure des Joy Division- crée quant à lui une planche new-wave. Les superstars de l’art contemporain Jeff Koons, Murakami et Damien Hirst semblent aussi avoir prit goût à l’univers skate. Savent-ils au moins plaquer un trick ? Le doute subsiste.
L’explosion de Supreme dans les années 2000
Riche de cet habile mélange entre la culture d’élite et la culture rap, Supreme atteint au début des années 2000 les sommets de la hype street et fashion. Le GQ anglais la qualifie de « marque de streetwear la plus cool au monde », tandis que le site spécialisé Business of Fashion considère qu’ils sont le « Chanel du streetwear ». La stratégie marketing de la marque, qui mise tout sur la rareté se révèle gagnante. “Supreme est une marque qui refuse de vendre, explique l’écrivain Glenn O’Brien, spécialiste de mode. Les boutiques sont rares et aucun autre point de vente n’a le droit de vendre ses produits. Quand la marque crée un e-shop, celui-ci se retrouve pris d’assaut. Avant l’ouverture du point de vente parisien, dans le Marais le 10 mars, les acheteurs français ont ainsi passé 22 ans à courir après leurs produits sur le net avant qu’ils ne soient sold-out. Et ce ne sont pas les pulls à 160 euros ou les chemises à 115 euros qui semblent les décourager au vue de leur dernière collection, déjà quasiment épuisée en quelques jours à peine.
Quand Supreme prend un virage rock et pop porn
Largement associé au rap, Supreme noue également depuis la fin des années 2000 des relations avec l’univers rock. Le regretté Lou Reed est un de leur ambassadeur en 2009. Plus récemment, le chanteur Morrissey a également posé pour eux. Ce dernier, végétarien et fortement engagé pour la cause animale, a ensuite présenté des excuses à son public en regrettant cette collaboration. La cause de ce mea-culpa : une énième collection capsule réalisée par la marque en 2015 avec la chaine de fast-food américaine White Castle, bien loin de l’éthique pro-vegan de Morrissey.
Le sulfureux (et controversé) Terry Richardson, coutumier des shootings déshabillés et provoc’ a aussi largement contribué à rendre la marque super attractive et tendance, apportant sa touche porn. Pour Supreme, sont passées sous son objectif des figures phares de la pop culture comme Rihanna, Kermit la grenouille (non, non, vous ne rêvez pas) ou encore Lady Gaga qui pour l’occasion ne s’était pas encombrée de culotte. Même Kate Moss n’a pas échappé à la tornade Supreme, apparaissant dans une campagne publicitaire, clope à la main, fourrure léopard faussement cheap sur les épaules. Cette même fourrure que l’on retrouvera dans la collection printemps-été 2016. A l’origine de cette nouvelle collection, le nouveau directeur artistique Max Vanderwoude, qui a décidé de surfer cette saison sur une vague rock et post-punk avec mannequins teenages, moustachus et manucurés et créations aux couleurs criardes. Une esthétique qui s’éloigne des fondamentaux de la marque. « Pour survivre, Supreme doit rester cool« , avait coutume de dire Jebbia. Cool, pour combien de temps ?
boutique Supreme, 20 rue Barbette 75003 Paris www.supremenewyork.com
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