A 22 ans et encore étudiant à Sciences Po, Stéphane Sitbon milite chez les Verts depuis huit ans. Sa cause et sa patronne : Cécile Duflot.
Ces militants n’ont pas 25 ans, mais déjà des responsabilités. Assistants, salariés du parti, parfois élus, leur sort n’est pas encore scellé. Certains resteront dans l’ombre ou renonceront à leur engagement, les autres feront l’actualité des années à venir. Rencontres avec les nouvelles têtes de la politique.
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Stéphane Sitbon passe sa vie à suivre Cécile Duflot. Il l’aide à écrire ses discours, l’accompagne dans ses déplacements, cale ses rendez-vous et parfois porte son sac. « Je l’appelle Patronne ». Elle le surnommait « Petit Yop », parce que « le calcium ça fait grandir ». Maintenant qu’il a grandi, c’est juste « Yop », par habitude. Officiellement assistant de Cécile Duflot depuis quatre mois, il marche derrière elle depuis quelques années. « On vit presque ensemble », plaisante le jeune homme de 22 ans. « Au bout de quelques semaines, les copines que j’ai eues me disaient : t’aurais pu me dire que t’étais marié avant. »
Stéphane est maqué avec les Verts depuis ses 14 ans. « D’autres faisaient du judo ou du théâtre, moi de la politique. » A l’occasion des élections municipales de 2001, il s’inscrit sur les listes Internet du parti. L’année suivante il demande à adhérer et rencontre Guy Philippon. « Il avait exactement 60 ans de plus que moi. Il m’a raconté son parcours, j’étais fasciné. Il a fait ma formation politique. » Il tombait bien Guy Philippon. Ancien du PSU, proche du mouvement social, il apaise les réticences de l’ado, qui craignait « les dérives droitières » de l’écologie.
Stéphane n’a pas débarqué chez les Verts pour sauver les baleines, mais pour leur approche des libertés publiques et des questions de société. Il décrit ses parents comme « des libertaires qui rejettent la politique institutionnelle et les partis ». Malgré son jeune âge, Stéphane c’était plutôt le genre à traîner à l’église Saint-Bernard. Le dimanche matin, il s’est mis à distribuer des tracts. « Ma mère ne comprenait pas trop mais me laissait faire. » Début 2002, convaincu, il devient membre des Verts sous le patronage de Martine Billard.
Quand on a 16 ans et qu’on veut faire de la politique, passage obligé par les organisations de jeunesse. Très vite, Stéphane entre à l’exécutif des Jeunes Verts. « J’ai un vrai intérêt pour la vie interne des partis. Pas de mépris pour la tambouille. C’est comme ça que tu arrives à faire des grandes choses après. »
Ce qui est marrant avec Stéphane, c’est qu’il a franchi les étapes malgré lui…Tout en affirmant que « la politique ne peut pas être un métier, c’est un engagement », son parcours militant a tout du sans-faute qui mène aux sommets. « Je connais bien les apparatchiks parce que j’en suis un », s’amuse-t-il. Lui qui ne voulait pas prendre de responsabilités finit par les accepter. Lui qui méprisait Sciences Po, synonyme de « reproduction sociale » et de « microcosme » y étudie en cinquième année. Alors quand il explique « si je suis toujours là dans dix ans, c’est qu’il y a un problème », bizarrement on a du mal à le croire. Ce débat intérieur l’agite, sans doute comme beaucoup de jeunes militants qui pourraient avoir un avenir.
En juin 2010, Sciences Po sera fini et la tentation existe. « Il y a un certain confort à vivre de la politique. Mais je ne veux pas en arriver là où la question des idées ne se pose plus. L’avantage de commencer tôt c’est que tu vois les gens se cramer. A un moment t’es une étoile et tu disparais.» Evidemment, sans vivre de la politique, Stéphane aimerait bien que sa vie professionnelle ait un rapport. Peut-être la fonction publique. Par élimination, il ne postulera « ni dans un cabinet d’avocats d’affaires, ni dans la pub, ni chez Monsanto. » Pour garder la tête froide, il cultive ses amitiés non-politiques. « J’en reviens toujours pas d’être un type qui peut tutoyer Daniel Cohn-Bendit, il était en photo dans la bibliothèque de mon père ! Mais j’ai un groupe d’amis qui s’en fout complètement. Un certain nombre d’entre eux me voient comme un cas désespéré… »
Suivre Cécile Duflot n’a pas toujours été un combat facile. En 2005, elle n’est pas retenue pour l’investiture aux présidentielles. « J’ai pleuré et j’ai pris une des pires cuites de ma vie. J’ai passé trois ou quatre semaines à zoner un peu. Mais la force de Cécile, c’est de faire travailler les gens ensemble. Elle nous a fait nous revoir. » L’année suivante, les journées d’été à Coutances se passent mal. L’aile gauche du parti, menée par Cécile Duflot, digère mal la venue de Nicolas Hulot et Corinne Lepage. « On en est sortis décimés. Dans la bagnole, c’était la lose totale. On s’est posés sur la plage, on s’est dit qu’on ferait peut-être mieux de faire autre chose que de la politique. » Finalement, ils continuent et en décembre 2006 Cécile Duflot est élue secrétaire nationale.
Petit Yop devenu grand était toujours là. « Je croyais à cette nana. Je ne veux plus voir le mec qui lit le journal et la femme qui s’occupe des enfants. Cécile est jeune, elle a trois gosses, elle bosse dans le secteur privé. Dans le monde actuel, cette femme n’a pas le droit de faire de la politique. » Aujourd’hui, ils entretiennent une relation « de confiance » et même « d’amitié ». Entrecoupée par un an à Madrid pour les études de Stéphane. « Elle m’appelait plus souvent que ma mère ! » se souvient-il en rigolant.
Dès son retour il a regagné sa place de bras droit, et fait campagne pour sa réélection à la tête des Verts. Cette année, le succès des élections européennes les a un peu débordés. « Cécile m’a dit : on a pas les épaules pour ce costard là. Et si on se plante ? Je lui ai répondu : si on se plante, on fera autre chose. »
La semaine prochaine, rencontre avec Mickaël Camilleri, des Jeunes populaires (UMP)
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