Est-ce parce qu’il publie ce texte dans un journal français et ne craint pas les représailles que le romancier se livre à autant de réflexions désobligeantes sur le physique des hommes politiques de son pays ?
Malheureusement, Nick Clegg, le leader libéral, ne possède pas vraiment la stature nécessaire pour tourner cela à l’avantage de son parti. Lui aussi est un de ces hommes politiques interchangeables au visage poupin (une nouvelle preuve, s’il en était besoin, que les Britanniques ont absorbé bien plus que la dose prescrite de politique américaine), et quand il débite ses discours, sa voix donne fâcheusement l’impression de n’avoir pas encore mué.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Cependant, les Libéraux ont pour eux un atout majeur, dont la popularité résume tout ce qu’il faut savoir de la politique britannique en 2010. C’est un homme au crâne dégarni, qui ressemble à un directeur de banque de province. Il s’appelle Vince Cable et est le porte-parole des libéraux sur l’économie. Cable aborde la façon de diriger le Royaume-Uni avec réalisme, comprenant que cela s’apparente plus à la gestion de la municipalité d’Oslo qu’à la planification de l’expansion de l’Empire romain.
Il comprend merveilleusement les difficultés économiques que traverse le pays : il voit bien que l’avidité et l’orgueil ont engendré la crise actuelle. Il est également épargné par l’aveuglement collectif qui afflige les autres membres de la classe politique et les met dans l’impossibilité de voir à quel point nous sommes dans la merde : lui dit les choses telles qu’elles sont. Bien sûr, cela tient en partie au fait qu’il n’a pas plus de chance d’accéder au pouvoir qu’un sorbet de ne pas fondre en enfer.
A moins que… Si, pour former une coalition avec les Tories ou le Labour, les libéraux posent comme condition la nomination de Cable au ministère des Finances, alors le Royaume-Uni pourrait bien se retrouver victime d’une crise de lucidité politique. Mais mieux vaut ne pas y compter. Les résultats des élections seront probablement serrés, ce qui signifie qu’il y aura bien une majorité de coalition, mais tout ce qui en résultera c’est que le gouvernement sera incapable de lever les fonds dont il aura besoin auprès des marchés, que le pays s’enfoncera plus profondément dans la récession et qu’une nouvelle élection s’avérera nécessaire lorsqu’aura émergé un clivage plus clair et purement idéologique.
On dit qu’en Grande-Bretagne la politique est la pop des laids. Eh bien, la génération actuelle des politiciens britanniques de premier plan n’est pas la plus laide que j’aie connue, mais jamais auparavant leur musique n’a été si inoffensive, ni si impopulaire. Marc Roche avait raison quand il décrivait les Tories comme de méchants petits nationalistes mais, en réalité, ce sont tous les dirigeants de tous les partis qui sont sacrément riquiquis.
Photo : Gordon Brown et David Cameron en lice pour les législatives de mai en Grande Bretagne
{"type":"Banniere-Basse"}